Archives de Catégorie: livre SF

Les flammes de l’empire – John Scalzi

Deuxième tome du cycle sur l’interdépendance de John Scalzi. L’Atalante continue l’édition de cette trilogie. Le premier tome donnait l’impression d’être dans un vrai space opera pur et dur, avec des intrigues qui tournent autour de la disparition du Flux. Ce second tome revient sur les problèmes du Flux et accentue les intrigues de palais. L’attentat contre Griselda II, les éternelles rivalités entre Nohamapetan et Lagos, et une église de l’interdépendance aux abonnés absents forment la toile de fonds de ce tome 2.

Griselda, l’emperox toute récente manque de personnalité et doit fréquemment faire appel aux souvenirs des emperox précédents, qu’elle peut consulter sous la forme d’IA holographiques dénués d’émotions. Si l’idée de sauvegarder les souvenirs et la personnalité des anciens empereurs est originale, elle diminue d’autant la personnalité de Griselda qui doit toujours s’y référer.

Curieusement, les bons manquent de personnalité, alors que les mauvais en ont beaucoup trop. Une exception avec Kiva Lagos qui semble le lien entre les deux parties et tient un langage châtié entremêlé de fréquentes scènes de sexe.

Lorsque Griselda annonce ses (soi-disant) visions concernant le flux, c’est peu crédible pour son entourage, même si elles s’appuient sur des faits scientifiques fournis par Marce Claremont. Des flux vont disparaitre et de nouveaux vont s’ouvrir. Ces modifications perturberont l’empire et certains mondes vont se retrouver coupés des autres.

La mission d’exploration entreprise par Marce Claremont va apporter des informations importantes sur la coupure du flux avec la Terre. Cette découverte va être confirmée par un avatar qui n’est pas un ancien emperox, mais simplement une IA qui gère tous les souvenirs et données.

Les Nohamapetan intriguent en permanence pour placer un des leurs sur le trône impérial. Ils n’ont aucun scrupule à tuer tous ceux qui se dressent sur leur chemin. Mais à un moment, la gouaille de Lady Kiva, les visions et le discours de l’emperox pas convaincante, l’église de l’interdépendance qui fait de la figuration, c’est léger pour une histoire qui mérite mieux.

Ce deuxième tome va plaire à ceux qui ont lu le premier. J’ai moins aimé ce second tome que le premier. Je le conseille aux amateurs de John Scalzi. Mais je ne suis toujours pas tombé dans la marmite de cet auteur. Peut-être qu’un jour ce sera le cas.

Les flammes de l’empire, John Scalzi, L’Atalante, 2020, 282 pages, illustration :  Sparth

 

Cœur d’acier — H. Paul Honsinger

Premier tome d’une trilogie nommée « De haut bord », ce cycle de space opera écrit par H. Paul Honsinger et édité chez l’Atalante a attiré mon attention. En fait, j’ai d’abord attendu d’avoir les trois tomes avant de lire le premier. Sans doute parce que la quatrième de couverture faisait référence à des cycles comme Honor Harrington et La flotte perdue. N’est pas David Weber ou Jack Campbell qui veut. C’est le genre d’argument de la part de l’Atalante qui ne m’incite pas à donner la priorité à ce cycle de SF, même s’ils éditent ces deux cycles.

Cœur d’acier, c’est le premier tome d’un space opera qui se passe en 2315. La séquence d’ouverture donne le ton en présentant un abordage spatial. Le lecteur est directement mis dans le bain et se retrouve dans un space opera aux allures militaires.

On suit Max Robichaux qui vient d’être promu capitaine de corvette et reçoit le commandement d’un destroyer nommé Cumberland. C’est un vaisseau relativement récent, dont le commandant précédent était un vrai tyran. Robichaux hérite d’un vaisseau dont l’équipage est plus habitué à astiquer les cuivres qu’à combattre. Il découvre rapidement que l’équipage manque d’entrainement, que celui-ci doit faire ses preuves au combat. Robichaux doit donc motiver ses hommes pour qu’ils forment un bon équipage.

La mission du Cumberland c’est d’aller en territoire ennemi pour saboter et détruire le trafic spatial. En somme, jouer les pirates.

Pour éviter le combat, certains membres d’équipage préparent un sabotage. Le vaisseau a fui le combat à deux reprises. Une partie de l’équipage se drogue, car trop stressé. Ce qui entraine des réactions trop lentes lors de phases importantes. On assiste à une restauration du matériel, comme le retour de la machine à café dans le carré des officiers. C’est très important pour le moral !

Il y a des éléments qui m’ont profondément dérangé dans ce livre. Par exemple dans la guerre que l’Union de la Terre et des mondes colonisés mène contre les Krags, il y a eu dans le passé un virus qui a tué la majorité des femmes (mais pas toutes). Donc, les équipages sont uniquement constitués de personne du sexe masculin. Il y a des cadets à bord, âgés d’une dizaine d’années qui s’entrainent avec des couteaux. On a l’impression que ce livre est écrit pour une histoire qui se passe au XVIII ou XIVe siècle, à bord de grands navires à voile. Jack Aubrey a certainement influencé l’auteur, ce qui ne devait pas être le cas pour Horatio Hornblower. C’est trop facile d’éliminer la gent féminine, à croire que l’auteur est misogyne. Peut-être n’a-t-il jamais vu un épisode de Star Trek où l’équipage est constitué des deux sexes ?

La première rencontre avec un vaisseau extraterrestre fait comprendre que le Cumberland n’a rien de dangereux pour une race largement supérieure aux humains. C’est donc par le dialogue que Robichaux parvient à continuer sa mission. Un peu plus tard, son destroyer arraisonne un vaisseau qui a dans ses soutes une vingtaine de tonnes d’or. Oh miracle, on est riche ! Je pensais que dans l’avenir la technologie avait plus de valeur que des métaux.

Autre curiosité de ce space opera, c’est la modification de la silhouette du Cumberland avec des pièces contenues dans ses soutes. Alors que le destroyer navigue à une fraction de la vitesse de la lumière, l’équipage va lui ajouter des excroissances en métal et en bois.

D’abord la vitesse… Je peux imaginer que certains travaux sur la coque se faisaient sans arrêter le navire. Mais ici on ne navigue pas à quelques nœuds comme au XVIII ou XIV siècle, mais à des vitesses relativistes.

Ensuite… C’est un vrai magasin ce navire, le Brico du coin. On y trouve du bois, comme s’il y avait une forêt juste à côté. Ce qui m’incite à penser que ce livre a d’abord été écrit pour la marine à voile d’il y a deux ou trois siècles, et a été transformé en livre de science-fiction.

Un destroyer qui se paie le luxe de détruire un cuirassé ! Encore une absurdité qui était possible à l’époque de la marine à voile, où à bord d’un cotre les pirates pouvaient s’emparer d’un galion. Oui, mais à technologie égale, un destroyer ne détruira jamais un cuirassé, sauf dans le cycle Honor Harrington ! Oui, mais David Weber explique dans ses romans comment y arriver. Ici, c’est un peu simpliste.

Cela reste un livre qui se lit facilement, mais qui ne joue pas dans la même catégorie que Honor Harrington ou la flotte perdue. Trop d’invraisemblances dans ce premier tome. Je n’envisage pas de lire la suite. Peut-être, que d’autres lecteurs auront un avis différent du mien.

De haut bord : Cœurs d’acier, H. Paul Honsinger, L’Atalante, 460 pages, 2016, illustration Gene Mollica,

Coeurs d'acier - Paul Honsinger

Sans concession – David Weber

Le quatorzième dans le cycle Honor Harrington, « Sans concession » est fidèle aux tomes précédents. C’est-à-dire, mélange intrigues politiques et militaires, et contient un certain nombre de batailles spatiales. L’Atalante continue à publier ce cycle de space opera qui fait le bonheur des fans du genre.

Plusieurs mois se sont écoulés depuis l’attaque de Yawata où plusieurs millions de personnes ont péri dans le système de Manticore, et où une partie des infrastructures spatiales ont été détruites. Manticore se relève lentement avec l’aide de ses alliés Graysoniens, mais aussi Havriens devenus des alliés.

La Ligue solarienne met en œuvre son plan Boucanier qui consiste à détruire les infrastructures des systèmes qui veulent quitter la ligue, et qui ont des liens commerciaux avec Manticore, ou qui sont aux marches de la fédération. C’est de l’intimidation qui consiste à réduire les échanges commerciaux que Manticore pourrait avoir avec d’autres systèmes stellaires. Mais les mandarins solariens (le groupe de personnalités politiques et militaires qui tirent les ficelles) doivent éviter que les allégations de Manticore concernant un ennemi qui agit dans l’ombre soient vraies. En élaborant « boucanier », ils espèrent intimider une bonne partie de la galaxie pour ne pas se soumettre à Manticore qui va de victoire en victoire.

Boucanier s’exécute dans plusieurs systèmes solaires, dans lesquels parfois il existe une force manticorienne. Les forces en présence sont disproportionnées en nombre de vaisseaux. Il ne fait aucun doute que la Ligue solarienne peut aligner des flottes entières face à de simples escadres manticoriennes. Mais la technologie est à l’avantage de Manticore. Comme d’habitude, les Solariens sous-estiment l’intelligence des Manticoriens. À plusieurs reprises, ils vont subir des échecs cuisants. Mais Manticore et ses alliés ne peuvent être partout à la fois. Et la ligue solarienne le sait très bien et exécute Boucanier chaque fois que c’est possible.

On a donc droit a de grandes batailles de vaisseaux, où David se bat contre Goliath. Parfois, les Manticoriens se sacrifient pour sauver des millions de personnes appartenant à d’autres systèmes stellaires, parfois la Ligue solarienne n’a aucune difficulté à appliquer son plan Boucanier. C’est une course contre la montre pour la ligue qui a des vaisseaux, mais pas les moyens financiers pour moderniser son armement. C’est aussi une course contre la montre pour Manticore qui doit retrouver son niveau de production d’avant l’attaque de Yawata.

J’ouvre une parenthèse ici, en faisant remarquer que les Solariens passent vraiment pour des imbéciles, trop imbus de leur personne, toujours en train de déformer les faits dans les médias, et surtout d’une mauvaise foi exemplaire. Tous les systèmes stellaires qui veulent l’indépendance sont considérés comme des traitres, tandis que les Manticoriens et leurs alliés sont des néo-barbares. C’est lourd de le lire au fil des pages.

Honor Harrington n’interviendra dans cette histoire que dans le deuxième volume. Dans le premier, elle se consacre plutôt à des mondanités. Mais dès qu’elle sera exaspérée par une attaque de la Ligue solarienne, et une seconde attaque sournoise initiée par l’alignement Mesan, elle va enfin utiliser la grande flotte et mettre fin à la menace de la ligue. Désolé de révéler l’info ici, mais ça se devine depuis longtemps, et en tant que lecteur on ne pouvait pas attendre indéfiniment ce moment. Sans concession, donne bien son titre à ce tome. Honor Harrington siffle la fin de la récréation et met fin à la partie. Et dans ce bras de fer direct avec la grande alliance, la ligue ne fait pas le poids.

Est-ce la fin du cycle ? Pas vraiment. Les grandes batailles ne sont plus à l’ordre du jour puisque la ligue solarienne a été défaite par Honor Harrington. La Terre et le système solaire sont relégués à un rôle de système stellaire qui a perdu la majorité de ses infrastructures militaires. Mais l’alignement Mesan n’a pas été vaincu et reste tapi quelque part dans la galaxie. C’est la chasse au lapin, comme le dit Honor Harrington. Reste à trouver le terrier. Est-ce que David Weber va l’écrire ? Probablement, mais cela n’inclut pas nécessairement Honor Harrington. Comme elle deviendra le premier Lord de l’empire de Manticore, elle n’a plus à commander un vaisseau ou une flotte. Elle devra dorénavant déléguer ses pouvoirs à des officiers de confiance et donner les ordres depuis un quartier général.

J’aurais donc tendance à dire qu’un tome 15 devrait voir le jour pour résoudre le problème de l’alignement Mesan. Ce sera probablement beaucoup de discussions et peu de batailles, voire pas de bataille du tout. Alors là le cycle serait vraiment terminé.

Quand on observe cette fin provisoire, on constate que le reste de la galaxie est loin d’être apaisé. Plusieurs systèmes stellaires veulent quitter la ligue solarienne, et cela ne se fera pas nécessairement dans le calme. Des dirigeants locaux vont probablement prendre le contrôle de leur système stellaire en utilisant la manière forte. Donc, il y aura des soulèvements qui mèneront à l’indépendance, mais tous ne prendront pas les armes. Reste à voir si ce seront des démocraties ou des dictatures. Est-ce que Manticore, Havre et Grayson vont jouer les gendarmes de la galaxie ? Cela se pourrait bien. Mais si David Weber décide d’écrire d’autres histoires dans l’univers de Honor Harrington, celles-ci n’auront jamais l’ampleur de celle qui vient de se terminer.

Je rappelle qu’on attend toujours la suite de « La maison d’acier » qui se passe avant Honor Harrington, et qui doit faire deux tomes de plus. Si David Weber pouvait s’y atteler, ce serait bien…

J’ai bien aimé ce quatorzième opus, mais en le lisant parfois de travers, comme je l’ai fait pour les tomes précédents. Les histoires de chats sylvestres ne font pas avancer l’histoire, tout comme les réunions des Mandarins (solariens). Ces chapitres peuvent donc être lus en diagonale pour accélérer la lecture. Il faut juste de temps en temps retenir l’un ou l’autre mot qui a une incidence sur le reste de l’histoire ! Ce roman aurait pu faire 600 ou 700 pages plutôt que 1104 pages !

Ce tome 14 ne manque pas de batailles spatiales. Mais au-delà de celles-ci, on remarque que Manticore et ses alliés ne cherchent pas à les provoquer, au contraire. C’est toujours la ligue solarienne qui la déclenche, et c’est toujours l’alignement Mesan qui pratique des génocides comprenant plusieurs millions de personnes. Le coupable idéal, c’est Manticore, c’est ce que la ligue veut faire croire pendant qu’elle le peut encore. Mais les médias ne sont pas dupes et comprennent que Manticore est le bouc émissaire d’un ennemi qui se cache.

Restent les batailles spatiales qui sont le cœur de tout livre du cycle, et qui nécessitent d’avoir une bonne calculatrice sous la main, ou une feuille Excel. David Weber prend un malin plaisir à détailler chaque bataille, mais ici ce ne sont pas quelques missiles qui sont largués, mais des centaines de milliers. Par moment, en tant que lecteur, on a envie de connaitre le résultat d’une bataille, et pas nécessairement tout son développement.

Dans la lignée des derniers tomes, « Sans concession » plaira aux fans du cycle. Ils devront lire les 1104 pages que contiennent les deux tomes. Ceci n’est pas vraiment une fin. David Weber l’explique mieux que moi à la fin du deuxième tome.

Sans concession, David Weber, L’atalante, 2020, 569 + 535 pages, illustration de Genkis

David Weber - Sans concession

L’effondrement de l’empire – John Scalzi

L’effondrement de l’empire de John Scalzi ne laisse planer aucun doute, c’est du space opera, mais pas militaire. Le premier chapitre qui se focalise sur une mutinerie d’un vaisseau pourrait laisser croire que tout le livre ne sera que batailles. Eh bien non ! C’est beaucoup plus subtil que ça en a l’air et c’est très bien amené au lecteur. Le premier chapitre donne simplement le ton et le rythme.

L’interdépendance représente un empire d’un peu moins d’une cinquantaine de systèmes stellaires qui s’est constitué au fil des siècles. Chacun des systèmes est relié au flux, sorte de courant hyperspatial (ou de couloir) emprunté par les vaisseaux pour se déplacer plus vite que la lumière. Ce flux varie, se déplace au fil du temps. À un moment donné, une colonie peut être connectée à l’interdépendance, et à un autre moment se retrouve isolée, car le flux s’est déplacé. Jusqu’à présent, le flux était relativement stable, mais voilà qu’il change, provoquant des effondrements dans certaines parties de l’interdépendance. L’humanité n’a pas rencontré sur son passage de race extraterrestre, elle a donc essaimé au fil du temps. La plupart des colonies se sont construites en orbite autour de planète. Elles accueillent des millions de personnes. Seule la colonie « du bout » se trouve sur une vraie planète. Cet empire était jadis connecté à la planète mère la Terre. Mais les changements du flux ont fait que la liaison avec la planète a disparu. Les grandes familles marchandes ont donc instauré un système de castes dirigées par un empereur (appelé emperox).

Au moment où commence le roman, l’emperox Batrin est sur le point de décéder et c’est sa fille Cardenia qui doit reprendre le flambeau. À la suite du décès accidentel de son frère ainé, elle est obligée de prendre le pouvoir. Elle n’a pas demandé à être emperox, mais les circonstances ne lui laissent pas le choix. Heureusement, elle a la tête sur les épaules. Après deux tentatives de meurtre sur sa personne, et après avoir appris que l’effondrement du flux risquait de changer les rapports de forces au sein de l’empire, elle tente de limiter les dégâts de la crise qui se profile.

Le Bout est aussi le théâtre d’enjeu lié à la modification du flux. Un ami de l’emperox, le comte de Claremont aussi scientifique a fait une étude sur le flux. Il envoie son fils Marce remettre le dossier à l’emperox Dossier qui intéresse la maison Nohamapetan qui fait tout pour que ce dossier n’arrive pas.

Pour ne rien gâcher, lady Kiva Agos, plus intéressée par les affaires commerciales de sa famille, se retrouve également mêlée aux événements du bout. C’est son vaisseau qui doit ramener le fils du scientifique auprès de l’emperox. Elle connait très bien les Nohamapetan et la rivalité qui existe avec sa propre famille. Derrière un langage châtié et une férocité en affaire, elle se débrouille pour récupérer l’argent que lui a fait perdre les événements et les intrigues du bout.

Sur la colonie du Bout, une révolution prend cours, alimentée en secret par les Nohamapetan. Tout est une question d’argent et de pouvoir pour destituer ou tuer le duc qui y règne. Le frère et la sœur qui sont plus proches de l’emperox cherchent à lier leur famille grâce à un mariage impérial. Mais ça ne se fait pas aussi simplement que cela, surtout si l’emperox n’éprouve aucun sentiment pour le frère ainé. La sœur devine que le bout deviendra une colonie stratégique pour l’empire et tient à disposer ses pions sur l’échiquier politique avant que l’effondrement du flux se produise. C’est certainement la personne la plus dangereuse de ce roman. Mais quel délice pour le lecteur qui découvre des personnages vraiment mauvais, auquel on a envie de botter le cul.

Un premier tome bien construit, pas trop épais qui ravira les lecteurs, car le rythme est soutenu, le tempo est rapide, les personnages bien dessinés, et une histoire facile à suivre. En un mot, excellent !

Reste plus qu’à attendre la suit, car j’ai adoré !

L’effondrement de l’empire, John Scalzi, l’Atalante, 2019, 335 pages, illustration de Sparth

L’âge de cristal – Nolan & Johnson

L’âge de cristal, un roman écrit dans les années 60 par William F. Nolan et George Clayton, qui a passé l’épreuve du temps et qui ressort dans la collection Nouveaux Millénaires de J’ai lu. Le livre se lit très bien aujourd’hui sans que le lecteur se rende compte qu’il a été écrit il y a un demi-siècle. Sorti en 1969 dans la collection Présence du futur de Denoël, avec comme sous-titre « Quand ton cristal mourra », le roman donne lieu à plusieurs suites dans sa version anglaise. En français il faut attendre une dizaine d’années pour voir le tome 2 « Retour à l’âge de cristal ».

Au 22e siècle, la démographie est contrôlée et la durée de vie des êtres humains est limitée à 21 ans. Dès leur naissance, un cristal est greffé dans la paume des bébés. La couleur de celui-ci indique l’âge et change tous les 7 ans. À 21 ans, le cristal devient rouge et clignote la veille du dernier jour. Le lendemain, le cristal devient noir et signale que la durée de vie « légale » est terminée. Ce cristal implanté permet aussi aux limiers de retrouver la trace de leur propriétaire.

À 21 ans, les humains sont censés se diriger vers des maisons de sommeil où on met fin à leurs jours. Ceux qui ne respectent pas cette loi deviennent automatiquement des fugitifs et les limiers les pourchassent pour les tuer. Ce monde n’a vraiment rien de très réjouissant.

Il existe un lieu nommé « Sanctuaire » où les fugitifs peuvent se soustraire aux limiers. Ballard, un homme de 42 ans est à l’origine de ce sanctuaire. Son cristal était défectueux et lui a permis de vivre plus longtemps sans qu’il soit menacé par la limite d’âge. Bien que fugitif, Logan veut détruire le sanctuaire et tuer Ballard, mais après lui-même avoir été traqué il est obligé de fuir avec Jessica. On découvre que le sanctuaire est en fait une station spatiale qui orbite autour de la planète Mars. C’est un peu éloigné et très loin des préoccupations des fugitifs. Cette société, qui n’a pas la moindre empathie pour ses citoyens, est régie par des ordinateurs, dont le plus important s’appelle le penseur. Des robots se chargent des tâches les plus importantes et permettent aux humains de se soustraire à tout travail.

Il ne faut pas confondre le roman avec le film de 1976 ni avec la série télé de 1977 qui en découle. Le livre montre une civilisation « ouverte » qui ne connait pas la cité des dômes. Le carrousel n’existe pas, pas plus que la séance qui mène à la renaissance. Le livre se rapproche davantage d’une course poursuite dans laquelle Logan passe du rôle de chasseur à celui de proie, accompagné par Jessica. Son but c’est découvrir le sanctuaire et le détruire, et par la même occasion tuer Ballard. Mais comme lui-même arrive au terme de ses 21 ans, il est lui-même pourchassé.

Le film corrige certains défauts du livre. Les personnes meurent à 30 ans alors que dans le livre c’est à 21 ans, ce qui permet d’avoir des personnages u peu plus mûrs. La cité des dômes qui apparait dans le film permet au spectateur de mieux appréhender les distances, alors que le livre donne l’impression que les personnages principaux traversent les États-Unis.

Retour à l’âge de cristal (sorti en 1979 chez Denoël), voit Logan et Jessica revenir sur Terre, accompagnés de leur fils Jaq. Ils redeviennent des fugitifs dans une civilisation qui se morcèle, qui s’effrite, mais dans laquelle il y a encore des limiers. Ce second roman devait à l’origine être le scénario du deuxième film, mais il n’en a rien été. Il a laissé la place à une série de 13 épisodes. Je ne m’appesantirai pas sur la série télé qui part d’une bonne idée, mais qui a mal été exploitée, car les scénaristes de l’époque ne connaissaient pas grand-chose à la science-fiction.

Il y a une question que je me suis toujours posée, surtout lorsque j’ai vu le film à l’époque de sa sortie (mais qui est valable pour le livre aussi). Comment font les personnes pour prendre des objets de la main gauche alors qu’ils ont un cristal dans la paume ? Je me suis dit que les auteurs auraient été mieux inspirés de placer le cristal au dos de la main ou sur l’avant-bras. C’est un détail.

Un livre sans temps mort, dans lequel les deux personnages principaux, Logan et Jessica, fuient une civilisation dirigée par des ordinateurs. Le terme IA n’était pas encore utilisé à l’époque. Une science-fiction peut-être un peu trop classique par rapport à ce qui se produit aujourd’hui. Cela reste agréable à lire, et réédité dans la collection J’ai Lu Nouveaux Millénaires, accompagné de sa suite « Retour à l’âge de cristal ». Dommage que l’éditeur n’ait pas décidé de traduire tous les romans et nouvelles du cycle pour en faite une intégrale. A lire et à comparer au film du même nom.

L’âge de cristal, William F. Nolan & George C. Johnson, J’ai lu Nouveaux Millénaires, 2019, 350 pages, illustration de Johann Goutard

L'âge de cristal - Nolan & Johnson

Ascendant – Jack Campbell

Trois ans se sont écoulés depuis les derniers événements de « Avant-garde ». Rob Geary est toujours à Glenlyon, mais il ne commande plus un vaisseau spatial. Il doit gérer la station spatiale qui orbite autour de la planète principale. Le gouvernement a préféré laisser les forces armées dans les mains de terriens, plus aguerries pour gérer la situation. Mais la destruction d’un transport par les forces de Scatha va tout remettre en question.

C’est un homme capable de prendre des initiatives, quelqu’un qui a déjà connu le feu et qui est capable de former et commander des hommes et des femmes qui défendront Glenlyon. Ça ne semble pas être le cas des terriens qui ont pris la relève.

Pendant ces trois années passées, Rob Geary a eu plus de temps à consacrer à sa femme « Ninja » et à son enfant. Mele Darcy, qui est toujours une amie fidèle, fait aussi partie de sa famille.

Quand on demande à Rob Geary de reprendre du service actif en commandant le destroyer Sabre, il sait que si on fait appel à lui c’est pour protéger Glenlyon et venger la destruction du transporteur. La tâche ne sera pas facile et Rob Geary compte bien sur Mele Darcy pour l’épauler. Elle a pour rôle de former de nouveaux fusiliers qui embarqueront sur le Sabre.

Glenlyon doit aussi se trouver des alliés dans cette région dangereuse de la galaxie. Scatha leur ennemi de toujours s’est allié à deux autres systèmes stellaires et a toujours comme objectif de s’emparer de Glenlyon. Il est nécessaire de renforcer les défenses du système et en parallèle d’envoyer des émissaires vers les systèmes les plus proches.

Lors d’un déplacement du Sabre, Rob Geary à une intuition. Plutôt que de retourner vers Glenlyon, il décide d’envoyer le Sabre dans le système de Kozatka. Ce n’est pas clairement les ordres qu’il a reçus du gouvernement. Mais aider Kozatka permettrait de se faire un allié de plus.

Ce tome 2 est calqué sur le même schéma que le premier tome. C’est-à-dire sur une situation de crise, d’un combat spatial et d’un combat au sol en parallèle, avec l’incertitude de la victoire des deux côtés. Des pertes sont à déplorer, mais les choix de Rob Geary et de Mele Darcy sont finalement les bons. Curieusement, comme gratification Rob Geary se voit écarté du commandement d’un vaisseau dans les deux livres. Il est remercié pour ce qu’il a accompli, car les politiques n’apprécient pas trop ses initiatives qui sont pourtant les bonnes.

Les personnages principaux sont de plus en plus attachants au fil du temps, mais il manque encore quelque chose pour qu’ils aient suffisamment de charisme pour convaincre l’ensemble de la classe politique de Glenlyon. Je pense que Jack Campbell tient à ce que ses personnages doutent toujours de leur avenir, car ralentis dans leur progression par des esprits obtus.

Le cycle de la flotte perdue de Jack Campbell n’atteint pas en intensité celui d’Honor Harrington de David Weber, mais il se démarque par une histoire plus fluide, sans lourdeur, sans description trop technique. Cela donne des romans qui contiennent deux fois moins de pages.

Au final un bon deuxième tome. Mais espérons que le troisième ne soit pas sur le même canevas, car le lecteur aurait l’impression de relire la même chose. J’ai bien aimé ce second tome, mais il m’a moins surpris que le premier. Reste que j’attends le troisième avec impatience.

Peut-être que plus d’intrigues politiques viendraient casser cette image de space opera militaire, ce qui ne serait pas pour déplaire. Mais qui nécessiterait de s’intéresser à d’autres personnages capables de favoriser ou de faire échouer les plans des différents systèmes stellaires.

C’est un space opera de bonne facture chez L’Atalante, en attendant la sortie du prochain Honor Harrington.

Ascendant, Jack Campbell, L’Atalante, 396 pages, 2018, illustration de David Demaret

Ascendant - Jack Campbell

Kaboul – Michael Moorcock

Denoël nous publie dans la collection Graphic un livre de Michael Moorcock, Kaboul et autres souvenirs de la troisième guerre mondiale, livre illustré par Miles Hyman. Il s’agit d’une suite de nouvelles qui ont comme trait commun un agent secret.

La couverture de ce livre m’avait frappé non pas par la combattante armée qui se trouve devant l’explosion d’une bombe atomique, mais par le style du dessinateur qui me semblait familier. Et c’est bien le cas. Pour une fois, je vais commencer par l’illustrateur plutôt que l’auteur. Le livre contient une quinzaine d’illustrations qui représentent les différentes scènes rencontrées lors de la lecture de ces nouvelles. Elles sont fidèles à l’histoire et mériteraient d’être plus nombreuses.

En fait, Miles Hyman, je l’ai retrouvé dans ma bibliothèque entre deux bandes dessinées. Il avait fait précédemment l’adaptation BD du dahlia noir, tiré du roman de James Ellroy, et adapté par Matz/David Fincher (édition Rivage, Casterman, Noir).

Miles Hyman n’est pas un inconnu. C’est en grand illustrateur qui vit entre la France et les États-Unis. Ses dessins se retrouvent dans les grands quotidiens. Ses dessins sont très réalistes et son œuvre mérite toute notre attention.

Comme le personnage principal de ce livre voyage à travers une bonne partie de la planète, les illustrations représentent souvent des lieux où la guerre sévit et elles collent parfaitement à l’ambiance que veut donner l’auteur à ses nouvelles.

Michael Moorcock, je connais très bien pour avoir lu tout son cycle sur le champion éternel (Elric, Corum, Erekosé, Hawkmoon), et pour l’avoir rencontré il y a quelques années. L’auteur est une référence en fantasy, et est aussi connu pour ses uchronies. Je pense à Le nomade du temps, Gloriana ou la reine inassouvie. Kaboul s’inscrit aussi dans une uchronie, où la troisième guerre mondiale tient lieu de fonds à cette anthologie. Il ne s’agit pas d’un roman, mais d’une suite de nouvelles qui mettent en scène Tom Dubrowski, un agent secret ukrainien qui se fait passer pour un antiquaire. Chaque nouvelle représente une étape dans la vie de ce personnage, qui se balade aux quatre coins du monde, parfois comme simple agent de renseignements, parfois comme tortionnaire ou combattant. Sa vie est parsemée de rencontres politiques, militaires, voire sentimentales.

Je pense que Michael Moorcock nous a donné depuis longtemps le meilleur de son œuvre avec son cycle du champion éternel, et que ce livre ne vient pas la renforcer, mais se détache un peu plus du tronc commun plus orienté fantasy.

Reste que Michael Moorcock est un bon auteur qui se laisse lire, dont les textes décrivent parfaitement les situations dramatiques lors d’une troisième guerre mondiale, mais aussi les craintes de chacun face au chaos qui se présente à l’ensemble de l’humanité. Tom Dubrowski n’est pas particulièrement un personnage attachant, mais le fait qu’il soit le narrateur de ce livre donne un intérêt particulier. Sa vie sentimentale est également au cœur de ce livre, ainsi que ses diverses missions. C’est un agent secret, mondain par certains côtés, et un soldat qui se retrouve au milieu d’un conflit planétaire, qui décrit les travers de notre société.

Ce que j’ai apprécié, c’est que Michael Moorcock reste vague dans le conflit qui existe entre l’occident et l’orient. Il se contente de le décrire en toile de fond, sans prendre parti pour l’un ou l’autre côté. À travers les yeux de son personnage, on voit lentement évoluer ce conflit, voire à mettre en danger Dubrowski en étant trop proche de l’explosion d’une bombe nucléaire. Le livre se termine sur un retour aux sources et des problèmes de santé, mais l’histoire reste sur une fin ouverte.

Je n’ai qu’une critique à faire aux éditeurs, c’est de n’avoir pas pensé à ordonner les nouvelles sur une ligne de temps. Par exemple Kaboul doit faire suite à Danse à Rome, et Escale au Canada n’est pas suite de cette dernière ! C’est un détail, mais il n’est nulle part fait mention de flashback dans ce livre, donc les nouvelles auraient pu être ordonnées.

Reste une lecture originale d’une troisième guerre sur une Terre fort proche de celle que nous connaissons. Ces nouvelles ne sont pas très longues et agréablement étoffées par les illustrations de Miles Hyman.

Kaboul et autres souvenirs de la troisième guerre mondiale, Michael Moorcock, 2018, 224 pages, illustrations de Miles Hyman

Kaboul - Moorcock

L’ombre de la victoire – David Weber

Avec L’ombre de la victoire en deux tomes, l’univers d’Honor Harrington de David Weber continue à se développer avec ce cycle annexe qui fait parfois intervenir les personnages principaux, mais qui se concentre sur les événements qui sont parallèles au cycle principal.

Honor Harrington n’apparait pas dans ce livre qui se passe principalement dans l’amas de Talbot. Mais les événements qui y sont relatés ne sont pas inconnus aux lecteurs du cycle. En fait, on revit les mêmes moments que les autres cycles, mais étalés dans le temps, et depuis une région de la galaxie où les intrigues contre Manticore se trament. Donc, le lecteur ne doit pas être étonné de cette répétition. L’intérêt de ce livre est d’expliquer comment certaines situations critiques en sont arrivées là.

Cela dit, on constate que toutes les intrigues convergent autour de l’amas de Talbot et que les différents protagonistes (Manticore, Havre, la ligue solarienne, la flotte des frontières, Mesa, et la myriade d’agents secrets et comploteurs qui sont autour) risquent fort de s’affronter sur plusieurs champs de batailles dans la même région de la galaxie. On pense évidemment à l’opération Janus, puis baie des huitres menées par Mesa contre Manticore. Mais aussi aux interventions de la ligue solarienne qui se croit tellement supérieure au reste de la galaxie, qu’elle en a oublié que sa technologie est complètement obsolète face à celle de Manticore ou de Havre.

L’alignement mesan fait tout son possible pour faire en sorte que les Manticoriens passent pour des mauvais au sein de la galaxie. Ils organisent des attentats sur plusieurs mondes, jusqu’à utiliser l’arme atomique contre leur propre peuple. Ils font croire que les Manticoriens vont aider tous les peuples qui se révoltent contre la ligne solarienne. La ligue de son côté voit son commerce subir le contrecoup de la guerre économique et militaire menée par Manticore.

On revit la destruction de la base Héphaïstos dans le système de Manticore, la destruction du croiseur Hexapuma et de tout son équipage à l’exception du capitaine Aivars Terekhov. Le vaisseau avait vaillamment combattu et vaincu un ennemi supérieur dans l’amas de Talbot, au point d’en devenir emblématique.

On survole les victoires de Michelle Henke l’amiral du Pic d’or contre les flottes de la ligue solarienne. Ce sont principalement des répétitions d’événements déjà lus dans d’autres livres du cycle, mais vus sous un autre angle. Et puis, Michelle Henke aider par l’amiral Tourville, ce n’est pas courant. Le final de ce livre est assez particulier, l’alignement mesan n’hésite pas à tuer une grande partie de « l’oignon » qui le compose pour cacher la vérité au reste du monde et peut-être renaitre de ses cendres.

Le dénouement s’approche, mais il faudra encore attendre quelques livres (un ou deux) pour enfin voir le bout de ce conflit commencé avec Havre, continué par Mesa et la ligue solarienne, où Havre s’allie à Manticore. C’est grand, c’est gigantesque, c’est presque impossible à résumer tellement il y a des personnages et des intrigues.

Ce livre a un défaut, c’est qu’il y a une pléthore de personnages qu’il est impossible de retenir. L’auteur se perd dans des détails qui ne font pas avancer l’histoire. En fait, David Weber se prend parfois pour Proust. Dans A la poursuite du temps perdu, des dizaines de personnages sont présentés par l’auteur et servent à renforcer l’histoire. Mais tout le monde n’est pas Proust, et David Weber nous noie sous des tonnes de détails inutiles et de personnages qui ne font que passer. La solution la plus simple c’est de lire en diagonale certains chapitres. Les fans d’Honor Harrington sont habitués à ce genre de longueur. Une astuce pour lire ce long roman de science-fiction consiste à s’intéresser principalement à Aivars Terekhov et sa femme, ainsi qu’à Michelle Henke.

Cela reste donc un très bon cycle pour le lecteur de science-fiction qui suit de près le cycle Honor Harrington. Mais il est temps que David Weber se décide à conclure le face à face entre Manticore, Mesa et la ligue solarienne. La fin est proche et ça se sent.

À lire, mais attention aux longueurs !

L’ombre de la victoire T.1 & 2, David Weber, L’Atalante, 2018, 1065 pages

L'ombre de la victoire T1-T2

Space O Matic – Manchu

Après Starship[s] et Science[Fiction], Delcourt nous propose Space O Matic, troisième livre consacré à l’œuvre de Manchu.

J’ai toujours considéré Manchu comme le plus grand illustrateur en matière d’imaginaire. Cela à commencer dans les années quatre-vingt avec l’encyclopédie galactique en deux volumes de François Nedelec. Comme j’ai toujours adoré la science-fiction depuis un demi-siècle, j’ai parfois été déçu de ne pas trouver davantage de couvertures de livres qui collent aux l’histoires. Mais voilà, Manchu est arrivé et cela a changé beaucoup de choses.

Cela m’a aussi donné l’envie de voir une de ses expos à Paris. Pour moi, il n’y a pas de meilleur illustrateur dans le domaine de la science-fiction. Suivre son œuvre n’est pas aisée car il y a tellement de livres consacrés à l’imaginaire ou tellement de bandes dessinées auxquels il a participé, que c’est difficile de recenser toute sa production.

En dehors du livre Manchu Sketchbook sorti en 2008, on peut avoir une vision de sa production à travers Starship[s] sorti en 2004 et introuvable, Science[Fiction] sorti en 2010, et Space O Matic sorti en 2017.

Quand on regarde la qualité des détails de chaque illustration, on se demande si elles sortent uniquement de l’esprit de Manchu, ou s’il a régulièrement trouvé le moyen de sillonné la galaxie et l’univers à la recherche de mondes étranges, d’artefacts mystérieux et de vaisseaux aux lignes épurées ou de taille démesurée. C’est tellement réaliste, que cela devient une référence graphique.

Pour prendre un exemple de présence de Manchu dans la science-fiction, je suis en train de lire Vestiges de Laurence Suhner. Que ce soit la couverture grand format ou celle du livre de poche, cette dernière est faite par Manchu, et pour les deux éditions ce sont bien deux illustrations différentes.

Pour un amateur de science-fiction, de fantasy ou de BD, Manchu est une vraie bénédiction. Ses illustrations représentent fidèlement ce que les auteurs ou lecteurs imaginent d’une scène d’un livre. Et si ce n’est pas le cas, elles aident le lecteur à mieux entrer dans le roman ou la BD, voire même à terminer la lecture d’un livre lorsque ce dernier à quelques faiblesses. C’est un peu comme si Manchu jouait le rôle de locomotive pour certains livres et bandes dessinées.

Certaines illustrations vont même donner envie aux lecteurs de lire ou relire des livres qu’on peut parfois considérer comme juvéniles. Je pense par exemple à la trilogie de l’espace d’Arthur C. Clarke, parue en 2001 chez Bragelonne, qui comprend Iles de l’espace, Les sables de Mars, Lumière cendrée. Cette mise à jour graphique apporte un plus à des livres qui ne manquent pas d’intérêt, mais qui ont parfois un peu été oubliés par de nouveaux lecteurs.

La première partie du livre est un florilège d’illustrations qui mêlent science-fiction, exploration spatiale, rencontres avec d’autres civilisations, mais aussi fantasy et aventures. La finesse des détails est saisissante, les couleurs sont chatoyantes et les décors laissent rêveurs. Une mission sur Mars devient soudain plus compréhensive pour le lecteur. Bon nombre de ces illustrations sont accompagnées de roughs (maquettes) qui montrent parfois la même scène sous des angles différents.

Ce sont des auteurs tels que Poul Anderson, Robert Silverberg, Laurent Genefort, Olivier Paquet, Laurence Suhner, Arthur C. Clarke, Iain M. Banks ou Isaac Asimov qui sont mis à l’honneur avec les couvertures de Manchu. On pourrait même dire que toutes ses illustrations pourraient donner naissances à de nouvelles histoires.

Une seconde partie du livre se focalise sur les participations de Manchu dans le domaine de la bande dessinée. Bon nombre de couvertures de BD lui sont imputables. C’est par exemple le cas pour les séries Hauteville House, Jour J, L’homme de l’année et Artica. J’ai moins été tenté par ces cycles BD. C’est probablement parce que j’espérais trouver la patte de Manchu chaque fois que je tournais une page.

Une dernière partie du livre est consacrée au steam punk et a une steam car en particulier, dont on peut admirer les croquis, mais aussi une maquette du véhicule dans un environnement victorien.

En attendant, je conseille cet Art book à tout amateur d’imaginaire qui a envie de retrouver une grande partie des illustrations les plus récentes de Manchu. Personnellement, je suis un inconditionnel de l’illustrateur, donc la présence de ce livre dans ma bibliothèque est une obligation que je m’impose. Il rejoint ses autres livres. J’espère qu’il y aura un quatrième, voire cinquième volume dans les années qui viennent. Je me dis qu’un jour la bannière de mon blog de science-fiction serait inspirée par Manchu.

Un livre à conseiller aux amateurs d’imaginaires, mais aussi à toute personne qui aime les arts books.

Space O Matic, Manchu, éditions Delcourt, 2017, 96 pages.

Manchu Space O Matic

L’empereur de l’espace – Edmond Hamilton

Voici la première aventure écrite en 1940 du cycle Capitaine Futur de Edmond Hamilton. C’est les éditions du Bélial qui nous font découvrir (ou redécouvrir pour ceux qui l’ont lu en anglais), les aventures du capitaine Futur. Un deuxième tome est sorti en même temps que L’empereur de l’espace, c’est A la rescousse. Pour ceux qui l’ignorent, le Capitaine Futur a été adapté en dessin animé en 1979 sous le nom de Capitaine Flam.

On doit cette nouvelle traduction à Pierre-Paul Durastanti, qui a l’habitude de nous proposer des classiques oubliés de la science-fiction (Les vandales du vide, Miro Hertzel, etc.) pour notre plus grand bonheur.

Edmond Hamilton est un pionnier du space opera et de l’aventure spatiale. On lui doit Les rois des étoiles, Les loups des étoiles, Hors de l’univers, Les voleurs d’étoiles, pour ne citer que quelques livres de l’auteur. C’est de la science-fiction épique dans laquelle l’action et l’aventure priment sur la véracité scientifique. Ce qui correspond à nos lectures de notre enfance ou adolescence. Le principal, c’était de lire un bon roman de science-fiction, et pas de savoir si Jupiter était une planète viable pour l’homme.

Ce premier tome des aventures du Capitaine Futur, alias Curt Newton, permet de découvrir les origines du personnage. On pourrait presque le comparer à Flash Gordon, mais en plus posé, plus intelligent, mieux entouré, dont la vocation est de protéger le système solaire.

On découvre que Roger Newton était un brillant biologiste qui travaillait avec Simon Wright. Les deux hommes travaillaient sur des intelligences artificielles et la possibilité d’en faire des créatures intelligentes et artificielles. Mais Wright était trop vieux et pour le garder en vie, Newton a dû transférer son cerveau dans une sorte de boite métallique transparente. Pour se soustraire aux menaces externes, Newton et sa femme, ainsi que Wright ont continué leurs expériences sur la Lune. D’abord ils ont créé Grag le robot, et ensuite Otho qui avait une apparence plus humaine, mais qui a la capacité de prendre d’autres apparences. Au même moment, l’épouse de Newton mettait au monde un petit garçon qui s’appelait Curt, et qui deviendrait plus tard le capitaine Futur. Lorsque Newton et sa femme furent tués, les deux robots s’occupèrent de l’enfant, assistés par Simon Wright. Ils lui apprirent tout ce qu’ils savaient et le formèrent dans plusieurs domaines. C’est là que Curt Newton deviendra petit à petit le capitaine Futur.

Lorsqu’il y a un nouveau danger dans le système solaire, le président de la Terre envoie un signal au capitaine Futur pour lui demander son aide. Vous ne trouvez pas que ça fait un peu bat-signal ? Sauf qu’ici le signal est envoyé vers la Lune. Et le Capitaine Futur sort de sa bat-cave… pardon de son labo lunaire, accompagné de Simon Wright, de Grag et Otho.

Suite à une épidémie inconnue qui fait régresser les humains au point de redevenir des animaux, le président découvre que c’est l’œuvre de l’empereur de l’espace. Un être dont personne ne sait rien, qui se cache derrière un déguisement sombre et qui a la capacité de se dématérialiser. Il n’a d’autre solution que de demander l’aide du capitaine Futur, qui va directement se mettre à la recherche de cet empereur de l’espace. Lui et son équipe vont aussi essayer de trouver un antidote à ce fléau qui se répand dans le système solaire. Voilà dans les grandes lignes le début de ce roman.

J’ai évité de faire le parallèle entre le livre et le dessin animé Capitaine Flam. L’empereur de l’espace correspond aux premiers épisodes et suit presque le livre. Grag est devenu Crag, Otho est devenu Mala, le vaisseau Comète est devenu le Starlabe. Le dessin animé situe l’histoire sur Mégara alors que dans le roman c’est sur Jupiter. Comme on fait abstraction des lieux et de la technologie, cela n’a pas une très grande importance.

En tant que lecteur, il faut juste se familiariser avec des termes qui ont parfois un charme désuet : voiture-fusée, avion-fusée, lunettes fluoroscopiques, rayon protonique, immatérialiseur, foudroyants.

Je ne sais pas si le Bélial envisage d’éditer l’ensemble des histoires liées au Capitaine Futur. Si c’est le cas, c’est une belle initiative que je suivrai de près, car à l’adolescence les livres de Edmond Hamilton m’ont marqué comme beaucoup de lecteurs de ma génération. Je pense qu’un format Omnibus qui reprend 5 ou 6 aventures serait préférable. Le cycle comprend 17 histoires précédemment sorties dans Captain Future Magazine, et 10 autres histoires dans Startling Stories. Il y a donc assez de matière pour en faire des omnibus, comme chez Haffner Press.

Ceci dit, c’est une belle initiative d’éditer enfin en français ce héros de science-fiction qui nous avait échappé dans la langue de Molière, si ce n’est sous forme de dessins animés. À notre époque, on peut cataloguer cette science-fiction dans la catégorie jeunesse. Mais au milieu du vingtième siècle, ces histoires faisaient le bonheur des lecteurs de pulps. Il faut donc lire avec un certain recul ce premier tome du capitaine Futur, se mettre dans la peau du lecteur de l’époque qui était plus émerveillé qu’aujourd’hui.

Et puis, n’oublions pas que Edmond Hamilton a contribué de manière significative à la science-fiction d’aujourd’hui. Star Wars en est un bon exemple. Il faut se souvenir que Leigh Brackett, l’épouse de Edmond Hamilton était aussi auteur de science-fiction et on lui doit le scénario de L’empire contre-attaque.

Donc, si l’envie vous vient de découvrir les auteurs de science-fiction qui sont à l’origine du genre, en voici un bon exemple. L’empereur de l’espace de Edmond Hamilton se laisse lire. Belle initiative du Bélial et de Pierre-Paul Durastanti en particulier.

L’empereur de l’espace, Edmond Hamilton, Le Bélial, 2017, 203 pages, traduit par Pierre-Paul Durastanti, illustration de Philippe Gady

L'empereur de l'espace - Edmond Hamilton

 

Fidèle à ton pas balancé – Sylvie Lainé

Depuis trois décennies Sylvie Lainé apporte sa pierre à l’édifice imaginaire et science-fiction en particulier. Même si elle n’a pas commis de roman et préfère écrire des nouvelles, elle représente une auteure majeure de la science-fiction francophone. À la différence d’autres auteurs, elle a suscité l’intérêt et la passion à travers des textes courts. Et le temps passant, elle a toujours suivi une voie qui lui était propre, pas influencée par les autres auteurs.

Lire une de ses nouvelles est toujours un vrai bonheur. Et « Fidèle à ton pas balancé » reprend 26 textes qui ont amené les lecteurs dans d’autres contrées de l’univers. On lui doit quatre recueils de nouvelles édités par ActuSF :

  • Le miroir aux éperluettes
  • Espaces insécables
  • Marouflages
  • L’opéra de Shaya

Ces quatre recueils sont entièrement repris dans cette nouvelle anthologie, et même complétés par sept nouveaux textes. J’invite le lecteur à retrouver les chroniques précédentes pour les quatre recueils sur mon blog ou sur Phénix Mag.

Dans cette chronique, je vais davantage me focaliser sur les nouveaux textes :

Mélomania – Cette nouvelle aborde le domaine du remplacement d’organe humain. Lorsqu’on a un frère qui est devenu manchot après un accident de voiture, rien de plus facile que de se faire pousser un autre bras sur son propre corps, pour ensuite le faire greffer chez le frère. Le problème c’est que le bras et la main sont devenus des virtuoses du clavier, et que l’idée de s’en séparer est hors de propos.

Sirius m’était compté – Et si votre chien préféré était recréé tous les jours ? Vous payez 30 jours de clonage et on vous fait une promotion de 40 jours. Soit 10 jours de bonus. De plus, vous pouvez étaler ces 40 jours sur une période plus longue. Le seul problème, c’est que ça vous coute la peau des fesses.

Le printemps des papillons – Et si on utilisait des papillons comme moyen de communication, en inscrivant des messages sur leurs ailes ?

Le karma du chat —La domotique est très présente dans cette nouvelle, au point que les objets de la maison décident eux-mêmes de ce qu’ils vont faire, jusqu’au chat qui n’est pas tout à fait naturel. La quiétude laisse soudain la place à une sorte de chaos orchestré par des intelligences artificielles, que les propriétaires n’arrivent pas à maitriser. Cette nouvelle est pleine d’humour et devrait faire prendre conscience que la domotique risque à terme de connaitre des dérives. Très amusant comme nouvelle.

Temps, bulle et patchouli — Sous une bulle représentant un modèle réduit, on assiste à la création de l’univers.

Toi que j’ai bue en quatre fois — Se faire le grand flash eroticomane, c’est tout un programme ! Quatre éprouvettes contenant des liquides de différentes couleurs vont permettre de faire un trip érotique qui va s’étaler sur deux heures. En fait, chaque couleur à une signification particulière. Pas mal comme nouvelle. On aurait presque envie que les quatre fluides existent.

Petits arrangements intergalactiques (Verso) – Cette nouvelle est le pendant de Petits arrangements intergalactiques. La différence, c’est que l’histoire est racontée du côté Groc plutôt que du côté humain. Si la communication (ou l’absence de communication) est au cœur de cette nouvelle, elle n’en reste pas moins originale et cocasse.

Parmi les autres nouvelles précédemment publiées, plusieurs d’entre elles m’ont marqué. Je pense à : La bulle d’Euze, Un signe de Setty, Carte blanche, Les yeux d’Elsa, L’opéra de Shaya, Un amour de sable. Nouvelles parfois sensibles, parfois surprenantes, parfois amusantes.

Petits arrangements intergalactiques et sa suite (Verso) mérite aussi une attention particulière, car les deux nouvelles racontent la même histoire vue par des personnages différents.

Comme d’habitude, dans les nouvelles de Sylvie Lainé on va à l’essentiel des personnages, des lieux ou des situations dans lesquels ceux-ci se retrouvent. La technologie est présente, mais sans ennuyer les lecteurs avec des détails qui n’apporteraient rien de plus à l’histoire. Chaque nouvelle provoque le dépaysement. Une situation simple et évidente peut se transformer en situation complexe et dangereuse.

La prose de Sylvie Lainé ne m’a jamais laissé indifférent, au contraire. J’ai aimé la lire tout au long de ces années et si j’ai pris gout à lire des nouvelles c’est grâce à elle. Comme je l’ai dit précédemment, Sylvie Lainé apporte une note de littérature à la science-fiction, rendant le genre encore plus ouvert à des lecteurs qui osent sortir des sentiers battus de la littérature.

Le titre du recueil correspond à la dernière nouvelle du livre. Si je trouve le titre original, ce n’est pas nécessairement ce titre que j’aurais choisi, mais plutôt « Le chemin de la rencontre », car des rencontres, on en fait à chaque nouvelle. C’est même le moteur essentiel de chaque nouvelle. Que ce soit des rencontres entre humains ou avec des extraterrestres, elles sont toujours au cœur de chaque texte. Parfois elles nous surprennent, parfois elles nous font sourire. Dans tous les cas, elles sont empreintes d’une certaine sensibilité qui se ressent au fil des pages.

À noter que dans « Fidèle à ton pas balancé » on a droit à une préface écrite par Sylvie Lainé, alors que dans les quatre recueils précédents c’est Jean-Claude Dunyach, Catherine Dufour, Joëlle Wintrebert et Jean-Marc Ligny qui l’ont rédigée. Je ne veux pas dire par là qu’elle boucle son œuvre, mais que cette anthologie mérite de sa part une préface.

On pourrait me reprocher que cette chronique est plus subjective que mes chroniques précédentes. Si c’est le cas, je l’accepte volontiers, car Sylvie Lainé est vraiment une auteure majeure de la science-fiction, qui mérite que je lui apporte une attention plus particulière. Comme je l’ai d’ailleurs cité sur un autre média, lire « Fidèle à ton pas balancé », c’est un peu comme boire un grand vin. On prend son temps pour le déguster et pour apprécier tout son arôme.

Je dirai donc aux lecteurs qui veulent connaitre l’œuvre de Sylvie Lainé, ou aux amateurs avertis qui veulent approfondir son univers de lire ce recueil de nouvelles qui reprend trois décennies d’écriture. C’est une perle qu’il faut avoir dans sa bibliothèque et qu’il faut évidemment avoir lue.

Fidèle à ton pas balancé, Sylvie Lainé, ActuSF, 2016, 484 pages

Sylvie Lainé - Fidèle à ton pas

La maison d’acier – David Weber

Le cycle Honor Harrington écrit par David Weber s’est enrichi d’un guide de l’univers de la série et d’un court roman. J’avais précédemment eu la version anglaise de ce livre, pour pouvoir consulter les informations techniques et historiques de « l’Honorverse ». Mais je ne m’étais pas attelé à la lecture du roman qui précède ce guide. Erreur que je viens de corriger avec la version française publiée par l’Atalante.

Ce livre est uniquement fait pour les fans du cycle. C’est la référence pour toute personne qui veut connaitre les données techniques des vaisseaux, la personnalité des différents acteurs de ce cycle, la politique menée par les différentes puissances spatiales, les différentes technologies utilisées, etc. En somme, tout ce qui a pu être lu précédemment dans ce cycle est ici résumé et classé. Je ne vais donc pas m’appesantir sur ce qui est censé être connu par les fans du cycle.

La maison d’acier est un roman à ne pas négliger. Il précède le cycle Honor Harrington et se focalise sur le roi Roger Winton III, le père de la reine Elizabeth III. On suit l’héritier du trône depuis qu’il est lieutenant de vaisseau dans la flotte royale manticorienne, jusqu’à ce qu’il prenne la succession de sa mère pour devenir roi, puis jusqu’à son décès. L’histoire s’étale sur plusieurs décennies, pendant lesquels Roger assiste lentement à la montée en puissance de la République populaire de Havre, qui annexe petit à petit les systèmes stellaires voisins et devient une menace de plus en plus grande pour Manticore.

À travers des projets mis en place avec l’aide de sa mère, et de Jonas Hadcock (son meilleur ami et son futur beau-frère), Roger va participer à la création d’une force capable de rivaliser avec la RPH. Cela va prendre des décennies. D’abord en intégrant ArmNav et en travaillant avec Hadcock, ensuite en devenant souverain et en infléchissant la politique défensive de Manticore. C’est là que son vœu de créer une maison d’acier pour Manticore prend tout son sens. Roger devra composer avec les rivalités politiques au sein de son propre système solaire, mais aussi en créant des alliances avec les autres systèmes voisins.

En parallèle à ça, Angélique la sœur de Jonas Hadcock devient l’épouse de Roger et quelques années plus tard mettra au monde une petite fille qui deviendra la reine Elizabeth III. Tout semble se dérouler convenablement, jusqu’à ce qu’un accident mette un terme à l’existence de Roger. On découvrira qu’il ne s’agit pas d’un accident, mais d’un assassinat commandité par Havre.

Elizabeth arrivée à l’âge de régner prend la succession de son père, et ne dévoile pas directement que derrière ce meurtre se cache la République Populaire de Havre. Ce n’est qu’avec l’invasion de l’étoile de Trévor par la RPH, qu’Elizabeth a un prétexte pour entrer dans le conflit qui se dessinait depuis plusieurs décennies.

Pas de combats spatiaux dans ce roman, si ce n’est celui qui se passe à la fin de la guerre entre Havre et Manticore (dont à l’époque d’Honor Harrington) et qui est mené par l’amiral Havre-Blanc pour le compte de la reine Elizabeth.

Une préquelle indispensable au lecteur du cycle Honor Harrington, qui permet de comprendre comment Havre a lentement mais surement envahi d’autres systèmes stellaires et comment Manticore a préparé le choc inévitable avec Havre.

On s’attache au roi Roger dans ce roman, et quand on le perd on est heureux qu’Elizabeth prenne sa succession. Jonas Hadcock est certainement une des personnes les plus importantes sur l’évolution la FRM. On comprend mieux comment Gram a abouti à des développements technologiques importants qui feront basculer l’avantage en faveur de Manticore.

Pas d’Honor Harrington dans ce roman, car elle est l’aboutissement de ce qui va suivre. Par contre, quelle planification subtile écrite par David Weber ! On peut faire les mêmes reproches que les autres livres du cycle. C’est-à-dire des longueurs dans certains débats politiques ou stratégiques. Mais au final on se dit que cela renforce la cohérence du roman et de ses suites.

J’ai aimé ce livre autant que ses personnages, car j’avais envie de retrouver un univers qui m’était familier depuis plusieurs années. La partie guide de l’univers est plus à consulter plus qu’à lire. Celui qui aime ce cycle y trouvera son bonheur. À conseiller aux fans d’Honor Harrington.

La maison d’acier/Le guide de l’univers, David Weber, L’Atalante, 618 pages, 2013, illustrations de Thomas Marrone, Couverture de Genkis

La maison d'acier - David Weber

Les vandales du vide – Jack Vance

Le Belial inaugure une nouvelle collection de livres consacrés aux pulps de science-fiction. Le premier roman Les vandales du vide est écrit par Jack Vance, et traduit par Pierre-Paul Durastanti. Pour ajouter une note vintage à celui-ci, la couverture est dessinée par Caza, un illustrateur habitué depuis des décennies à mettre en valeur des scènes des romans de Jack Vance et d’autres auteurs. On ne pouvait pas mieux rêver.

Ce roman de science-fiction date de 1950. C’est un inédit de Jack Vance, mais pas nécessairement une œuvre de jeunesse, car à 34 ans, Vance avait déjà écrit d’autres histoires. Il correspond très bien à la science-fiction de l’époque, que d’autres auteurs ont aussi mise en valeur. En lisant ce roman, je n’ai pas pu m’empêcher de faire le parallèle avec des livres d’Isaac Asimov, Robert Heinlein, Arthur C. Clarke, voire même Filip K. Dick. Les romans de cet âge d’or seraient aujourd’hui considérés comme de la lecture pour la jeunesse. Mais n’avons-nous pas tous été jeunes, et n’avons-nous pas tous gardé un regard d’adolescent sur ce genre d’histoire ?

Dans cette histoire, on suit le jeune Dick Murdock, qui quitte Vénus pour rejoindre son père, l’astronome en chef de l’observatoire situé sur la Lune. Pendant le voyage, le vaisseau qui assure la liaison croise un cimetière d’astronefs. Les épaves sont le résultat d’une bande de pirates qui s’attaquent à la circulation spatiale dans cette partie du système solaire. Un avenir où les humains colonisent petit à petit le système solaire, mais n’ont pas les moyens d’assurer une protection militaire suffisante à chaque convoi. La piraterie a donc fait son apparition et perturbe la colonisation et l’exploitation du système solaire.

En regagnant la Lune, Dick découvre qu’au sein de la base il y a une taupe qui communique aux pirates des informations sur les passages des vaisseaux. Ce qui leur permet d’arraisonner et détruire ces vaisseaux. En voulant en apprendre plus, Dick se met en danger. Son père échappe de peu à la mort et d’étranges accidents surviennent sur la Lune. Dick découvre qu’un homme aux yeux jaune, le Basilic, dirige les vandales et tente de le tuer. Finalement, une science-fiction épique, qui renoue avec

À travers ce livre, on reconnaît difficilement le style de Jack Vance. Le côté flamboyant et baroque est absent, probablement parce que l’histoire se passe dans l’espace et sur la Lune. On trouve ici un Jack Vance qui se fond dans le moule de la science-fiction des années 50. Une science-fiction un peu plus naïve plus axée sur l’aventure, où la technologie est présente, mais pas nécessairement expliquée. C’est ce qui fait d’ailleurs tout le charme de ce genre d’histoire.

On est habitué à mieux de la part de Jack Vance. Par exemple le cycle de Tschaï, la geste des princes-démons, le cycle de la perle verte, ou l’univers baroque de Cugel l’astucieux.

Dans le cas présent, c’est bel et bien un inédit de Jack Vance qui est proposé par le Bélial. Une raison de plus de découvrir ce texte à travers la traduction qu’a faite Pierre-Paul Durastanti.

Je suis curieux de voir quels seront les prochains titres publiés dans cette collection. Il y a certainement quelques perles qui nous ont échappés et qui méritent de revoir le jour ou d’être traduites. Une chose est certaine, c’est une bonne initiative de la part du Bélial. J’espère simplement que ces livres auront également un équivalent poche dans les années qui suivent leur première parution en français.

Le pulp est à la mode. D’autres collections ont décidé de ressortir des romans peu connus ou totalement ignoré du public. C’est par exemple le cas avec Michael Crichton chez Laffont (La dernière tombe, Agent trouble). L’aventure, le polar, l’action, le mystère reviennent à l’avant-plan à travers des œuvres parfois de jeunesse. Et la science-fiction est le genre idéal pour faire découvrir ou redécouvrir des histoires et des auteurs qui ont forgé ce genre littéraire.

À lire, avec un certain recul, et surtout avec un esprit très ouvert, car ce livre remet au centre l’aventure, l’action, le mystère et le danger qui ont bercé notre imagination. J’ai aimé, et je vais certainement suivre cette collection de près.

Un livre de Jack Vance qui fait passer un bon moment de lecture.

Les vandales du vide, Jack Vance, Le Belial, 2016, traduction Pierre-Paul Durastanti, Illustration de Caza

Les Vandales

Le monde du fleuve – Philip José Farmer

Mnémos continue les rééditions sous forme d’intégrale des classiques de la science-fiction. Un de ces grands classiques n’est autre que Le monde du fleuve de Philip José Farmer. Livre ambitieux et original qui valut à son auteur le prix Hugo du meilleur roman en 1972. Cette intégrale contient :

  • Le monde du fleuve
  • Le bateau fabuleux
  • Le noir dessein
  • Le labyrinthe magique
  • Les dieux du fleuve

Commencé en 1971 et achevé en 1983, le monde du fleuve n’a fait son apparition en français qu’au début des années 80, dans la collection Ailleurs & Demains dirigée par Gérard Klein. C’était l’époque où les Laffont argentés représentaient ce qu’il y avait de mieux en science-fiction, c’est-à-dire qu’ils proposaient la qualité, l’originalité et un grand nombre de chefs-d’œuvre.

Si le Monde du fleuve m’avait captivé à l’époque, pour autant je n’avais pas enchaîné avec ses suites. Comme je savais que Farmer n’en resterait pas là, j’avais préféré attendre la sortie des cinq tomes pour me lancer dans une lecture complète du cycle.

Le monde du fleuve fait partie des livres-univers qui existent en science-fiction. Il se suffit à lui-même et plonge le lecteur dans des histoires qui tiennent autant de la science-fiction, de l’aventure, de l’histoire, de la science et ses techniques. Mais surtout, il met en valeur un grand nombre de personnages réels et imaginaires qui vont se croiser.

Farmer avait l’embarras du choix à partir du moment où il avait décidé de ressusciter tous les humains qui ont vécu sur Terre depuis l’aube des temps. C’est-à-dire 40 milliards de personnes qui renaissent le long d’un gigantesque fleuve long de trente deux millions de kilomètres. Au début de ce fleuve, il y a une tour géante qui abrite les Ethiques. Ce sont les extraterrestres qui ont conçu ce monde et son long fleuve, qui sont responsables de la réincarnation de toute l’humanité.

Curieusement, le premier tome de ce cycle n’est pas très épais. Il s’arrête à la page 155 de cette intégrale. Ce qui suffit à Farmer pour poser le décor, nous présenter les principaux personnages et nous mettre face à une énigme pour laquelle il faudra les quatre premiers tomes pour la résoudre. C’est davantage un livre d’aventure, un peu comme Jack Vance pouvait le faire avec le cycle de Tschaï. Sauf que Farmer a décidé de tourner son histoire en panoramique et technicolor, avec une distribution inégalée de personnages.

Si Richard Francis Burton et Sam Clemens (Mark Twain) sont les principaux personnages, on y trouve également Alice Liddell (Alice aux pays des merveilles), Jean sans Terre, Hélène de Troie, Cyrano de Bergerac, Mozart, Ulysse, Jésus Christ, Jack London, Hermann Goering, etc. La suite de personnages ne s’arrête pas là. Mais il y a aussi le journaliste Peter Jairus Frigate, qui n’est autre que Philip José Farmer transposé le long de ce fleuve (regardez les initiales communes).

Imaginez tous les hommes et les femmes qui ont vécu sur Terre, qui sont ressuscités dans des corps de 25 ans, dépourvus de pilosité. Ils sont nus et doivent tout réinventer et reconstruire. La seule aide dont ils disposent, ce sont ces sortes de grands champignons métalliques dans lesquels ils vont pouvoir prendre régulièrement des gamelles de nourritures. Mais certaines personnes n’ont pas droit à celles-ci et dépendent des autres personnes. La nourriture est d’ailleurs une source de conflit entre ressuscités, tout comme la découverte et l’exploitation des ressources sur les berges du long fleuve. De plus, les réincarnés ne parlent pas la même langue, n’ont pas les mêmes convictions, les mêmes habitudes, les mêmes modes de vie, ce qui génère des conflits et surtout des convoitises. Les gens qui meurent sont ressuscités quelque part ailleurs sur les rives du fleuve. D’autres ont moins de chance et deviennent esclaves ou tyrans. On le voit, le fleuve de l’éternité commence par un chaos monstrueux. Ceux qui arrivent à recréer un semblant d’humanité se lancent dans une quête gigantesque : remonter aux sources du fleuve et découvrir ce qui se cache dans la grande tour.

J’avoue qu’à l’époque où j’ai découvert ce cycle, je me suis intéressé aux voyages de Richard Francis Burton l’explorateur anglais qui remonta aux sources du Nil et découvrit avec John Hanning Speke les lacs Tanganyika et Victoria. Il s’est déguisé pour pouvoir entrer à la Mecque. On lui doit aussi la traduction des mille et une nuits. C’était aussi l’occasion de découvrir Mark Twain (de son vrai nom Sam Clemens) à qui on doit les aventures de Tom Sawyer et de Huckleberry Finn.

Le deuxième tome « Le bateau fabuleux » est plus axé sur Sam Clemens et son bateau à aube qui est censé remonter le fleuve. Le troisième tome « Le noir dessein » se focalise sur la construction d’un dirigeable et la remontée du fleuve. Avec le quatrième tome « Le labyrinthe magique », c’est l’énigme de cet étrange monde et son fleuve qui va être résolue. Un cinquième tome « Les dieux du fleuve » se passe dans la tour géante. Ce dernier tome n’est pas indispensable pour le lecteur, mais dévoile l’autre côté de ce monde.

On peut facilement imaginer que Mnémos n’en restera pas là avec Philip José Farmer, que le cycle des hommes-dieux (7 tomes) fera aussi l’objet d’une future intégrale (peut-être en deux tomes). Enfin, je l’espère.

Bon nombre de livres sortis dans la collection Ailleurs et Demains de Laffont, puis sortis en format de poche, méritent de renaitre sous une forme omnibus. J’ai toujours été favorable à ces intégrales, même si elles sont lourdes et encombrantes (ce qui est le cas pour le monde du fleuve). C’est certain que vous n’allez pas emporter le livre dans le métro ou le train pour le lire pendant le trajet. Mais l’amateur qui a déjà lu le cycle dans une version précédente (et plus légère) aimera probablement avoir dans sa bibliothèque une version définitive. Le monde du fleuve a pratiquement la même taille et le même poids qu’un Larousse ou un Petit Robert.

Pour rappel, ce cycle avait fait l’objet d’une version Omnibus dans la défunte collection « Bibliothèque » de Laffont. Seuls trois cycles avaient été repris dans cette collection : Dune, Hypérion, Le monde du Fleuve, trois chefs-d’œuvre de la science-fiction.

Avant que le lecteur soit délivré d’un tel pavé, il faudra lire les 1272 pages qui le composent. Impossible de résumer un livre pareil tellement il foisonne d’idées, d’histoires, de personnages. Ce n’est qu’en refermant ce livre, qu’on se rend compte que Philip José Farmer avait vraiment beaucoup d’imagination et qu’il a écrit un chef-d’œuvre de la science-fiction qui mérite amplement le prix Hugo décerné. C’est un peu long, mais excellent et un vrai régal pour ceux qui aiment la science-fiction et l’aventure. Et pour l’occasion, je ne vous cache pas que j’ai adoré et que je le conseille à tout le monde.

Ouf, la chronique est enfin terminée ! En fait, j’avais envie de faire comme Philip José Farmer, écrire une grande chronique pour une grande intégrale.

Le monde du fleuve, Philip José Farmer, Mnémos, 2016, 1272 pages, illustration de Jorge Jacinto, traduit par Guy Abadia, Charles Canet, Bernard Weigel

Le monde du Fleuve - Philip José Farmer

La forêt de cristal – J.G. Ballard

J’avais lu précédemment La forêt de Cristal édité par Denoël Lunes d’Encre, et j’étais resté mitigé, car J.G. Ballard ne fait pas partie de mes auteurs préférés. J’ai donc décidé de donner une seconde chance à ce roman en relisant la version poche qui vient de sortir chez Folio SF.

Je n’avais jamais lu Ballard auparavant, si ce n’est son livre « Empire du soleil ». J’ai donc décidé de lire cette réédition qui bénéficie d’une retraduction.

L’histoire se passe dans les années 50-60 en Afrique. Ma première réaction a été de faire un parallèle avec Tintin au Congo ou avec le film The african queen à cause de la première image que montre Ballard. Dans une Afrique post-coloniale, le docteur Edward Sanders arrive à Port Matarre et doit se rendre à Mont Royal pour s’occuper d’une léproserie et par extension retrouver sa maitresse qui est la femme de son collaborateur. Ballard crée une ambiance sombre et mystérieuse qui deviendra plus tard belle et dangereuse. C’est très bien écrit, le rythme est lent et l’atmosphère mélancolique, voir un peu envoutante. Il arrive très bien à nous plonger dans l’ambiance de ces vieux films d’aventure où le héros va simplement d’un endroit à un autre, mais à qui on devine parfaitement qu’il arrivera des choses. Sanders dans son voyage est entourée d’une jolie journaliste qui ne le laisse pas insensible, d’un architecte un peu dérangé qui veut retrouver sa femme, d’un prêtre jésuite et d’un médecin militaire, sans parler d’hommes à la mine patibulaire qui sont prêts à tuer…

Mais pourquoi ? Les clichés du vieux film avec Humphrey Bogart sont pleinement utilisés par Ballard. Le docteur Sanders va devoir se rendre à Mont Royal par le fleuve car c’est impossible de s’y rendre par la route. Il est confronté à cette forêt sombre le jour et lumineuse la nuit, dans laquelle la nature, les animaux et les humains qui s’y attardent sont cristallisés.

On se rend vite compte que Sanders est un médecin qui ne soigne pas mais dont le passe-temps favori est de se balader dans cette étrange forêt de cristal. Quand il arrive enfin à Port Royal, on devine qu’il est fasciné par cette forêt et que finalement toute l’intrigue de l’histoire se résume à ça. En dehors du fait qu’on découvre que c’est une fuite temporelle qui est à l’origine du phénomène, l’aspect scientifique a complètement été effacé, tout comme aucune solution n’est donnée pour se débarrasser de cet étrange phénomène. On apprend que cette étrange forêt n’est pas la seule sur Terre.

En fait Ballard a préféré se focaliser sur la psychologie de ses personnages et leur fascination pour une mort belle et froide plutôt que sur l’action. Peut-être que ce livre aurait dû s’appeler L’appel de la forêt de cristal. Le titre aurait été plus judicieux.

J’ai lu « Empire du soleil » de J.G. Ballard, son roman autobiographique, qui se passe à Shanghai alors qu’il avait onze ans pendant la guerre sino-japonaise. Ce roman m’a davantage plus que cette forêt de cristal qui me laisse un peu sur ma faim. Cette seconde lecture me confirme que Ballard est un auteur à découvrir.

Je dois reconnaitre que ce livre est bien écrit et plaira certainement à des lecteurs plus en phase avec la transfiction, et le new wave.

La forêt de cristal – James Ballard, Folio SF, 254 pages, 2015

La foret de cristal

Les chroniques de la science-fiction – Guy Haley

Cela fait déjà un moment qu’une encyclopédie consacrée à la science-fiction n’avait plus vu le jour. Si le projet était à l’étude chez certains éditeurs, sa réalisation n’a toujours pas vu le jour. C’est bien dommage pour ceux qui espèrent une nouvelle version du science-fictionnaire qui date de 1994.

Le « pavé » que nous propose Guy Haley est censé combler en partie cette lacune. Stephen Baxter n’a écrit que l’avant-propos du livre. Le livre commence en 1818 et se termine en 2009. Inutile de chercher des séries comme millénium Sanctuary ou Supergirl. C’est trop récent.

Pas d’Harry Potter dans ce livre, mais une page dédiée à H.P. Lovecraft. Sous le terme science-fiction, on trouve tout de même un peu de fantastique, mais pas de fantasy.

Par exemple, Arthur C. Clarke, Isaac Asimov et Robert Heinlein sont mentionnés comme les trois grands de la science-fiction pour les années 40. Une page leur est consacrée. Si le lecteur veut en savoir plus sur chacun d’eux, il les trouvera sur des pages dédiées à leurs cycles et livres. Reste plus au lecteur qu’à situer la décennie dans laquelle le livre a été écrit pour faire une recherche visuelle. Sinon, il y a ce bon vieil index à la fin du livre qui renvoie vers l’information recherchée.

Par exemple, le cycle Dune (pages 232 à 237) reprend la chronologie dans un tableau où les couleurs indiquent si c’est un livre, un jeu, un film, une série TV. Un autre tableau détaille les événements importants du cycle et les personnages qui y sont associés. Et comme c’est aussi un film, on a droit à une double page de photos. Visuellement, ce livre est très pratique.

C’est davantage un guide visuel de la science-fiction, axé sur les supports cinéma et TV. Bien sûr, les livres ont la part belle dans ce guide. Les vues synthétiques par auteur ou par cycle sont un plus non négligeable à la lecture.

Mais ce livre est loin d’être exhaustif. Il est épais et lourd. Bonjour les poignets pendant la lecture. Donc, pas facile à manipuler. Son principal défaut en dehors du poids, c’est le choix des polices de caractères trop petites. Chaque article est écrit dans une police qui paraitra normale sur l’écran d’un smartphone, mais qui est trop petite pour un livre papier. Les légendes des photos nécessitent une loupe.

Le livre fait la part belle à la production anglo-saxonne. Inutile de chercher Bordage, Genefort ou Dunyach. Par contre, on y trouve Valerian et Laureline de Christin et Mézières, mais pas Blake et Mortimer ou Les naufragés du temps de Forest et Gillon ! Un lecteur anglo-saxon se contentera de ce livre alors qu’un lecteur européen en attendra davantage.

Les 35 euros du livre peuvent en dissuader plus d’un, surtout par rapport à la version anglaise qui coute 25 dollars. Mais ce genre de livre est trop rare que pour le laisser passer. Donc, l’amateur de science-fiction que je suis le conseil, en espérant que du côté francophone on pense à faire quelque chose de similaire.

Les chroniques de la science-fiction, Gut Haley, édition Muttpop, 576 pages, 2015, traduction de par Marie Renier et Inès Lecigne, couverture de Gualtiero Boffi/Alamy.

Les chroniques de la science-fiction

Game of thrones décrypté – Antoine Lucciardi

Parmi une kyrielle de livres, qui est sorti sur Game of thrones, en voici un qui vaut le détour. Écrit par Antoine Lucciardi et édité par Cithy éditions, ce livre nous propose de revisiter les quatre premières saisons du trône de fer, et aussi quelques éléments de la saison cinq. En un peu moins de 280 pages, tous les personnages de la saga sont passés au crible, détaillé, commenter, analysés par l’auteur qui ne se contente pas de nous répéter ce que nous savons déjà.

Ce n’est pas un beau livre comme on pourrait s’y attendre, plutôt un grand format classique. Un ouvrage de référence, qu’on tient sous la main pour ne pas se perdre dans la multitude de personnages de la série. Un chapitre est entièrement consacré aux différents lieux où se situe l’action. Dommage de ne pas voir de cartes dans ce livre.

L’auteur aborde le cycle à travers notre propre histoire, en faisant référence à la guerre des deux roses (fin du XVème siècle), à la guerre de Cent Ans qui ont servi de référence à G.R.R Martin. Une des œuvres les plus connues est « Les rois maudits » de Maurice Druon. Un chapitre traite du pouvoir, des femmes et du sexe. Une large part du livre est consacré aux influences littéraires qui ont conduit G.R.R. Martin à écrire Game of thrones. Le chapitre sur les coulisses de la série m’a moins emballé, sans doute parce que j’aurais préféré qu’on parle des livres plutôt que la série TV. Un résumé des quatre premières saisons est présent dans ce livre, ainsi qu’une série de répliques cultes et un index des personnages.

Ce livre n’est pas parfait. Je retiens deux défauts principaux. L’absence de photos couleur, qui donne l’impression d’avoir dans les mains des copies d’écrans en noir et blanc. Il y a aussi le fait que ce livre est axé sur la série télé, plus que sur les livres de G.R.R. Martin. Cela me donne un sentiment de livre inachevé, incomplet. Le trône de fer, c’est d’abord une suite de romans. Même si la série est excellente, les romans sont la bases de l’histoire. J’ajouterai que j’aurais bien aimé voir des cartes des différentes régions de Westeros.

Un livre abordable, facile à lire, qui contentera ceux veulent approfondir le sujet.

Game of throne décrypté, Antoine Lucciardi, Edition City, 2015, 288 pages

Game of thrones decrypté

Les conquérants de l’univers – Richard-Bessière & Raoul Giordan

Tirée d’un roman de F. Richard-Bessière (pseudonyme de François Richard et Henri Bessière), cette adaptation en bande dessinée mérite le détour. Elle était initialement sortie dans la collection Sidéral en 1968. Dessinée par Raoul Giordan, cette adaptation du roman du même nom paru en 1951 est assez fidèle.

Les conquérants de l’univers était le premier livre de la collection fusée au Fleuve Noir. Il a quatre suites, toutes éditées dans la même collection. Plus tard, Aredit a commencé sa collection Sidéral par ce cycle de science-fiction.

Cette BD m’a fait découvrir Richard-Bessière. J’avais 10 ans, et j’achetais régulièrement Sidéral. Plus récemment, le cycle en romans a été réédité au format omnibus chez Eons. Un seul livre contient les cinq romans et est sorti en 2006. Plutôt que de rechercher les cinq livres originaux, j’ai préféré acheter cet omnibus qui contient :

1 — Les Conquérants de l’univers
2 — À l’assaut du ciel
3 — Retour du Météore
4 — Planète vagabonde
5 — Sauvetage sidéral

C’est donc avec un certain plaisir que je vois cette réédition BD en grand format chez Ananké. Plaisir de retrouver une histoire que j’avais presque oubliée, car lue pendant mon enfance. Surtout de retrouver les dessins de Raoul Giordan. Le dessinateur a un style très caractéristique qui se marie très bien avec le noir et blanc de l’époque. Ses mondes, ses cités, ses extraterrestres correspondent à une science-fiction qui peut paraitre naïve aujourd’hui, mais qui avait son charme à l’époque. Les fusées se posent debout sur leurs ailerons. Les cités mélangent l’acier et le verre, et sont séparées par de grandes esplanades. Les extraterrestres sont fréquemment humanoïdes. Giordan a un gout prononcé pour les femmes aux belles formes, correspondant aux standards de l’époque. Dommage qu’elles n’avaient pas un plus grand rôle dans chaque histoire. Dans les conquérants de l’univers, c’est Mabel, membre de l’équipage qui apporte une touche de féminité (ce qui n’est pas le cas dans la série Météor du même dessinateur).

lcdu

J’avoue que je n’ai pas lu grand-chose d’autre de Richard-Bessière. À l’époque, je préférais lire un Jimmy Guieu, un André Caroff ou le cycle Perry Rhodan, tous trois aussi au Fleuve Noir. Je me suis davantage tourné vers les adaptations BD tirées des romans Richard-Bessière. Donc, cela reste un auteur à découvrir lors de réédition en omnibus.

L’histoire de ce premier tome des conquérants de l’univers est assez simple. Le professeur Bénac a mis au point un vaisseau spatial, le Météore. À son bord, il compte explorer le système solaire. Trois personnes sont censées l’accompagner : Jeff Dickson le journaliste, Richard Beaumond son filleul, et Mabel Peterson qui l’a convaincu qu’une femme devait faire partie du voyage. Lors du décollage, Ficelle, le mécanicien du professeur, va se retrouver enfermé sur le vaisseau en même temps que Don Alfonso, un ingénieur aux intentions pas très nettes. Le voyage commence avec une halte sur Deimos, un des satellites de la planète Mars, avant de prendre la direction de Mars. Mais le Météore accélère soudain vers la planète rouge. L’équipage découvre rapidement que le vaisseau est contrôlé à distance par les Martiens. Le professeur Bénac et son équipage vont faire la connaissance des Martiens et découvrir que ceux-ci sont incapables de quitter leur planète. Il va résoudre scientifiquement ce problème, et repartir pour continuer son périple.

Ce premier tome ne va pas plus loin. Cela peut paraitre totalement dépassé comme science-fiction, mais ça se laisse lire malgré les incohérences par rapport à nos connaissances actuelles en astronomie. Il faut donc lire cette BD avec l’esprit de l’époque, sans se focaliser sur l’aspect technique. C’est de la science-fiction d’un autre âge.

Je voudrais attirer l’attention sur cette nouvelle édition, car deux grands illustrateurs et dessinateurs en font partie. Giordan qui a dessiné l’histoire de Richard-Bessière, et surtout Brantonne qui signe la couverture. Ce dernier a d’ailleurs signé la plupart des couvertures de la collection fusée chez Fleuve Noir. La couverture de cette BD correspond bel et bien à celle du roman de 1951. C’est un petit détail que j’apprécie beaucoup en tant qu’amateur de science-fiction.

J’ai une seule critique à formuler concernant cette BD, c’est son prix vraiment dissuasif. En 1968, la version Sidéral coutait deux francs français. Aujourd’hui, presque un demi-siècle plus tard, elle dépasse les quarante euros. C’est indécent, même pour un tirage limité à 230 exemplaires. Apparemment, l’éditeur est habitué à pratiquer de tels tarifs avec ses autres cycles.

En dehors de cela, j’espère qu’Ananké continuera de réédité les Sidéral, mais pourquoi pas tous les Giordan ? Le cycle Météor dessiné aussi par Giordan sort à intervalle irrégulier chez le même éditeur. J’espère qu’il sera plus régulier pour les conquérants de l’univers.

BD clairement pour amateur de science-fiction et nostalgique d’une époque où l’aventure prenait le dessus sur la véracité scientifique. Histoire d’un autre temps, qui peut faire sourire aujourd’hui, mais quelle belle imagination de la part de Richard-Bessière, et quel très beau trait de crayon de Raoul Giordan. Un classique de la science-fiction ressuscité.

Les conquérants de l’univers, F. Richard-Bessière & Raoul Giordan, Editions Ananké, 2014, 108 pages, illustration de Brantonne

Les conquérant de l'univers

Dune – Frank Herbert (collector 50ème anniversaire)

Cette année, les Anglo-saxons se sont rappelés que Dune le chef-d’œuvre de Frank Herbert a 50 ans. Le livre refait son apparition chez Folio Society dans une version pour collectionneur, dans un coffret qui résistera au temps, et sous la forme d’un livre qui n’a pas son équivalent dans les précédentes versions (comme je les collectionne tous…). Il a le poids et la taille d’un dictionnaire.

Les amateurs pourraient être refroidis par le prix de cette version, 75 livres sterling (plus de 100 euros), auxquels il faut encore ajouter les frais de port. Mais quand on aime, on ne compte pas. C’est ce que j’ai fait pour Dune qui est mon livre de chevet. C’est un tirage limité, pour lequel il faut prendre contact avec l’éditeur pour le commander.

Dune-50y-5

Le livre est agrémenté d’illustrations de Sam Weber. Celles-ci ajoutent une note sombre, qui dramatise encore plus l’histoire de Frank Herbert. Mais elles correspondent exactement à l’image que se font les lecteurs lors de la lecture du livre.

Les trois parties d’origines sont incluses dans ce collector, c’est-à-dire : Dune, Muad’Dib, et Le Prophète. On ne trouvera pas la quatrième Le Messie de Dune, qui fait partie de la version française parue chez Laffont Ailleurs & Demain.

Après l’introduction de Michael Dirda, le roman s’étale sur 500 pages sur un papier épais dont les pages sont agréables à tourner. Plusieurs appendices font suite à l’histoire. Le premier concerne l’écologie de Dune, le second la religion de Dune, le troisième concerne les objectifs du Bene Gesserit, un quatrième est un extrait de l’almanach En-Ashraf qui présente les principaux personnages. Une terminologie de l’imperium vient également s’ajouter à ces appendices. Et le livre se termine sur une postface de Brian Herbert. Je ne vous cache pas que ce livre est pour amateur averti et collectionneur et est en nombre limité.

Je me pose juste une question : est-ce que Laffont Ailleurs & Demain sortira une version collector du livre en français ? Et de préférence avec la quatrième partie. Je n’en sais rien. Un collector a été fait pour Le seigneur des anneaux. Je ne vois pas pourquoi il n’en serait pas de même pour Dune, qui est tout de même l’équivalent en science-fiction du livre de J.R.R.Tolkien.

S’il devait voir le jour en français, je serais probablement un des premiers à l’acheter. Pour l’anecdote, j’avais été chez un relieur avec la version Laffont du livre, en demandant ce que couterait de transformer celui-ci en équivalent Pléiade. C’était faisable, mais le prix et l’effort à fournir m’ont dissuadé.

Dune-50y-2

Concernant l’histoire que raconte le livre, j’invite les lecteurs à lire ma chronique sur Phénix Mag ou sur mon blog. 

Voir : https://marcfvb.wordpress.com/2011/02/28/dune-frank-herbert/

Si j’ai un reproche à faire à ce livre en dehors de son prix, c’est qu’il aurait pu contenir un signet comme c’est le cas des Pléiades. Peut-être aussi faire une suggestion : inclure la quatrième partie : Le messie de Dune. Mais comme celle-ci n’était pas présente dans la version originale de 1965, on ne peut pas dire que c’est un oubli de la part de l’éditeur.

Reste que pour ceux qui aiment lire en anglais, ou qui sont fans de l’univers de Frank Herbert, ce Dune est le classique à avoir dans sa bibliothèque.

Dune, Frank Herbert, Folio Society, 553 pages, 2015, illustrations de Sam Weber.

Dune-50y9

High-Opp – Frank Herbert

Roman inédit de Frank Herbert, High-Opp apparait comme une surprise dans le paysage de la science-fiction. Dans la collection Ailleurs & Demain qui a publié la plupart des livres de l’auteur, ce roman annonce les prémisses de ce que sera le bureau des sabotages ou le cycle de Dune. Le livre n’en a ni l’ampleur ni la complexité, mais on y trouve des éléments révélateurs de ce que Frank Herbert écrira plus tard.

Était-ce une bonne idée de sortir ce roman probablement un demi-siècle après sa création ? Peut-être. Pour un ethnologue de la science-fiction, certainement. Pour un lecteur d’aujourd’hui, le livre n’aura aucun impact sur ses choix littéraires. En tant qu’amateur de l’œuvre de Frank Herbert, je pense qu’il aurait été plus judicieux de directement publier ce livre en format de poche, et pas en grand format comme c’est présentement le cas.

L’histoire est relativement simple. Daniel Movius, un liaitor (médiateur), va perdre son job, car sa petite amie est convoitée par un membre du gouvernement. On retrouve le schéma classique du héros qui perd tout ce qu’il aime dès le début, et qui part à la reconquête du pouvoir, mais pas de sa bienaimée.

Dans ce futur, la Terre possède un gouvernement mondial, où chaque ministre ne pense qu’à une chose : supprimer les autres pour prendre leurs places. Le personnage principal étant la cible désignée de toutes les personnes qu’il croisera. Les uns veulent sa mort parce qu’il est doué pour organiser un mouvement séparatiste, les autres veulent l’éliminer, car il est trop proche du pouvoir, sans parler du beau-père espion qui veut le tuer, car il a mis sa fille enceinte. A chaque chapitre, on assiste à des scènes où les différents intervenants ne pensent qu’à buter Danel Movius. Au début, c’est intéressant, plus tard cela devient comique. Tout cela entrecoupé de surprises qui n’en sont pas vraiment. Le plus intéressant, ce sont les joutes verbales entre le héros et ses détracteurs.

Le roman fait référence à des machines à écrire, à des messagers, à des technologies dépassées par rapport à notre époque. Les satellites, Internet, les PC, les smartphones sont totalement inconnus dans ce roman. Il faut donc lire le livre en tenant compte du contexte dans lequel il a été écrit, c’est-à-dire les années 50-60. Le héros n’est pas particulièrement attachant, mais en tant que lecteur on est de son côté. Les autres personnages ne sont pas mieux.

A retenir, la postface de Gérard Klein qui apporte comme d’habitude un avis éclairé.

On reconnait l’empreinte de Frank Herbert dans ce livre, mais on est à des années-lumière de Dune. Je dirai donc que c’est un livre à découvrir pour les inconditionnels de l’auteur, mais dispensable pour les autres.

High-Opp, Frank Herbert, Ailleurs & Demain, 242 pages, 2014, traduit par Patrick Dusoulier, illustration de Mehau Kulyk

Frank Herbert - High-Opp