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D’encre et de sang – Renaud et Gihef

D’encre et de sang, de Gihef et Renaud est une bande dessinée en deux tomes qui se passe à Bruxelles à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cette BD est éditée par Sandawe en crowdfunding. Le deuxième tome est sorti en février 2016.

Le hasard fait que j’étais en train d’écrire un court roman qui se passe en partie à la même époque à Bruxelles. J’avais fait des recherches sur l’occupation allemande à Bruxelles pendant les quelques jours qui précédaient la libération de la ville. Et Ô miracle, voilà que cette BD aborde en partie le sujet. Elle m’a aidé à visualiser les lieux et scènes de mon propre roman. Si j’ai grandi et j’habite Bruxelles, je ne sais pas toujours à quoi ressemblait la ville pendant la Seconde Guerre mondiale.

J’ai découvert le premier tome grâce au site Sandawe, et je l’ai pratiquement lu d’une traite avant de devenir edinaute pour le second tome. Ma patience est récompensée avec la sortie de la seconde et dernière partie de l’histoire.

D'encre et de sang T1

C’était impossible de chroniquer le tome 2 sans faire référence au tome 1. J’ai donc décidé de chroniquer l’histoire complète.

Katja Schneider, jeune journaliste d’investigation autrichienne, arrive à Bruxelles en septembre 1944. Elle est recommandée par Berlin pour rejoindre l’équipe rédactionnelle du journal Le Soir. À l’époque, le journal servait de propagande à l’occupant allemand.

Depuis que son fiancé est emprisonné par les nazis en Autriche, Katja a rejoint la résistance. Elle découvre que son fiancé est peut-être vivant et prisonnier dans un camp. Pour le compte de la résistance belge, elle doit aussi retrouver Léon Degrelle, collaborateur et instigateur d’un mouvement d’extrême droite. La résistance veut éliminer l’homme avant que les forces de libération n’arrivent dans le pays.

Officiellement, Katja enquête sur une série de meurtres de jeunes femmes juives. Leurs corps sont mutilés et découpés. Ses investigations la mettent en danger, soit parce que ses questions sont trop ciblées sur Léon Degrelle, soit parce qu’elle éveille des jalousies au sein des Allemands. Découvrir le coupable des meurtres met sa vie en péril

Ambiance feutrée, intrigues multiples, très beaux dessins qui montrent le Bruxelles de l’époque, cette bande dessinée à nécessité pas mal de recherches historiques. Il faut ajouter à cela une héroïne plutôt jolie, qui n’a pas peur de se mettre dans l’embarras. C’est un thriller pendant la Seconde Guerre mondiale.

Les dessins de Renaud sont splendides tandis que le scénario de Gihef est travaillé et donne envie de lire cette bande dessinée jusqu’au bout. Vraiment une excellente BD.

Journal Le Soir

Très peu de BD abordent le problème de l’occupation en Belgique, et à Bruxelles en particulier. Il y a bien sûr D’encre et de sang en deux tomes, mais il y a aussi Ars Magna en trois tomes d’Alcante et Jovanovic. C’est une bonne chose, car on avait l’impression que l’occupation n’existait qu’en France, et que les pays voisins étaient épargnés par les Allemands. Il n’en est rien. Il faut savoir qu’à Bruxelles pendant la guerre, un millier de personnes a été tué par l’occupant. Il existe des témoignages de cette période triste de notre histoire.

Renaud et Gihef ont décidé d’aborder des thèmes sérieux comme l’assassinat de femmes juives, mais aussi comme la traque de Léon Degrelle. Ils reviennent sur la publication du faux soir (le soir volé) avec un dossier qui clôt le premier tome. On le voit, un long travail de recherche a été effectué pour cette bande dessinée. L’intrigue de départ cache d’autres fils conducteurs, qui mèneront Katja Schneider, la jeune journaliste, dans des méandres sombres de l’occupation à Bruxelles.

Je pense que cette BD ouvre une voie inexploitée par les scénaristes et dessinateurs de BD, et qu’elle vaut la peine d’être approfondie à travers d’autres faits historiques dans lesquels des personnages fictifs vont évoluer. J’espère que ce sera le cas. On peut remercier Sandawe d’avoir cru dans ce projet. Mais ce serait bien que les éditeurs traditionnels s’intéressent aussi au genre.

J’ai juste une remarque à faire concernant la page 17 du tome 2. À mon avis, il manque un phylactère qui fait référence à la scène d’introduction du premier tome, question d’expliquer aux lecteurs que les changements vestimentaires de Katja Schneider entre les pages 16, 17 et 18. En dehors de ce petit détail, la BD est excellente.

C’est une bonne BD, qui ne laisse pas indifférent le lecteur que je suis. J’ai un gout de trop peu, car j’aurais aimé trouver à la fin du tome 2 un second dossier sur les dernières heures de l’occupation à Bruxelles. Je sais, j’en demande un peu trop, mais c’est parce que j’ai vraiment apprécié cette bande dessinée.

D’encre et de sang, Renaud et Gihef, édition Sandawe, 48 pages (tome 1, 2014), 48 pages (tome 2, 2016)

 d'encre et de sang T2

Centaurus : Terre promise – Léo, Rodolphe, Janjetov

Cycle de science-fiction paru chez Delcourt, Centaurus annonce une histoire intéressante à plus d’un titre. Léo, Rodolphe et Janjetov nous emmènent dans un vaisseau-monde qui fait route vers Alpha du Centaure. À son bord, 9800 passagers qui ont quitté la Terre. Quatre siècles plus tard, leurs descendants arrivent enfin à proximité d’une planète habitable dans ce système.

Si l’histoire est classique en science-fiction, elle est amenée de manière originale par ses concepteurs. D’abord à travers deux jumelles, June et Joy, dont une des deux est aveugle. La particularité de celle-ci, c’est qu’elle arrive à voir lorsque sa sœur est à proximité, et qu’elle fait des dessins qui ressemblent étrangement à des lieux correspondant à la planète que les colons vont explorer.

Après quatre siècles de voyage, le vaisseau-monde commence à manquer de ressources. De plus, il y a des équipements qui nécessitent d’être remplacé ou abandonné. La seule solution c’est de coloniser la planète qui se présente. Le gros problème, c’est qu’on y détecte des traces de civilisation, et que les animaux  sont des dinosaures. Il faut donc monter une expédition, et espérer rencontrer les habitants de ce monde.

Reste un autre mystère. Pendant ce long voyage, un intrus s’est glissé dans le vaisseau-monde. Une inspection de la coque à révéler qu’un sas a été soudé de l’intérieur, une vingtaine d’années plus tôt.

Centaurus 2

L’histoire est bien développée, et plusieurs intrigues captent l’attention du lecteur et amateur de SF que je suis. Il ne m’en faut pas plus pour attendre la suite.

Si je reconnais bien là le genre d’univers que Léo à l’habitude de proposer, il n’en reste pas moins que cette complicité avec Rodolphe et Janjetov est excellente. On peut facilement imaginer que cette histoire va prendre quatre ou cinq tomes en bande dessinée, et autant d’années de patience. La qualité du dessin est au rendez-vous. Janjetov nous montre un vaisseau-monde en détail, mieux qu’on ne pourrait l’imaginer. Il en est de même pour le scénario de Léo et Rodolphe qui est excellent. Les personnages sont intéressants, à la forte personnalité. On les découvre au fil des pages de ce premier tome.

Cette BD est accompagnée d’un ex-libris représentant June et Joy. À coup sûr, un cycle que je vais suivre jusqu’au bout. À conseiller. Mais il faudra patienter pour connaitre la suite de cette histoire.

Centaurus : T.1 Terre promise, Léo & Rodolphe & Janjetov, 48 pages, Delcourt, 2015

Centaurus

Betelgeuse, l’intégrale – Léo

Dargaud a récemment réédité l’intégrale de Betelgeuse de Léo. Le cycle de cinq BD n’était plus disponible en intégrale. Et les quelques-unes qui étaient proposées sur le Web étaient vendues à des prix dissuasifs. Heureusement, Dargaud a réédité le cycle. On a donc les 5 BD suivantes dans cette intégrale :

  1. La planète
  2. Les survivants
  3. L’expédition
  4. Les cavernes
  5. L’autre

On retrouve Kim Keller, l’héroïne principale du cycle Aldebaran. Cette dernière revient sur Aldebaran-4, après avoir visité la Terre. Entretemps, elle s’est séparée de Marc Sorensen, qui a décidé de devenir pilote.

Encore une fois, Léo nous émerveille par ces splendides paysages extraterrestres. Il fait tout simplement rêver le lecteur. Comme précédemment, il crée une faune originale, où ce qui parait beau peut parfois être très dangereux. Le danger est pratiquement présent en permanence dans cette nouvelle entreprise. Aventure qui parait limpide au début, mais qui rapidement s’avère plus mystérieuse qu’on ne le pense. L’intrigue de départ tourne autour d’un vaisseau de colons, dont une bonne partie de l’équipage est morte et l’autre partie a survécu en descendant sur la planète Betelgeuse-6.

Avec ses 24 ans, Kim Keller peut paraitre trop jeune et sans expérience par rapport à la mission qui lui est confiée par son amie Alexa Komarova. Le vaisseau Konstantin Tsiolkowsky ne donne plus signe de vie depuis six ans, et se trouve en orbite autour de Betelgeuse-6 la sixième planète du système de Betelgeuse. La mantrisse d’Aldebaran dirige de curieuses antennes vers Betelgeuse.

À bord d’un nouveau vaisseau, une nouvelle expédition est chargée de retrouver les colons. Mais lorsque celle-ci retrouve le Konstantin Tsiolkowsky, un mystérieux virus informatique perturbe le vaisseau de Kim. Ce qui force l’équipage à descendre sur la planète Betelgeuse-6. Au passage, il récupère deux survivants qui étaient encore sur le vaisseau des colons, et qui venaient récemment de se réveiller de leurs caissons d’hibernation.

Lorsque Kim Keller arrive sur Betelgeuse-6, elle a difficile à se faire respecter par les deux factions qui se sont formées après les incidents du vaisseau de colons. Elle découvre un embryon de société diriger par des militaires, qui imposent aux femmes de procréer chaque année. Kim propose aux deux parties de monter une expédition qui permettra d’en apprendre plus sur les Iums, sorte d‘animaux intelligents qui ont développé une certaine hostilité depuis qu’un humain a tiré sur eux.

Voilà l’histoire lancée. L’aventure parsemée de drame, va permettre à Kim de découvrir l’existence d’autres mantrisses, et même de rencontrer un extraterrestre qui étudie les humains. Kim sortira de cette aventure avec plus de maturité. On pourrait penser que ce cycle est plus faible que le premier. En fait, il n’en est rien. Le lecteur d’Aldebaran est moins surpris par la suite des événements qui se déroulent dans Betelgeuse. Mais l’histoire reste très originale. Et les différents caractères créés par Léo, combinés à de nouvelles révélations sur les mantrisses, font de ce cycle une suite à la hauteur d’Aldebaran.

Ceux qui ont aimé le premier cycle liront naturellement ce second cycle. Il peut se lire de manière indépendante, sans avoir lu Aldebaran. Mais c’est préférable de commencer Aldebaran, car dès qu’on parle de la mantrisse, on se réfère nécessairement au premier cycle. C’est d’ailleurs un élément principal de l’histoire.

Les histoires écrites et dessinées par Léo sont fréquemment en cinq parties. Canevas idéal pour une histoire bien développée, qui convient parfaitement aux intégrales. Encore une fois, Léo fait un travail extraordinaire autant dans son scénario que dans ses dessins. C’est de l’aventure et de la science-fiction à l’état pur. Vraiment excellent.

Betelgeuse l’intégrale, Léo, Dargaud 2011