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Les enfers virtuels – Iain M. Banks

Précédemment sorti en deux tomes chez Laffont Ailleurs & Demains, ce livre appartenant au cycle Culture de Iain M. Banks est enfin disponible en poche. Et quel livre de poche ! Plus de 850 pages pour une histoire qui nous plonge dans un univers bien familier pour les amateurs du cycle. On a droit ici à une excellente traduction de Patrick Dusoulier et à une couverture de Lauren Panepinto.

Je n’ai eu aucun problème à rentrer dans cette histoire. Une fois découverts les quelques personnages principaux, l’univers de la Culture est tout à fait familier. Les mentaux y jouent une place importante, comme d’habitude. La seule vraie nouveauté, c’est l’apparition des enfers virtuels, qui sont finalement des réalités virtuelles dans lesquelles les morts ont encore une existence. Mais quelle existence ? Un enfer, un vrai enfer, qu’ils revivent souvent. En matière de torture intellectuelle, on atteint un sommet dans les civilisations proches de la Culture.

Le personnage principal de cette histoire est Lededje, qui est une intaillée (tatouée dehors et dedans), qui est devenue esclave sexuelle de l’homme le plus riche de Sichulte. Sa mort dès le début de l’histoire devrait nous plonger dans l’embarras. Eh bien non ! Banks nous montre ce que la Culture est capable de faire, et Lededje sera reventée à bord d’un vaisseau. Pour l’amateur de la Culture que je suis, je ne pouvais pas mieux demander.

Tous les personnages de l’histoire ne sont pas indispensables. Par exemple Prin et Chay. Cette dernière en particulier. Ils vont vivre l’enfer dans toute sa splendeur. Ils souffriront, en quête d’une porte de sortie dans chaque enfer, mais ils tomberont sur un autre enfer. Ils seront la proie des démons. À travers Chay, on va vivre cet enfer perpétuel de manière plus explicite. Au-delà de la souffrance, c’est aussi l’espoir de mettre un terme à celle-ci qui prédomine chez elle. Et Chay va passer de proie à prédateur. Elle libérera les âmes à travers sa propre faim et sa propre souffrance. C’est beau et c’est horrible. Les chapitres qui sont consacrés à Chay n’apportent rien à l’histoire principale, et n’ont pour but que de nous faire vivre les enfers à travers les yeux de deux personnages. J’aurais envie de dire que Banks aurait pu garder ces chapitres pour nous faire un vrai livre d’horreur. Mais bon, ne gâchons pas notre plaisir, cela reste excellent.

En parallèle à Lededje, on suit aussi Yime, agent de la Culture, qui ne sait pas qu’elle fait partie de Contact Spécial. Elle est chargée d’empêcher Lededje de se venger en assassinant Veppers, et d’arrêter ce dernier pour meurtre. Personnage en demi-teinte, qui manque un peu de charisme et qui est tributaire du mental qui dirige le vaisseau dans lequel elle se trouve.

Et puis il y a la confliction. La guerre larvée qui règne dans les enfers, et que le camp anti-enfers veut transposer dans la réalité. Et pour ce faire, ils mettent en production des millions de vaisseaux sur le disque Tsungariel, composé de frabricats. C’est démesuré, comme seul sait le faire Banks. Mais les plans du camp anti-enfers vont être perturbés par le vaisseau de la Culture qui amène Lededje à proximité de son tortionnaire.

Ce livre est davantage un space opera que ne l’était Trames. Les vaisseaux de la Culture y ont un plus grand rôle, soit sous leur forme primitive de vaisseaux, soit sous la forme d’avatar. Dans la deuxième partie du livre, ils prennent même le dessus sur les personnages humains. Ce n’est pas foncièrement dérangeant, mais on a l’impression que Banks a changé la logique de son histoire en cours de route.

Malgré le fait que j’adore toujours autant ce cycle, j’ai quelques remarques à faire. Oh, rien de grave pour un auteur comme Banks. Le livre contient quelques longueurs. Curieusement, les batailles spatiales sont racontées de manière sommaire, à travers l’avatar d’un vaisseau. Cela fait un peu « Bing, bang, j’ai refilé une raclée à l’ennemi ! ». On aurait bien voulu avoir une longue description de l’événement, comme sait le faire David Weber par exemple. Et puis, il y a le caractère de Veppers, homme le plus riche de sa planète, qui a hérité comme dette de famille de Lededje, une intaillée. L’homme en fait une esclave sexuelle et la tue dès le début de l’histoire. C’est très original puisqu’elle est le personnage principal. Mais grâce au lacet neural, la mémoire et la personnalité peuvent être sauvegardées et réimplantées dans un corps au sein même de la Culture. C’est ce qui s’appelle être reventée. Mais c’est très étrange de voir un monstre comme Veppers, prendre le parti des anti-enfers alors qu’il en détient 70 pour cent dans la galaxie. Cet étrange retournement ne colle pas vraiment avec la personnalité de l’homme qui n’a aucune considération pour la vie d’autrui.

Un dernier point concerne Vateuil, militaire qui va combattre dans des enfers virtuels et acquérir une longue expérience de la guerre. On a l’impression que ce personnage n’a pas vraiment sa place dans cette histoire. Mais la dernière ligne du livre (j’ai bien dit la dernière ligne) fait le lien avec L’usage des armes, un autre livre du cycle.

Les enfers virtuels restent un très bon livre de la Culture. Banks continue à développer son univers et à nous étonner. L’habituer du cycle se retrouvera comme un poisson dans l’eau. Le nouveau lecteur qui veut aborder ce cycle ferait mieux de commencer par L’homme des jeux ou L’usage des armes.

Voici donc encore un très bon Banks, toujours aussi original. L’auteur ne déçoit pas, et encore une fois arrive à nous captiver.

Les enfers virtuels, Iain M. Banks, Poche, 2013, 861 pages, traduction de Patrick Dusoulier, Illustration de Lauren Panepinto.

les enfers virtuels

Heris Serrano – Elizabeth Moon

Voici la réédition chez Bragelonne des trois premiers tomes du cycle Heris Serrano de Elizabeth Moon. Le cycle contient en fait sept tomes. Trois consacrés à Heris Serrano, trois consacrés à Esmay Suiza, et un dernier qui vient conclure le cycle. Bragelonne n’a pas continué le cycle des familles régnantes (titre qui colle mieux). Les trois premiers tomes forment donc « The Serrano legacy », une trilogie axée sur Heris Serrano.

Pour comparer Heris Serrano, on fait souvent référence à Honor Harrington écrit par David Weber ou Miles Vorkosigan écrit par Lois McMaster Bujold. En fait, ce n’est pas tout à fait la même chose, même si Elizabeth Moon a décidé de présenter une femme de tête, capitaine d’un vaisseau spatial, ancienne militaire qui se met au service de noble. La seule certitude, c’est que c’est bien du space opera. À l’époque où est sorti le premier tome du cycle (Partie de chasse) en 1993, les lecteurs découvraient aussi le premier tome d’Honor Harrington (Mission Basilic). David Weber a préféré laisser son héroïne dans la flotte royale manticorienne, tandis qu’Elizabeth Moon fait quitter l’armée à Héris Serrano. Les deux approches sont totalement différentes. De plus, Elizabeth Moon sortait d’un autre cycle écrit en collaboration avec Anne McCaffrey (Sassinak, Generation warriors) qui était déjà une tentative de créer une héroïne au passé militaire, dans un space opera.

Heris Serrano 1-3 (Elizabeth Moon)

Heris Serrano quitte l’armée suite à un différend avec un supérieur hiérarchique. Elle est issue d’une famille d’illustres officiers. Mettre fin à sa carrière militaire revient à stopper complètement sa carrière. Et pourtant, ce ne sera pas le cas, car elle retrouve le commandement d’un yacht appartenant à lady Cecelia. Après avoir fait connaissance de la propriétaire du vaisseau, de ses proches et de l’équipage, Heris Serrano va rapidement se retrouver face à des ennemis qui n’ont rien à envier à ceux qu’elle a rencontrés lorsqu’elle commandait un vaisseau de guerre. La différence principale, c’est que cette fois-ci, elle ne dispose pas de l’arsenal qu’elle avait l’habitude d’utiliser. Ce premier tome pose le décor et les personnages principaux.

Dans Partie de chasse ce sont des hommes qui sont les proies. Parmi les chasseurs il y a un prince qui pense que les proies sont des criminels qui sont volontaires. Double jeu est la suite logique du premier tome. La patronne de Serrano, lady Cecelia a été empoisonnée et est dans le coma. Au cœur de plusieurs complots, Heris Serrano doit tout faire pour sauver sa patronne, mais aussi le prince qui est le neveu de celle-ci. Le livre est plus axé sur les complots proches du pouvoir. Le commanditaire de ces complots est d’ailleurs dans l’entourage direct du prince. Couleurs gagnantes, troisième tome de la trilogie semble être le meilleur. Heris Serrano va se retrouver aux commandes d’un croiseur et aussi du yacht de lady Cecelia pour combattre la mafia. Un space opera avec une vraie bataille. Ce ne ressemble pas à de l’Honor Harrington, car c’est un peu trop fleur bleue, mais cela conclut bien cette trilogie.

Dans l’ensemble, cette trilogie est un space opera très peu militaire, qui devrait parfaitement trouver son public. Une héroïne comme on les aime dans ce genre très précis. C’est-à-dire, capable de prendre des décisions importantes et de peser sur les événements en agissant rapidement et efficacement.

Personnellement, j’ai bien aimé lire cette trilogie, sans avoir de préjugés. L’omnibus proposé par Bragelonne ne laisse plané aucun doute. À ce prix, il existe peu de space opera en trilogie. Donc, à conseiller.

Heris Serrano, Elizabeth Moon, Bragelonne, 2013, 587 pages

Heris Serrano 1-3

Iain M. Banks (décès)

Décidément, 2013 est une mauvaise année pour la science-fiction. Après le décès de Jack Vance, voici celui de Iain M. Banks. Deux de mes auteurs préférés viennent de s’en aller pour un monde, on l’espère, meilleur.

Iain Banks

Au mois d’avril dernier, Iain Banks avait annoncé son cancer et ajouté qu’il ne survivrait peut-être pas jusqu’à la fin de l’année. Il avait un cancer avancé de la vésicule biliaire, qui s’était propagé au foie et au pancréas. Iain Banks est décédé le 9 juin 2013 à l’âge de 59 ans. D’origine écossaise, Iain Menzies Banks était né à Dunfermline dans le File (une région située dans l’est de l’Écosse) le 16 février 1954.

Après des études d’anglais et de philosophie à l’université de Stirling, il travaille dans un cabinet d’avocats

Son premier livre n’avait rien à voir avec la science-fiction. Le seigneur des guêpes tient du thriller fantastique et de la folie. À l’époque, son éditeur (Macmilan) lui conseille d’écrire un livre par an. L’auteur va s’y tenir.

Avec Entrefer, Banks aborde le rêve et propose un livre beaucoup plus psychologique qui se passe sur un pont sans fin. Mais c’est avec « L’usage des armes » qu’il a commencé à créer la Culture en 1987.

Banks s’est impliqué dans la production théâtrale, et a écrit la musique de la pièce « The curse of Iain Banks » qui a été jouée en 1999 à l’Édimbourg Fringe festival. Sur le plan politique, il a aussi milité en défaveur du premier ministre Tony Blair. À l’époque, l’Angleterre avait participé à l’invasion de l’Irak. En signe de protestation, Bank a coupé son passeport. Dans son livre « Raw spirit », il reviendra sur ses préoccupations concernant l’Irak.

Iain Banks nous lègue une belle œuvre, composée majoritairement de livres de science-fiction qui se rapportent à la Culture. Certains d’entre eux n’ont pas encore été traduits et édités en français. Au total 27 livres :

2013 – The Quarry
2012 – The hydrogen sonata (La sonate d’hydrogène)
2012 – Stonemouth
2010 – Surface Detail (Les enfers virtuels)
2009 – Transition
2008 – Matter (Trames)
2007 – The Steep Approach to Garbadale
2004 – The Algebraist (L’algébriste)
2003 – Raw Spirit: In Search of the perfect dram
2002 – Dead Air
2000 – Look to Windward (Le sens du vent)
1999 – The Business (Le business)
1998 – Inversions
1997 – A Song of Stone
1996 – Excession
1995 – Whit, Little
1994 – Feersum Endjinn (Effroyabl Ange1)
1993 – Complicity
1993 – Against a Dark Background (La plage de verre)
1992 – The Crow Road
1990 – The Use of Weapons (L’usage des armes)
1989 – The State of the Art (L’état des arts)
1989 – Canal Dreams
1988 – The Player of Games (L’homme des jeux)
1987 – Espedair Street
1987 – Consider Phlebas (Une forme de guerre)
1986 – The Bridge (Entrefer)
1985 – Walking on Glass
1984 – The Wasp Factory (Le seigneur des guêpes)

Banks signait ses livres de deux manières différentes, suivant qu’il s’agissait de littérature générale ou de science-fiction. Dans le premier cas, il était connu sous le nom de « Iain Banks » tandis que dans le second cas il signait « Iain M. Banks ». Le M fait référence à son Prénom Menzies.

Son apport à la science-fiction est immense. Il a renouvelé le space opera en intégrant une forme d’humour, d’ironie, voire du second degré. Sa vision d’une civilisation galactique est unique, démesurée, mais tellement originale qu’un lecteur ne se contentera jamais de ne lire qu’un seul livre de la Culture. Mais à quoi ressemble cette Culture ?

La Culture est une société galactique sans lois, mais avec bon nombre de principes, de protocoles, d’usages et coutumes à respecter. Ce n’est pas la plus ancienne ni la plus grande civilisation, mais elle tend à s’élargir en intégrant tous les peuples qu’elle croise dans son expansion. Parfois cela génère des conflits armés, parfois l’intégration se fait en douceur. Dans tous les cas, la Culture arrive à ses fins. C’est une civilisation dans laquelle il n’est pas nécessaire de travailler pour vivre. Ce sont des mentaux qui la gèrent pour le compte des humains. Ils se présentent sous la forme d’IA intégrée à un vaisseau ou sous forme de petit drone qui utilise l’antigravité pour se déplacer. Les mentaux sont retors, au point de parfois devenir très dangereux. Ils ne s’investissent pas toujours eux-mêmes et font appel à des humains à qui ils accordent une grande liberté de mouvement. La Culture respecte l’individu et le place au centre de toutes les attentions. Les mentaux font tout ce qu’ils peuvent pour assurer aux humains cette liberté qui leur est chère. Mais parfois, les intérêts politiques et économiques prennent le pas sur les considérations humaines, et alors la Culture peut devenir très dangereuse.

Dans cet univers créé de toute pièce, chaque livre du cycle se focalise sur des races différentes, et parfois des époques différentes. Le lecteur n’est jamais perdu, car rapidement il retrouve les services « Circonstances spéciales » et « Contacts » qui sont le fil conducteur de tout le cycle.

Iain Banks 2

Iain Banks est un auteur important en science-fiction, incontournable en space opera, et intéressant en mainstream. Il avait apporté un renouveau au genre et s’était imposé comme un des chefs de file anglo-saxons. Toute sa production n’est pas du même niveau, mais elle reste néanmoins très originale. Espérons que ces derniers livres non encore traduits ne le resteront pas longtemps. La disparition de Banks crée un vide dans le paysage de la science-fiction anglo-saxonne qui ne risque pas de se remplir de si tôt. A lire ou à relire, l’œuvre de Iain M. Banks est importante. C’était un de mes auteurs préférés.

House of steel : The honorverse companion – David Weber

Une fois n’est pas coutume, je vais parler d’un livre en anglais qui vient de sortir. Non pas parce que j’ai décidé de lire en anglais, mais simplement pour signaler aux amateurs de Honor Harrington que David Weber a écrit ce que tous attendent avec impatience, c’est-à-dire « The honorverse companion ». La sortie du livre coïncide avec les 20 ans d’existence du cycle Honor Harrington. Pour l’occasion, on a droit à une nouvelle édition de Mission Basilic (On Basilisk station), et le premier des compendiums sur l’univers de Honor Harrington.

Ce livre propose un court roman de 180 pages, « I will build my house of steel », qui se passe avant Honor Harrington et se focalise sur Roger Winton et Edward Janacek, sur l’impact que le jeune roi a eu sur le royaume de Manticore, sur sa politique et sa stratégie. Vu la somme d’informations qui existe sur l’Honorverse, c’est trois livres qui couvriront cet univers : House of steel, House of lies, House of Shadows. Le premier est axé sur Manticore et Grayson, le second devrait se focaliser sur Havre, l’empire Andermien, et Erewhon. On peut supposer que le troisième livre traitera de la ligue terrienne et de Mesa. Mais là, je m’avance un peu trop. Les deux autres livres dépendent du succès du premier livre. Donc, contentons-nous déjà de « House of steel », qui est une bonne nouvelle pour qui sait lire en anglais.

Si comme moi, vous avez acheté les deux fascicules « Jayne’s intelligent review » qui font référence à Manticore et à Haven, vous serez heureux de voir ce premier compendium compléter ceux-ci. Le livre est moins orienté jeu que les deux fascicules, mais il donne beaucoup plus de détails sur l’histoire de Manticore, sur l’astronomie, et surtout sur la flotte qu’à constituer le royaume de Manticore. C’est un vrai catalogue de vaisseaux, comme le sont aujourd’hui les « Jane’s » qui présentent les flottes de navires de toutes les nations.

On y trouve des explications sur les différents trous de vers gérés par Manticore, qui vont vers la confédération Silésienne, Basilic, l’étoile de Trévor, Beowulf, l’amas de Talbot, etc. La famille royale manticorienne est décrite avec des arbres généalogiques. Le gouvernement, le parlement, la politique choisie, le système judiciaire y sont décrits. Une description de tous les personnages principaux est reprise dans ce livre. Le cœur du livre, c’est évidemment la description de tous les types de vaisseaux qu’on rencontre dans le cycle Honor Harrington. Une seconde partie présente les mêmes informations, mais pour Grayson.

Ce livre est donc une bible, l’outil indispensable au lecteur pour mieux comprendre l’univers de Honor Harrington. Le premier d’une série qui devrait en contenir trois. Espérons que l’Atalante se lancera aussi dans l’aventure et traduira ce livre. En attendant, je conseille à tous de ne pas attendre et de déjà s’intéresser à ce premier Honorverse companion.

House of steel : The honorverse companion, David Weber, Baen books, 566 pages, 2013

House of steel

L’orage gronde T. 1 & 2 – David Weber

Le treizième tome du cycle Honor Harrington se présente sous la forme de deux livres. David Weber reste fidèle à lui-même et nous propose de suivre le face à face entre l’empire stellaire et la ligue solarienne. Les solariens ont l’esprit toujours aussi obtus que dans les épisodes précédents, et ne veulent pas admettre qu’un peuple néo-barbare est capable de leur botter le postérieur. Et de l’autre côté, on est bien content de voir Manticore et Havre faire enfin la paix.

Ce nouveau tome reste dans la droite lignée des précédents. Pas de vraies surprises, seulement la confirmation d’événements qu’on devinait dans le tome précédent. On se souvient de l’attaque-surprise des Mésans qui a mis à mal le système manticorien.

Comme d’habitude, on a droit à des longueurs chez David Weber. Il s’agit de chapitres qui n’apportent pas grand-chose à l’histoire. C’est le cas pour les conversations qui traitent de la famille Harrington ou Winton. C’est aussi le cas lorsqu’on se focalise sur les chats sylvestres. Et c’est toujours le cas lorsque des subalternes solariens analysent des situations qui ont déjà été analysées par leurs supérieurs. Je conseille aux lecteurs de lire en diagonale ces paragraphes. Ils n’apportent rien d’important, si ce n’est une perte de temps. Ceci dit, David Weber continue à nous présenter la situation économique et militaire de Manticore sous des angles différents. Et parfois, cela se justifie.

 L'orage gronde 1-500

Reste que ce nouvel opus ne donne pas beaucoup de place à Honor Harrington. Il faut attendre plus de 170 pages pour enfin la voir. Bien que ce ne soit pas vraiment un problème. On est habitué à la voir arriver au moment le plus important de l’histoire, c’est-à-dire avant et pendant une bataille spatiale. Encore une fois, c’est David contre Goliath. Mais lorsqu’on étudie la scène de près dans le système de Manticore, on constate que David dispose étrangement d’une puissance que Goliath n’a pas. Et pour y arriver, l’aide des Havriens est la bienvenue.

La paix entre Manticore et Havre, on y rêvait en tant que lecteur. Elle est en bonne voie et les deux puissances stellaires ont décidé de s’allier face au géant que représente la ligue solarienne. La présence des Mésans s’est faite plus discrète dans ce tome. Mais on sait très bien qu’ils sont à l’origine des misères de l’empire stellaire. Je laisse deviner qui a le dernier mot lorsque Filareta se retrouve avec sa flotte dans le système manticorien. Surprise, surprise…

On reste ébahi devant la mauvaise foi des dirigeants solariens, qui ne veulent pas admettre la vérité. Ils préfèrent masquer la vérité, la transformer de telle manière que les milliards de ressortissants de la ligue solarienne penseront que c’est Manticore qui est la cause de la guerre (non déclarée). Ce sont des abrutis, imbus de leur personne, qui se sont déjà fait botter le cul dans deux tomes précédents. Cette fois-ci, ils y ont mis le paquet et ont envoyé une flotte de plus de 400 supercuirassés dans le système de Manticore, avec à sa tête l’amiral Filareta. Troisième grande confrontation entre les deux nations belligérantes, et son dénouement qui surprendra le lecteur, car il y avait moyen d’éviter d’en arriver là. Je ne vais pas révéler le dénouement de ce moment clé du cycle. Mais encore une fois, on constate que les Solariens sont tout sauf intelligents. Malheureusement pour eux, ils se croient meilleurs que les autres, et lorsqu’ils s’en rendront compte, il sera trop tard.

Ce tome est plus axé sur les problèmes économiques et financier que militaire. Manticore agit en puissance stellaire en ferma les nœuds là où c’est possible, ce qui met à mal la situation financière de la ligue. C’est original, mais est-ce tenable ? Les solariens ne le pensent pas. À terme, ils estiment reprendre le contrôle de la situation.

Enfin, certains analystes comprennent que la situation est critique pour la ligue solarienne. Elle est dépassée techniquement et politiquement par l’empire stellaire. Sa seule riposte, c’est le mensonge et l’envoi d’une flotte de guerre dans le système Manticorien. Si ces analyses sont justes, il reste à convaincre les instances dirigeantes du danger. Et là, rien n’est moins sûr. Ou plutôt, le caractère borné des responsables solariens empêche toute solution.

Un bon Honor Harrington en deux tomes. La suite logique « En mission » et « L’ennemi dans l’ombre ». À ce stade-ci, il est nécessaire de lire en parallèle les deux autres séries focalisées sur Torche et l’amas de Talbot. Encore une fois, c’est réservé aux amateurs du cycle, et uniquement à eux. En space opera militaire, c’est ce qui se fait de mieux. David Weber reste inégalé. Les couvertures de Genkis sont toujours aussi belles, et collent de plus en plus au contenu des livres.

L’orage gronde T. 1 & 2, David Weber, L’Atalante, 620 pages, 2012, illustration de Genkis.

L'orage gronde 2-500

Babylon 5

Babylon 5, 20 ans déjà !

En 1993, une nouvelle série de science-fiction fait son apparition, c’était Babylon 5. Elle se différenciait des autres séries par le fait qu’elle proposait une histoire unique planifiée sur cinq ans. C’était en tous cas le vœu de son créateur, Michael Straczynski. Elle se différenciait également par ses effets spéciaux entièrement numériques, et par les différentes histoires qui s’imbriquaient dans la trame centrale.

Avec Star Trek et Star Wars, Babylon 5 imposait une nouvelle conception de l’univers et des races qui le peuplent. Le sujet principal, c’est la station spatiale du même nom conçue par les terriens. Elle est située dans un système solaire voisin, Epsilon Eridani, et a pour seul but d’être le lieu où les différentes races négocient des traités de paix et des traités commerciaux. C’est une station spatiale de cinq kilomètres de long, où vivent un quart de millions de personnes, dans laquelle la majorité des intrigues se passent, car toutes les races de ce côté de la galaxie s’y croisent. Celles qui veulent commercer, celles qui veulent reprendre des colonies jadis perdues, celles qui attendent la venue d’un messie, celles qui espèrent des meilleurs lendemains, et celle qui a construit Babylon 5 et qui a tous les atouts pour devenir la race dirigeante de ce secteur galactique, c’est-à-dire les terriens. C’est sans inclure toutes les races, encore inconnues dans la galaxie, qui sont belliqueuses ou qui pensent différemment des terriens.

En regardant le film pilote de la série « Premier contact Vorlon », on pourrait se dire que cette série n’apporte rien de neuf par rapport à Deep Space Nine du cycle Star Trek. Et pourtant, il n’y a pas grand-chose en commun en dehors du fait que toutes les histoires sont concentrées dans une base spatiale. Babylon 5 apporte une complexité qui se révèle petit à petit au fil des saisons.

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Michael Straczynski a conçu une histoire qui se déroule en cinq saisons. C’est-à-dire que les spectateurs ne découvriront l’issue de l’histoire qu’à la fin de la cinquième saison. C’est risqué, car cela ne s’était jamais produit auparavant. La plupart des séries proposent des histoires qui ne dépassent pas un, deux ou trois épisodes, et parfois un fil rouge soutient l’ensemble d’une saison. Le pilote accepté et la série sur rail pour être produite, c’est l’occasion de passer en revue les personnages principaux : le commandant Jeffrey Sainclair, l’ambassadeur Delenn, l’ambassadeur G’Kar, l’ambassadeur Londo Molari, l’ambassadeur Kosh Naranek, le lieutenant-commandant Susan Ivanova, le chef de la sécurité Michael Garibaldi, la télépathe Talia Winter et le docteur Stephen Franklin, épaulés par Vir Cotto, Lennier, Na’Thot et Zak Allan. Plus tard, Marcus Cole et le capitaine Elizabeth Lochley feront leur apparition. Belle brochette de personnages représentant les races Minbari, Vorlon, Narn, Centauri et terrienne. Autour de ces cinq races, on en trouve d’autres qui n’ont pas le même statut, mais qui commercent avec celles-ci. Ces races espèrent un jour avoir le même statut. Les Narns et les Centauri se sont faits la guerre et risquent à nouveau de le faire. Les terriens ont été en guerre contre les Minbari dix ans plus tôt. Et chose curieuse, au moment où tout était perdu pour la Terre, les Minbari se sont rendus. Et puis, il y a les étranges Vorlons qui interviennent rarement dans les affaires des autres peuples.

En 2258, la station Babylon 5 est ouverte depuis un an. Elle a été précédée par quatre autres stations détruites ou disparues. Jeffrey Sainclair qui dirige Babylon 5, était un pilote de chasse, un des rares héros et survivants de la bataille de la ligne contre les Minbari. Pour une raison qu’il ignore, il a été affecté à la station en tant que commandant de celle-ci. L’ambassadeur Delenn semble le surveiller de près. Pendant la première saison, c’est-à-dire en 2258, Sainclair va faire face à des problèmes qui mettent la station en danger. Dangers qui peuvent venir de l’extérieur comme de l’intérieur de la station. Cette saison pose le décor et présente le contexte politique, économique, philosophique et religieux de cet univers particulier. On découvre que les Centauris et les Narns sont prêts à se faire la guerre pour le contrôle de colonies aux limites de leur territoire spatial. On apprend que la Terre et Mars ne sont pas en très bon terme, parce que la planète rouge veut son indépendance. Il existe un complot dans le système solaire, qui vise à faire tuer le président Clarke. Il y a aussi les psis qui représentent un danger s’ils ne sont pas incorporés au Corps Psi. Corps qui est un état dans l’état et est dirigé par Bester (clin d’œil à l’auteur de science-fiction Alfred Bester). Les Minbari sont préoccupés par les réincarnations et voient un lien certain entre leur race et les Terriens, tandis que les Vorlons restent le grand mystère de la galaxie. Cette race très ancienne surveille les agissements des autres races, mais ne veut pas s’impliquer dans le moindre conflit. L’ambassadeur Kosh reste une énigme que seule la télépathe Lyta Alexander a pu approcher. Une première saison originale, mais qui ne surpasse en rien ce que les autres séries de science-fiction proposent.

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C’est la deuxième saison qui va révéler les vraies intrigues qui sous-tendent cette série. Il y a un ennemi ancestral extrêmement dangereux qui est prêt à provoquer des conflits entre races, puis de s’attaquer aux survivants et les détruire ou les asservir. Les Narns et les Centauris se font à nouveau la guerre, le président terrien est assassiné, une colonie terrienne est attaquée, et le corps psi est à la recherche de personnes douées de pouvoir pour les incorporés dans leur rang. Cette deuxième saison commence par un coup de théâtre où on voit Jeffrey Sainclair céder sa place au capitaine John Sheridan, autre héros de la guerre contre les Minbari. C’est l’occasion pour l’ambassadeur Delenn de subir une mutation qui la rapprochera des humains. La découverte des Ombres va donner à Babylon 5 (B5 pour les intimes) une vraie dimension. La série n’a plus rien de commun avec ce qui a déjà été produit dans le genre.

La troisième saison s’enfonce un peu plus dans la guerre que mène Babylon 5 et ses alliés contre les Ombres. La Terre est de moins en moins une démocratie et la station spatiale est devenue l’objet de toutes les convoitises par les instances politiques et militaires. C’est l’occasion de découvrir les rangers et leurs étoiles célestes, formés et commandés par l’ambassadeur Delenn. Commandement que celle-ci remettra à John Sheridan.

Si le combat contre les Ombres et l’intrigue sur l’assassinat du président Clarke sont le cœur de l’histoire, les plus beaux épisodes de la série sont ceux qui concernent Babylon 4 et Jeffrey Sainclair. Ce dernier réapparait dans la série et est projeté dans le passé où il jouera un rôle de premier plan chez les Minbari. On découvre que Valen, le plus grand personnage de l’histoire Minbari, est en fait Jeffrey Sainclair qui a subi la mutation inverse de celle de Delenn. Il y a trois épisodes répartis sur la saison un et trois qui racontent cette histoire. C’est vraiment excellent.

La saison quatre va enfin être l’heure de vérité. John Sheridan se rend sur Z’Ha’Dum la planète des Ombres, tandis que l’alliance formée par Babylon 5 repousse les Ombres grâce aux psis embarqués sur les vaisseaux, et aux grands anciens qui ont refait leur apparition pour aider l’alliance. C’est sans aucun doute la plus belle saison. Celle où toutes les histoires s’entremêlent, où toutes les rivalités sont exacerbées, celle de la fin des Ombres, mais pas du danger qu’elles représentent. Les Ombres y ont laissé leurs servants, les Drakhs

Initialement, ce conflit aurait dû avoir lieu dans la saison 5. Mais Michael Straczynski ne savait pas si la série allait être reconduite pour une cinquième et dernière saison. Pour rester cohérent, il a dû avancer certaines parties de l’histoire originale et a postposé les histoires secondaires. Lorsque le budget de la saison 5 a été accordé, il était déjà trop tard pour changer l’ordre des épisodes. Les intrigues annexes allaient trouver leur dénouement dans cette ultime saison.

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Babylon 5 se distingue aussi par ses effets spéciaux et ses scènes de combats spatiaux. Ce ne sont pas des maquettes qui se déplacent, mais bel et bien des animations 3D de vaisseaux spatiaux. L’univers est coloré et beaucoup plus réaliste que dans d’autres séries de science-fiction. Il faut savoir que ces scènes 3D étaient faites avec des Amiga ! Pour l’époque, c’était extraordinaire. Lorsque Michael Straczynski a voulu relancer la série au 21ème siècle sous forme d’épisodes indépendants, il a eu toutes les peines du monde à retrouver les objets 3D qui avaient servi à la série originale.

En dehors des 110 épisodes, il y a eu 6 téléfilms :

  • Premier contact Vorlon (The Gathering) (1993) le pilote de la série
  • Au commencement (In the Beginning) (1997) se passe 10 ans plus tôt lors de la guerre entre les Terriens et les Minbari
  • La cinquième dimension (Thirdspace) (1998) qui se situe après la guerre contre les Ombres
  • La rivière des âmes (The River of Souls) (1998) se situe après la cinquième saison
  • L’appel aux armes (A Call to Arms) (1999) se passe 5 cinq ans après la série et est le pilote de la série Croisade (Crusade)
  • La légende des Rangers (The Legends of the Rangers) (2002) film pilote d’une série qui n’a jamais vu le jour

On pourrait ajouter un septième téléfilm avec « The lost tales », qui est en fait deux épisodes qui se passent après la fin de la série.

L’ultime croisade (Crusade) est le spin off de Babylon 5. Une série qui se concentre sur la quête du vaccin qui sauvera l’humanité du poison envoyé par les Drakhs. Cette série n’a qu’une douzaine d’épisodes, et permet de découvrir les techno-mages, déjà aperçus dans Babylon 5.

Pendant un moment, on a pensé voir une suite à Babylon 5. Mais Michael Straczynski n’a pas tenu à ce que celle-ci renaisse sur le petit écran. Si Babylon 5 doit revivre, ce ne peut être que sur grand écran. Voilà pourquoi à l’heure actuelle on n’entend plus parler de la série. C’est dommage, et rien n’indique qu’un film verra le jour. En attendant, la série comprend 110 épisodes et 6 téléfilms qui sont toujours une référence dans le monde de la science-fiction.

Babylon 5 a non seulement apporté une dimension inconnue à une série télévisée de science-fiction, elle a aussi révélé des personnages très intéressants, qui ont été développé au fil des saisons. Le plus spectaculaire d’entre eux, c’est G’Kar l’ambassadeur Narn. Au début de la série, c’est un empêcheur de tourner en rond, mais au fil des épisodes on découvre quelqu’un d’une grande noblesse, d’une grande sensibilité, d’une grande fidélité, qui pourrait être le guide de son peuple, mais qui préfère rester ce qu’il est, c’est-à-dire un ambassadeur et un ami fidèle.

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Babylon 5, c’est aussi des effets spéciaux qui dans le contexte de l’époque (les années 90) faisaient mieux que la concurrence. Aujourd’hui, ces effets sont dépassés par ceux de séries comme Battlestar Galactica. Mais pour l’époque, il y a 20 ans, c’était excellent.

Babylon 5 a connu des déclinaisons sous la forme de livres et de comics. Une partie des livres a été désavouée par Michael Straczynski. Les histoires ne s’inscrivaient plus dans les scénarios qu’il écrivait pour la série en cours de tournage. Tant pis ! Les comics ont eu plus de chance.

Babylon 5 reste un classique de la science-fiction, une série qui est l’exemple de ce qu’on peut faire de mieux en matière d’histoire complexe et d’intrigues foisonnantes. Cette série mérite de trouver son pendant sur grand écran. Espérons que Michale Straczynski trouvera la volonté et les moyens pour un jour réaliser cela. En attendant, la série est disponible en DVD.

Iain M. Banks – Trames

 

Voici la version poche de Trames, un livre de Iain M. Banks qui fait partie du cycle Culture.

L’histoire se passe sur Sursamen, un monde gigogne construit il y a plusieurs milliards d’années par les Involucra, une race qui a depuis longtemps disparu. Sursamen est un monde composé de différents niveaux, qui possèdent chacun leur propre soleil artificiel. Sur lesquels vivent des races dont l’atmosphère peut être liquide ou gazeuse. Ces différents niveaux sont reliés entre eux par de gigantesques tours qui abritent des puits permettant le passage d’un niveau à un autre. On apprend que 4000 mondes gigognes ont été créés autour de la galaxie et qu’il n’en reste plus que 1200. Les autres ayant été détruits par les Ilns. La Culture semble toute petite par rapport à la civilisation galactique qui a créé ces mondes gigognes dans un lointain passé.

Le huitième niveau de Sursamen est occupé par les Sarles et les Deldeines, peuples humanoïdes qui se font la guerre avec des armes primitives. L’épée est l’arme classique et le revolver vient de faire son apparition. Derrière ces races se cachent des races mentors qui pour arriver à leur fin influencent délibérément les races inférieures.

Au moment où l’histoire commence, nous suivons Ferbin, un des trois enfants du roi Hausk, qui après avoir évité la mort s’est réfugié dans une maison non loin du champ de bataille. Mais Ferbin qui n’a pas révélé sa présence va assister au meurtre de son père. Tyl Loesp le tue et fait passer sa mort pour une conséquence logique de la bataille qui s’est terminée en faveur des Sarles. L’homme veut régner sur le niveau 8 et sur d’autres, et pour cela il a besoin de tuer les héritiers du roi Hausk, c’est-à-dire Ferbin, son frère Cadet Oramen et leur sœur Djan Seriy Anaplian. Ferbin, qui est majeur, peut prendre la place de son père sur le trône, mais plutôt que de revenir au palais où il est certain de se faire tuer, il préfère fuir en compagnie de son fidèle compagnon Choubris Holse. Son but est de retrouver un ancien ami de son père qui fait partie de Circonstance Spéciale, avec l’espoir que ce dernier l’aidera à chasser le tyran du pouvoir.

Oramen, le second fils du roi, ignore que son père a été tué par Tyl Loesp, et il ne voit en ce dernier que le régent qui assure la transition tant qu’il n’a pas atteint l’âge requis pour régner. En attendant, Oramen se consacre à l’exploration de la cité sans nom. Il exhume un sarcophage vieux de plusieurs millions d’années vers lequel tous les regards de Sursamen se retournent. Surtout ceux des Octes (les mentors des Sarles) qui pensent que le sarcophage contient un Involucra. Comme ils se croient les dignes descendants de ceux-ci, ils estiment que le sarcophage leur revient. Et c’est toute une flotte de vaisseaux Octes qui vient se mettre en orbite autour de Sursamen.

Et puis il y a Djan Seriy Anaplian, la sœur, qui a quitté les Sarles depuis une quinzaine d’années, et qui entretemps est devenue un agent de la Culture et de Circonstances Spéciale en particulier. Quand elle a entendu que son père était mort, elle n’a eu qu’une envie, revenir sur Sursamen pour honorer sa mémoire.

Trois vies, trois trames que le lecteur va suivre tout au long des pages. Dès les premières Iain Banks plonge le lecteur au cœur de l’action. On s’attend ensuite à ce que ce rythme soit soutenu, mais il n’en est rien. Iain Banks a décidé de nous faire visiter la Culture en cinémascope et en Technicolor comme lui seul sait le faire. Que ce soit sur Sursamen le monde gigogne, sur un vaisseau de la Culture ou sur un monde-nid des Morthanveldes, Banks continue à nous surprendre par ses descriptions de civilisations et technologies.

À partir de la découverte du sarcophage, l’histoire s’anime à nouveau et l’action reprend le dessus jusqu’à la fin du livre. Elle se termine de manière inattendue, face à une menace qui met en danger Sursamen. Le livre contient un épilogue dans lequel on retrouve Choubris Holse longtemps après les événements du livre. Il nous laisse deviner le dénouement de l’histoire.

L’image qu’on a de la Culture n’est plus tout à fait la même que celle qu’on avait auparavant. Malgré son étendue et sa diversité, la Culture est en contact avec des civilisations aussi développées qu’elle, voire même plus qu’elle. On découvre que certaines races ont elles-mêmes une race mentor, et que ces races mentor ont aussi une race mentor.

À noter qu’il y a quelques personnages et lieux originaux : un avatoïde avatar du mental d’un vaisseau de la Culture, un drone qui s’est téléchargé dans un missile-couteau en forme de vibromasseur, un Iln tueur de monde gigogne, des vaisseaux qui ont des noms à coucher dehors et un nombre de personnages secondaires tel qu’il vaut mieux ne pas les retenir (d’où l’intérêt de l’appendice en fin de livre).

On retrouve en fin de livre l’article Quelques notes sur la Culture écrit par Iain Banks. Le livre se termine par une biographie de l’auteur.

Trames est vraiment un excellent livre sur la Culture. La version poche est une aubaine pour les amateurs de science-fiction. Bien qu’épais, le livre se manipule très facilement. Vraiment excellent !

Iain M. Banks, Trames, Traduction : Patrick Dusoulier, 834 pages., Poche, 2012

 

 

 

 

Les enfers virtuels T.1 & 2 – Iain M. Banks

Le dernier livre du cycle Culture de Iain M. Banks est paru en deux tomes dans la collection Ailleurs et Demains de Laffont. Au total, plus de 700 pages pour une histoire qui nous plonge dans un univers bien familier pour les amateurs du cycle. On pourrait se demander pourquoi deux volumes, alors qu’en anglais il est sorti en un volume ? Ceux qui ont lu le tome précédent du cycle (Trames), se souviennent que malgré son épaisseur, il est sorti en un volume chez Ailleurs et Demains. Ceci dit, on a droit à une excellente traduction de Patrick Dusoulier et à deux magnifiques couvertures de Manchu qui collent parfaitement à l’histoire.

Je n’ai eu aucun problème à rentrer dans cette histoire. Une fois découverts les quelques personnages principaux, l’univers de la Culture est tout à fait familier. Les mentaux y jouent une place importante, comme d’habitude. La seule vraie nouveauté, c’est l’apparition des enfers virtuels, qui sont finalement des réalités virtuelles dans lesquelles les morts ont encore une existence. Mais quelle existence ? Un enfer, un vrai enfer, qu’ils revivent souvent. En matière de torture intellectuelle, on atteint un sommet dans les civilisations proches de la Culture.

 

Le personnage principal de cette histoire est Lededje, qui est une intaillée (tatouée dehors et dedans), qui est devenue esclave sexuelle de l’homme le plus riche de Sichulte. Sa mort dès le début de l’histoire devrait nous plonger dans l’embarras. Eh bien non ! Banks nous montre ce que la Culture est capable de faire, et Lededje sera reventée à bord d’un vaisseau. Pour l’amateur de la Culture que je suis, je ne pouvais pas mieux demander.

Tous les personnages de l’histoire ne sont pas indispensables. Par exemple Prin et Chay. Cette dernière en particulier. Ils vont vivre l’enfer dans toute sa splendeur. Ils souffriront, en quête d’une porte de sortie dans chaque enfer, mais ils tomberont sur un autre enfer. Ils seront la proie des démons. À travers Chay, on va vivre cet enfer perpétuel de manière plus explicite. Au-delà de la souffrance, c’est aussi l’espoir de mettre un terme à celle-ci qui prédomine chez elle. Et Chay va passer de proie à prédateur. Elle libérera les âmes à travers sa propre faim et sa propre souffrance. C’est beau et c’est horrible. Les chapitres qui sont consacrés à Chay n’apportent rien à l’histoire principale, et n’ont pour but que de nous faire vivre les enfers à travers les yeux de deux personnages. J’aurais envie de dire que Banks aurait pu garder ces chapitres pour nous faire un vrai livre d’horreur. Mais bon, ne gâchons pas notre plaisir.

En parallèle à Lededje, on suit aussi Yime, agent de la Culture, qui ne sait pas qu’elle fait partie de Contact Spécial. Elle est chargée d’empêcher Lededje de se venger en assassinant Veppers, et d’arrêter ce dernier pour meurtre. Personnage en demi-teinte, qui manque un peu de charisme et qui est tributaire du mental qui dirige le vaisseau dans lequel elle se trouve.

Et puis il y a la confliction. La guerre larvée qui règne dans les enfers, et que le camp anti-enfers veut transposer dans la réalité. Et pour ce faire, ils mettent en production des millions de vaisseaux sur le disque Tsungariel, composé de frabricats. C’est démesuré, comme seul sait le faire Banks. Mais les plans du camp anti-enfers vont être perturbés par le vaisseau de la Culture qui amène Lededje à proximité de son tortionnaire.

 

Ce livre est davantage un space opera que ne l’était Trames. Les vaisseaux de la Culture y ont un plus grand rôle, soit sous leur forme primitive de vaisseaux, soit sous la forme d’avatar. Dans la deuxième partie du livre, ils prennent même le dessus sur les personnages humains. Ce n’est pas foncièrement dérangeant, mais on a l’impression que Banks a changé la logique de son histoire en cours de route.

Malgré le fait que j’adore toujours autant ce cycle, j’ai quelques remarques à faire. Oh, rien de grave pour un auteur comme Banks. Le livre contient quelques longueurs. Curieusement, les batailles spatiales sont racontées de manière sommaire, à travers l’avatar d’un vaisseau. Cela fait un peu « Bing, bang, j’ai refilé une raclée à l’ennemi ! ». On aurait bien voulu avoir une longue description de l’événement, comme sait le faire David Weber par exemple. Et puis, il y a le caractère de Veppers, homme le plus riche de sa planète, qui a hérité comme dette de famille de Lededje, une intaillée. L’homme en fait une esclave sexuelle et la tue dès le début de l’histoire. C’est très original puisqu’elle est le personnage principal. Mais grâce au lacet neural, la mémoire et la personnalité peuvent être sauvegardées et réimplantées dans un corps au sein même de la Culture. C’est ce qui s’appelle être reventée. Mais c’est très étrange de voir un monstre comme Veppers, prendre le parti des anti-enfers alors qu’il en détient 70 pour cent dans la galaxie. Cet étrange retournement ne colle pas vraiment avec la personnalité de l’homme qui n’a aucune considération pour la vie d’autrui.

Un dernier point concerne Vateuil, militaire qui va combattre dans des enfers virtuels et acquérir une longue expérience de la guerre. On a l’impression que ce personnage n’a pas vraiment sa place dans cette histoire. Mais la dernière ligne du livre (j’ai bien dit la dernière ligne) fait le lien avec L’usage des armes, un autre livre du cycle.

Les enfers virtuels restent un très bon livre de la Culture. Banks continue à développer son univers et à nous étonner. L’habituer du cycle se retrouvera comme un poisson dans l’eau. Le nouveau lecteur qui veut aborder ce cycle ferait mieux de commencer par L’homme des jeux ou L’usage des armes.

Voici donc encore un très bon Banks, toujours aussi original. L’auteur ne déçoit pas, et encore une fois arrive à nous captiver.

Les enfers virtuels T.1 & 2, Iain M. Banks, Laffont Ailleurs & Demains, 2011, 713 page, traduction de Patrick Dusoulier, Illustration de Manchu.

Honor Harrington T. 12 : En mission – David Weber

Voici le douzième tome du cycle Honor Harrington. Celui-ci suit… L’ennemi dans l’ombre ! Et c’est bien dans cet ordre qu’il faut les lire. David Weber nous avait laissés en compagnie de Michelle Henke dans l’amas de Talbot. Voilà que nous la retrouvons toujours face au danger. La ligue solarienne a envoyé l’amiral Byng, qui n’a pas mieux fait que de détruire trois contre-torpilleurs manticoriens en orbite. La riposte de Michelle Henke n’a pas tardé.

Dans ce douzième tome, on retrouve de nouveau des Solariens imbus de leur personne, qui pensent que tous les mondes qui ne font pas partie de la ligue, abritent des néo barbares. Pour eux, Manticore est un royaume qui a les yeux plus grands que son ventre. L’assimilation de l’amas de Talbot, et le royaume qui devient l’empire stellaire, parvient à les convaincre qu’il faut donner une leçon à ses Manties. Cela comment avec l’amiral Byng, puis avec l’amiral Crandall, et prochainement avec l’amiral Filaretta. À chaque fois, les Solariens déploient une force de plus en plus grande. Et à chaque fois, Manticore donne une raclée aux Solariens. Dans le cas de Filaretta, le lecteur n’en sait encore rien parce que la bataille n’aura lieu que dans le tome 13 (qui n’est pas encore paru). Mais on devine que ce nouvel amiral va se faire rétamer de la même manière.

En parallèle à Michelle Henke, on suit Honor Harrington qui se rend dans le système de Havre pour négocier la paix avec la présidente Eloiïse Pritchard. Manticoriens et Havriens commencent à comprendre que depuis des décennies, un troisième larron tire les ficelles et a maintenu un climat de guerre entre les deux puissances stellaires. Heureusement, le bon sens prend le pas sur les autres considérations. En tant que lecteur, on se dit que la guerre entre Manticore et Havre va enfin se terminer, et que dans ce cas Honor Harrington pourra bientôt prendre sa retraite. Mais c’est sans compter sur l’esprit tortueux de David Weber, qui a décidé de complexifier le cycle. Ce n’est plus un adversaire que doit affronter Manticore, mais trois. Havre qui est sur le point de signer la paix depuis qu’elle a été battue lors de la bataille de Manticore, la ligue solarienne qui croit pouvoir donner des leçons à n’importe quelle civilisation dans la galaxie, et Manpower qui avec l’alliance mesane trame dans l’ombre depuis des décennies. C’est ce dernier ennemi qui tire toutes les ficelles. Ce tome nous révèle enfin quels sont les vrais projets de Manpower. La destruction technologique et financière de Manticore n’est que le début d’un plan beaucoup plus machiavélique, qui voit Havre comme seconde cible à abattre. Mais le vrai but, c’est de renverser la ligue solarienne et d’en prendre totalement le contrôle. Mais pour arriver à cela, il faut créer de nouveaux vaisseaux furtifs et déployer un arsenal qui ne peut être détecté, même par les Manticoriens. On le voit, l’intrigue qui s’amenuisait au fil des tomes commence par s’épaissir à nouveau.

Manticore va être la victime du projet « baie des huitres » organisé par Manpower. Ce sera la plus sévère défaite technologique et humaine que connaitra la galaxie. Ce n’est pas à proprement une défaite puisqu’il n’y a pas eu de bataille. Tout au plus un piège, un traquenard, une mission élaborée très longtemps à l’avance, avec un groupe de vaisseaux furtifs et de missiles du même genre qui frapperont au cœur du système de Manticore.

En mission n’est pas sans défauts. Le premier, c’est que les événements de la Pinède et Congo sont souvent relatés, mais que le lecteur que je suis n’a pas encore lu les livres qui relatent ces événements (et qui ne sont pas encore édités en français). Il faut donc se contenter des différentes conversations chez les Manticoriens et les amiraux solariens. De temps en temps, les agents secrets Zilwicki et Cachat font leur apparition et sont interrogés sur les événements de la Pinède, mais surtout sur les découvertes qu’ils ont faites concernant l’implication de Manpower et de Mesa dans tous les malheurs de l’empire manticorien.

Un autre défaut, c’est la répétition des débats qui tournent autour de l’avantage technologique de Manticore en ce qui concerne les missiles embarqués à bord des vaisseaux de guerre. On suit ses débats à tous les niveaux de commandement du côté solarien. En tant que lecteur, on suppose que David Weber les a écrits pour montrer l’arrogance et l’imbécilité de l’amirauté solarienne, ainsi que l’hypocrisie de leur gouvernement. Les Solariens ne veulent pas admettre la supériorité technologique de Manticore. Une flotte comprenant des vaisseaux du mur, c’est-à-dire des supercuirassés, battue par des croiseurs et croiseurs lourds, c’est impossible dans leurs petites têtes. Donc, on assiste à des réflexions et des débats qui montrent l’incompétence des Solariens. Cela fait par moment des longueurs dans le livre. Mais bon, on est habitué avec David Weber.

Est-ce un bon Honor Harrington ? Eh bien oui ! Pas le meilleur, mais plaisant à lire. Il termine sur un conflit tout proche entre Manticore et la ligue solarienne. Et les plans de Manpower commencent à se mettre en place depuis qu’ils sont parvenus à détruire tout le complexe industriel de Manticore. Intéressant. Reste que maintenant il faut attendre le prochain livre, en ce début 2012, qui concerne aussi un cycle parallèle.

Donc, En mission est un livre pour les habitués du cycle Honor Harrington. C’est bien la suite du tome 11 (ce qui est normal), mais c’est surtout la suite de L’ennemi dans l’ombre. En tout cas, L’Atalante a bien fait de mobiliser deux traducteurs pour l’ensemble de ce cycle. Florence Bury se chargeant directement d’Honor Harrington, tandis que Michel Pagel se charge de l’univers d’Honor Harrington, c’est-à-dire de tous les cycles parallèles. Fameux boulot de traduction, très bien réalisé par ce duo.

En dehors du fait qu’il y a toujours trop de personnages, et que David Weber répète un peu trop les mêmes questions dans des cercles différents, cela reste un Honor Harrington de bon niveau. Espérons que la suite ne se fera pas trop attendre.

Genkis fait un travail formidable en tant qu’illustrateur actuel. Ces couvertures sont de loin plus belles que celles d’origine.

En mission T. 1 & 2, David Weber, L’Atalante 2011, 815 pages, Traduit par Florence Bury, Couverture de Genkis.

L’ennemi dans l’ombre – David Weber

L’univers d’Honor Harrington continue de s’étoffer avec ce cycle parallèle qui s’inscrit parfaitement dans la trame dessinée par David Weber. Après L’ombre de Saganami qui nous avait fait découvrir l’amas de Talbot, voici L’ennemi dans l’ombre, sa suite qui ne manque pas d’intrigues et de suspens. Ce deuxième tome, toujours édité chez l’Atalante, est proposé en deux volumes. C’est épais, c’est dense, c’est parfois déroutant par le grand nombre de personnages rencontrés, mais cela reste excellent.

Au lieu de suivre le capitaine de vaisseau Aivar Terekhov, c’est cette fois-ci Michelle Henke, la meilleure amie d’Honor Harrington et cousine de la reine Élisabeth. Je rassure les lecteurs, Honor Harrington y apparait à plusieurs reprises, ainsi que Aivar Terekhov.

Ce deuxième double tome commence lors d’une bataille qui se trouve dans Plaie d’honneur, où Michelle Henke est capturée par les Havriens. Je dirai que les 100 premières pages couvrent Plaie d’honneur et Coute que coute, ce qui va permettre au lecteur de se retrouver dans la trame centrale d’Honor Harrington.

L’intrigue liée à Manpower prend une nouvelle dimension. Les Mesans continuent l’élaboration de leur plan machiavélique contre Manticore. Après avoir essuyé une lourde défaite dans le système de Monica, ils ont imaginé un nouveau piège qui va amener des escadres de la ligue solarienne dans l’amas de Talbot. Cela commence avec de petits incidents lors d’inspections de vaisseaux marchands dans le système de Nouvelle Toscane, puis ce sont des évènements plus graves, qui font perdre la vie à des dizaines de milliers de Toscans. C’est le déclencheur d’un conflit entre l’escadre de Byng, un amiral borné de la ligue solarienne, et les forces spatiales de Manticore représentées par Michelle Henke. L’histoire, bien que complexe est plus proche des premiers Honor Harrington, où les combats spatiaux se faisaient entre croiseurs et torpilleurs, et où les opposants avaient davantage des escadres ou des petites flottes. Le grade d’Honor Harrington ne lui permet plus d’agir où bon lui semble. Il a bien fallu trouver des remplaçants à Honor Harrington. Qui mieux que la meilleure amie pouvait jouer ce rôle. Dans le premier tome, c’était le capitaine Aivar Terekhov (devenu commodore après ses exploits)

David Weber a eu la très bonne idée de confronter Manticore à la ligue solarienne. C’est David contre Goliath. La différence quantitative ne permet pas au royaume de Manticore de combattre dans la même catégorie, mais l’avantage technologique certain de Manticore compense partiellement ce problème. Le royaume stellaire subit une situation qu’il n’a pas demandé. D’un côté, Havre l’ennemi depuis 20 ans qu’il faut mettre définitivement à genoux après la bataille de Manticore. De l’autre côté, Manpower qui tire les ficelles et manipule la Ligue solarienne pour affronter Manticore. Le royaume stellaire est tout simplement entre le fer et l’enclume, dans un inextricable réseau d’intrigues et d’intérêts divergents. C’est excellent. Une fois n’est pas coutume, le livre se termine sur un cliffhanger.

On peut reprocher que les Solariens sont stupides et imbus de leur supériorité numérique, pensant qu’ils possèdent aussi une avance technologique. Mais lorsque certains d’entre eux comprennent que c’est Manticore qui a l’armement le plus sophistiqué, bons nombres de rouages politiques et militaires font tout pour ignorer ces analyses techniques. On se retrouve donc avec des Solariens bornés, orgueilleux et incompétents, à la gâchette trop sensible. Cela donne une situation explosive à tout point de vue.

Les Mesans, et Manpower en particulier, utilisent tous les moyens à leur disposition pour empêcher que la paix ne règne entre Manticore et Havre (qui est déjà décrit dans le cycle principal). Ils ont l’art de ne pas se mouiller, et d’avoir des alliés qui vont faire les sales besognes à leur place. La présence de vaisseaux de la ligue solarienne dans l’amas de Talbot n’est pas fortuite. Manpower a des agents infiltrés dans tous les niveaux de pouvoir.

Le seul point négatif de ce livre c’est le nombre de personnages et certaines scènes qui ne sont pas indispensables. Mais cette critique peut s’appliquer aux livres précédents du cycle Honor Harrington. Donc, ce n’est plus vraiment un point négatif. Tout au plus une caractéristique du style de David Weber.

Par contre, je soulève une remarque concernant la traduction faite par Michel Pagel, excellente au demeurant, mais qui me déroute depuis le premier volume de cette série. Michel Pagel a décidé d’écrire en Manticore, en Havre, en Fuseau alors que Florence Bury qui traduit le cycle principal écrit : à Manticore, à Havre, etc. Sur le fond, Pagel à raison s’il compare des systèmes stellaires à des pays, et sa traduction vaut celle de Bury. Mais j’aurais trouvé normal que Pagel traduise de la même manière que Bury pour rester dans la continuité.

L’ennemi dans l’ombre s’adresse évidemment aux lecteurs qui ont d’abord lu L’ombre de Saganami. La lecture de la ligne principale n’est pas nécessaire, mais est souhaitée pour la bonne compréhension des différents fils de lhistoire. Autant j’avais aimé Coute que coute, autant j’ai aimé L’ennemi dans l’ombre. C’est du très bon David Weber. J’espère qu’il ne faudra pas attendre trop longtemps pour avoir la suite de ce cycle parallèle (qui n’est pas si parallèle que ça en fait).

À consommer sans modération par tout bon amateur de space opera.

L’ennemi dans l’ombre T.1 & 2,  L’Atalante, 2011, 954 page, traduit par Michel Pagel, Illustration de Genkis

L’ombre de Saganami – David Weber

Non ce n’est pas un Honor Harrington. Oui cela se passe dans le même univers qu’Honor Harrington.  Et oui, elle apparait dans le livre. L’ombre de Saganami, de David Weber, se passe en même temps que « Coute que coute ».

L’ombre de Saganami fait un peu penser à Mission Basilic, lorsque Honor Harrington commandait encore L’intrépide, un croiseur manticorien. La grande différence c’est que Aivars Terekhov, aux commandes de l’Hexapuma un croiseur lourd de classe Saganami-C,  doit se déplacer dans tout l’amas de Talbot, alors qu’Honor Harrington restait dans le système de Basilic. Si sa tâche est plus difficile, elle est aussi moins captivante. C’est en tout cas l’impression qu’on a au départ. Mais rapidement on se rendra compte que autrement plus compliqué.

Après un référendum, les habitants des différents systèmes stellaires de l’amas de Talbot ont décidé d’intégrer le royaume de Manticore. Mais si la majorité l’a souhaité, bon nombre de personnes ont des avis divergents et sont prêts à saboter ces accords. Et cela en s’alliant avec des entreprises qui ont des intérêts économiques dans la ligue solarienne toute proche. Si la mission de Therekov est avant tout diplomatique, elle s’avère être plus compliquée que prévue face à toutes les sensibilités des différents partis de chaque système stellaires. Accompagné d’un diplomate locale, il va représenter les intérêts de Manticore.

Tandis que les habitants de l’amas doivent confirmer leur rattachement au royaume stellaire de Manticore, L’Hexapuma (qui fait partie d’un groupe local de vaisseaux de guerre) joue les gendarmes et doit faire face à des pirates et trafiquants d’esclaves. Sans parler du complot qui se trame et qui va mener à une grande bataille spatiale (comme on en l’habitude dans le cycle Honor Harrington).

Aivars Terekhov à moins de charisme qu’Honor Harrington, mais au fil du temps on s’y attache, lui et ses subalternes, comme Hélène Zilwicki par exemple. Terekhov a d’abord une revanche à prendre par rapport à ce qui lui est arrivé dans le passé, lorsqu’il a perdu son précédent vaisseau. Ensuite, il doit à la fois jouer les gendarmes et les diplomates. Et enfin, il doit prendre des initiatives avant que la situation ne soit en défaveur de Manticore. On reconnait chez lui des qualités qu’on trouvait précédemment chez Honor Harrington. Et c’est ce qui fait le bonheur de ce livre.

Il y a à mon sens trop d’intervenants dans cette histoire, trop de politiques, trop de terroristes. Cela nuit un peu à l’histoire. Avec Honor Harrington on avait Manticore contre Havre. Ici on a une multitude de systèmes stellaires de l’amas de Talbot, plus des comploteurs Mesans, face à quelques forces de Manticore. Comme lecteur on a difficile à distinguer autant de personnages, surtout en se demandant qui est utile et qui ne l’est pas.

Par contre le complot dirigé par la firme Jessik & Co, ainsi que la fourniture des vaisseaux de guerre d’origine solarienne est vraiment dans la droite ligne de ce qu’on attend de ce cycle. Du pur space opera, avec son lot de batailles spatiales comme on les aime.

En dehors du même défaut récurrent chez David Weber (trop long, trop de personnages), L’ombre de Saganami se lit sans déplaisir, car l’écriture de David Weber reste fluide et dans la plus pure tradition de l’Honoverse. Un livre pour amateur du cycle, qui veut savoir à quoi Manticore est confronté pendant qu’Honor Harrington combat les Havriens avec la huitième force.

Chapeau à Michel Pagel qui fait presque aussi bien que Florence Buri pour la traduction. Je dis presque, car alors que dans tout le cycle on écrit : à Manticore, à Grayson, à Faille, Michel Pagel a décidé d’écrire en Manticore, en Grayson, en Faille. Ce qui est parfois agaçant pour l’inconditionnel d’Honor Harrington que je suis. En dehors de ce petit détail insignifiant, c’est parfait.

Après avoir lu plus de 1000 pages, j’en suis ressorti très content. Me disant que la suite « L’ennemi dans l’ombre » serait une de mes prochaines lectures. Ces deux tomes s’adressent évidemment aux amateurs du cycle principal. Bien qu’il soit possible de le lire indépendamment. Mais un nouveau lecteur qui se lancerait dans l’aventure serait tôt ou tard obligé de revenir vers le cycle principal pour mieux comprendre les tenants et aboutissants. En tout cas, c’est un bon David Weber, qui laisse évidemment planer des doutes quant au dénouement de l’histoire dans l’amas de Talbot. Ceux qui ont lu « coute que coute » savent très bien que le royaume de Manticore devra faire face à la menace créée par la ligue solarienne. C’est en quelque sorte annoncer la bataille entre David et Goliath. Je me demande comment tout cela va se terminer. Mais ça, c’est une autre histoire.

Dois-je encore dire que c’est mon cycle de space opera préféré, et que tout amateur du genre y trouvera son bonheur.

L’ombre de Saganami T.1 & 2, David Weber, L’Atalante, 2009, 1040 pages, couverture de Genkis.

La guerre tranquille – Paul McAuley

Tiens, on ne s’est pas trompé d’éditeur ? Bragelonne nous sort un livre de science-fiction qui mériterait sa place dans la collection Ailleurs et Demains de Laffont. C’est une bonne surprise, qui prouve encore une fois que Bragelonne sait faire les bons choix en science-fiction. La couverture nous annonce un space opera et c’est bien un space opera.

C’est la première fois que je lisais un livre de Paul McAuley. Je me suis laissé convaincre par le fait qu’il était traduit par Jean-Daniel Brèque, signe de qualité. Et je ne me suis pas trompé, le livre en vaut vraiment la peine.

La guerre tranquille se situe dans un futur où l’humanité a décidé de coloniser une partie du système solaire. L’histoire se situe principalement sur certaines lunes de Jupiter et Saturne, là où vivent les extros, qui ne sont en fait que des colons humains. On découvre que ces extros ont développé une vraie écologie en exploitant au mieux les ressources des lunes. Des cités entières existent sur ces lunes et regroupent parfois plusieurs dizaines de milliers de personnes. Les extros ont également une durée de vie plus longue. Leur connaissance en génétique leur permet de vivre plus longtemps que sur Terre.

Paul McAuley nous propose de suivre quatre personnages principaux :

Macy Minnot, est  ingénieur écologue envoyée sur Callisto. Rapidement elle tombe dans un piège et est accusée d’un meurtre qu’elle n’a pas commis. C’est sensé être le personnage principal de l’histoire. Pour une raison indépendante de sa volonté, Macy est accusée, pourchassée, emprisonnée, considérée comme une espionne à la solde des terriens. Elle a l’art d’être toujours au mauvais moment au mauvais endroit.

Sri Hong-Owen est une spécialiste en génétique. Elle travaille pour le compte du Grand Brésil, le pays qui cherche à tout prix à faire la guerre et à s’emparer des colonies extros. C’est avec elle que le lecteur constate que ce livre est bien un space opera. Sri recherche Averne, une autre généticienne, qui a permis aux extros d’avoir une vie plus longue. Sa quête la mènera jusqu’à sa cible, mais il est impossible de savoir ce qui adviendra par la suite car le livre ne présente que la moitié de l’histoire. Sri n’est pas vraiment mauvaise, mais elle subit des pressions qui la forcent à agir dans un sens qu’elle n’a pas toujours souhaité.

Dave 8 est un clone, le meilleur de sa génération. Il a été formé pour tuer et s’infiltrer chez l’ennemi. Il est le fruit des travaux génétiques de Sri Hong-Owen. Sous le nom de Ken Shintaro, il est infiltré sur une colonie extro et prépare l’invasion du Grand Brésil. Personnage de tueur, sans état d’âme, capable de tuer ses professeurs sur un simple ordre. C’est la machine à tuer dans toute sa splendeur.

Cash Baker est le meilleur pilote que possède le Grand Brésil. Il subit des altérations physiologiques pour pouvoir piloter un singlenef, chasseur perfectionné commandé grâce à des IA et sa pensée. Dans les parages des colonies extros, il est envoyé en mission pour détruire leurs vaisseaux. Ce n’est pas le personnage le plus sympa de l’histoire et il n’a pas vraiment l’étoffe des héros.

La guerre tranquille est longue et lente. C’est normal quand on sait qu’on suit plusieurs personnages en parallèle dont les destins se croisent et se décroisent. Mais pour les lecteurs qui aiment des livres comme L’aube de la nuit de Peter F. Hamilton,  il y a toutes les chances qu’ils aimeront également cette guerre tranquille. Il y a comme un air de famille dans la manière d’écrire. Le livre commence avec les préparatifs de guerre du Grand Brésil et de la famille Peixoto en particulier.

S’il y a un reproche à faire à ce livre, il concerne les personnages. En temps que lecteur on ne s’accroche à aucun d’entre eux, et c’est bien dommage. C’est principalement dû au fait que Paul McAuley décrit les situations dans lesquels se retrouvent ses personnages, mais pas leurs attentes, leurs désirs, leurs espoirs, leurs pensées. Le lecteur ne se retrouve pas dans la peau des personnages. Par moment on assiste à des descriptions trop longues, en particulier lorsqu’elles traitent de biologie. Un charabia scientifique qu’on a parfois envie de sauter.

Ceci dit l’histoire est excellente et c’est très bien écrit. Il n’y a donc pas de raison de ne pas attendre la suite de l’histoire. Personnellement je lirai avec plaisir la fin de cette histoire. Espérons que Bragelonne n’attendra pas trop longtemps avant de publier la fin de l’histoire.

La guerre tranquille, Paul McAuley, Bragelonne, 2010, 504 pages, traduit par Jean-Daniel Brèque, illustration de Sparth

Coûte que coûte (Honor Harrington T.11) – David Weber

Onzième tome du cycle Honor Harrington, Coute que coute se présente sous la forme de deux pavés 574 et 554 pages, édités par L’Atalante. Évidemment ce  livre s’adresse aux inconditionnels du cycle Honor Harrington. Et pour la petite histoire il faut savoir que ce livre trouve sont pendant dans L’ombre de Saganami également édité par l’Atalante. J’y reviendrai un peu plus loin.Dans Plaies d’honneur, les havriens avaient repris les hostilités alors que Manticore avait battu Havre. Les hautes instances de la république avaient préparé la reprise des hostilités en construisant une nouvelle flotte dans un refuge tenu secret. On aurait pu penser que le royaume de Manticore allait être définitivement assommé par Havre, qui dispose d’une plus grande capacité de production. Mais le génie et la qualité produite par Manticore compensent partiellement la quantité que peut fournir Havre. C’est le débat qui existe depuis le premier tome du cycle Honor Harrington. La qualité contre la quantité. David Weber rivalise d’astuces pour nous proposer des évolutions constantes des technologies mises au point par les différents protagonistes de ce cycle. Dans ce sens, Honor Harrington, est la mieux placée pour exploiter ces nouvelles technologies.

 

Avec Coûte que coûte, on assiste à une nouvelle escalade du conflit entre Manticore et Havre. Le royaume n’est plus capable d’affronter la république dans un grand face à face. Alors ce dernier se concentre sur des actions plus ponctuelles, qui causeront des dégâts à des systèmes solaires moins bien protégés qui se trouvent au sein de la république de Havre. Et c’est Honor Harrington, à la tête de la huitième force, qui est chargée de planifier et d’exécuter ces raids. Si elle a bien reçu des vaisseaux de dernière génération, elle ne dispose pas d’une flotte aussi importante que la première ou la troisième. Elle doit donc composer avec ce problème de sous effectif.

Si deux vagues de raids sont un vrai succès, la troisième vague va voir la riposte des havriens. Et Honor Harrington connaitra une vraie défaite. Mais pendant tout ce temps, on découvre que les origines du conflit viennent d’un troisième larron resté dans l’ombre. Si Havre en a la certitude, Manticore en doute encore, ce qui ne va pas relancer les pourparlers de paix entre les deux systèmes.

De plus, Manticore est pris dans un sac de nœuds inextricables du côté de l’amas de Talbot. La ligue solarienne est en conflit avec Manticore. Si ces événements sont révélés de manière succincte, ils trouveront leur explication dans L’ombre de Saganami également en deux tomes chez L’Atalante. Les forces manticoriennes plus évoluées technologiquement que les solariens, ont remporté la victoire mais à quel prix ? Cette victoire révèle un danger encore plus grand de voir venir une flotte solarienne. Et dans un tel face à face, Manticore n’aurait aucune chance. Devoir faire face à Havre et en même temps à la ligue solarienne est un vrai dilemme pour Manticore. La solution consiste à d’abord se débarrasser du problème havrien, et de convaincre la ligue solarienne qu’elle n’a aucune chance sur le plan technologique. De son côté, Havre est prêt à faire la paix, et propose une réunion entre la reine Élisabeth et la présidente Pritchart. Mais cette solution de bon sens sera minée par un acteur caché dans l’ombre.

Ce onzième tome d’Honor Harrington propose décidément des situations plus complexes auxquelles notre héroïne doit faire face. Les batailles spatiales ne manquent pas, tout comme la vie privée d’Honor Harrington est révélée au grand jour par la presse. On découvre qu’elle est enceinte, qu’elle va se marier avec le premier Lord de la spatiale, mais aussi avec son épouse. David Weber nous met face à une situation rocambolesque, dans laquelle, en temps que lecteur, on n’y crois pas vraiment.

Après une victoire importante d’Honor Harrington, on se rend compte que le face à face finale va se produire, et qu’il se fera dans le royaume de Manticore. On assiste donc à la plus grande bataille du cycle, dans laquelle des centaines de vaisseaux sont engagés de part et d’autres. En la lisant, on se dit que Honor Harrington risque d’y perdre la vie, comme tous les autres protagonistes. L’enjeu dépasse les motivations de chacun. C’est la survie de Manticore qui est en jeu et la crédibilité de la république de Havre.

Oui, c’est du bon David Weber, comme on est habitué avec le cycle Honor Harrington. Mais en temps que fan du cycle on n’est pas surpris de la tournure des événements. Ce bouquet final s’achève un peu prématurément, sans qu’on ne sache ce que les deux parties feront par la suite. Il manque un épilogue à cette histoire. Sans doute David Weber a-t-il cru bon de ne pas encore rallonger un livre déjà fort épais. C’est la seule critique que je formulerai concernant celui-ci.

Coûte que coûte reste un moment très agréable de lecture. Un peu long au début. Mais qui après un bon tiers démarre vraiment, pour être soutenu jusqu’à la fin. Comme il y a un parallèle avec les événements de Talbot, il est évidemment conseillé de lire aussi ces deux tomes, sortis juste après.

On pourrait s’attendre à une suite, car en temps que lecteur on reste sur sa faim. Et puis la ligue solarienne n’a pas été assez développée dans les tomes précédents du cycle.  Le prochain Honor Harrington en anglais sortira au mois de juin sous le titre Mission of Honor, c’est-à-dire pas avant 2011 ou 2012 en français. C’est la suite de ce onzième tome. Nous ne sommes donc pas encore au dénouement finale pour Honor Harrington.

A noter que les couvertures sont faites par Genkis. Ce qui est également le cas pour L’ombre de Saganami. Les autres livres du cycle ressortiront avec de nouvelles couvertures faites par Genkis. Ce qui est une bonne chose.

Si comme moi vous êtes un inconditionnel d’Honor Harrington alors ce livre est pour vous. Et dans la foulée n’oubliez pas de lire L’ombre de Saganami qui est parallèle à Coûte que coûte. Décidément ce cycle survole de loin tous les autres cycle de space opera.

Coûte que coûte T.1 & 2, David Weber, L’Atalante, 2010, Couverture : Genkis

 

Suprématie – Laurent McAllister

Suprématie se présente sous la forme d’un gros pavé de plus de 660 pages édité par Bragelonne. L’éditeur montre qu’il est devenu incontournable même en science-fiction. Ce livre est le dernier choix fait par Jean-Claude Dunyach en  temps que directeur de la collection SF.

Derrière le pseudonyme de Laurent McAllister on retrouve en fait deux auteurs.  L’écrivain Yves Menard et l’astrophysicien Jean-Louis Trudel. Ces deux auteurs n’en sont pas à leur coup d’essai. Ils nous donnent ici un vrai space opera pur et dur qui nous conte les aventures d’un vaisseau hors norme, le Dhoukh/Harfang commandé par le capitaine Alcaino.

Un jour des représentants de la cité des Arts viennent demander l’aide d’Alcaino et de son vaisseau le Doukh. Ce dernier est le seul de sa génération. Il dispose d’une IA capable d’assumer le commandement si nécessaire et d’un armement qui le met à l’abri de l’ennemi. La technologie du vaisseau permet au commandant de visualiser les lieux de manière virtuelle. Les auteurs ont un goût très prononcé pour les nouvelles technologies et n’hésitent pas à le montrer dans ce livre.

La ville d’Art ne veut pas être assimilée par les Suprémates qui imposent une paix forcée aux mondes qu’ils contrôlent. On assiste très vite à des scènes de batailles spatiales dans lequel le Doukh est confronté aux vaisseaux Suprémates. S’il gagne aisément en les pourchassant, ce n’est pas pour autant que les Suprémates se sentent vaincus. Les habitats du système rebelle sont à leur tour
détruits par ceux-ci. Ce carnage va amener Alcaino à réagir en élaborant un audacieux plan qui vise tout simplement à détruire la capitale des Suprémates. C’est-à-dire à s’attaquer à la planète la mieux protégée de l’amas. Malgré la puissance de son vaisseau, Alcaino se lance dans une quête spatiale et temporelle très risquée pour arriver à son but.

Je noterai tout de même deux critiques à ce livre qui est excellent. La première c’est d’avoir opté pour un vaisseau invincible. Cela enlève une partie du  suspense. C’est ce qui s’appelle le complexe de l’Everest qu’on pourra lire sur le  site de la revue Solaris (http://www.revue-solaris.com) sur la page Comment ne  pas écrire des histoires. Mais ceci passe encore car les auteurs ont élaboré une  histoire vraiment originale.

La deuxième critique vise l’utilisation d’une mesure du temps décimale et non sexagésimale. Le lecteur lira des kilosecondes, voire des hectosecondes, et il devra en permanence convertir dans sa tête les unités de temps et se dire : ah oui, ça ne fait que deux heures, ou trente-cinq minutes, ou trois jours. Dès la première page on apprend que le Doukh a une longueur de quinze microsecondes-lumière. En terme plus simple, ça veut dire un millionième de la distance parcourue par la lumière pendant une seconde multiplié par quinze. Est-ce que ce n’était pas plus facile de dire dès le départ que le Doukh faisait 4,5 kilomètres ? Ce sont des détails, mais des détails qui irritent.

C’est bien écrit, c’est complexe et très technologique. On ne va pas bouder son plaisir de lire un vrai space opera. Je dirai donc que c’est un excellent nouveau space opera (et francophone de surcroît) et que le lecteur y trouvera certainement son bonheur. La seule chose que j’espère, c’est que lors de la réédition de ce livre, les unités de temps soient converties en sexagésimale. C’est tout.

Suprématie, Laurent McAllister, Bragelonne, 2009


NSO Le nouveau space opera – Gardner Dozois et Jonathan Strahan

Le space opera a toujours été mon genre de prédilection en science-fiction. J’ai commencé avec Jack Williamson et E.E. doc Smith, puis j’ai continué avec Edmond Hamilton, Isaac Asimov, Poul Anderson en passant Peter F. Hamilton, Alastair Reynolds, Iain Banks, et surtout David Weber. Donc cette anthologie je l’attendais au tournant, en espérant qu’elle correspondait à mes aspirations.

Cette anthologie est écrite par des valeurs sûres de la science-fiction comme Robert Reed, Greg Egan, Peter F. Hamilton, Alastair Reynolds, Stephen Baxter, Robert Silverberg, Gregory Benford, Walter Jon Williams, Nancy Kress et Dan Simmons. Des auteurs qui attirent le lecteur par la qualité de leurs textes. Mais ici nous sommes dans un format court qui varie de 10 à 50 pages et malgré tous leurs talents, tous ne sont pas nécessairement à l’aise avec le format imposé. Il y a des nouvelles qui mériteraient d’être développées sous la forme de roman, et d’autres qui paraissent un peu trop longues. Et puis il y a celle de vieux briscards qui arrivent encore à nous étonner agréablement.

Mais pourquoi cette anthologie s’appelle t-elle NSO (Nouveau space opera) ? Le space opéra a toujours existé. Au fil du temps il est devenu plus complexe, plus technologique, avec des personnages souvent à la psychologie compliquée. Ce n’est plus seulement de l’aventure, de la découverte et de l’action. C’est aussi des histoires qui mettent en valeur des problèmes de sociétés, des prises de conscience, des extrapolations à partir de découvertes scientifiques, des conflits politiques et militaires, etc. Et c’est surtout des histoires de voyages dans  l’espace. L’espace est l’acteur omniprésent.  Si celui-ci ne s’y trouve pas, le terme space opera est alors galvaudé.

Il y a plus de différence entre un livre de fantasy de Robert E. Howard et un autre de David Gemmell qu’entre un space opera de E.E. doc Smith et un autre de David Weber. Et pourtant on ne dit pas Nouvelle fantasy ! Donc l’acronyme
NSO ne se justifie pas vraiment. J’invite plutôt le lecteur à aller lire « Du space opera au nouveau space opera », un article écrit par Jean-Claude Dunyach,  ou à lire l’article de Patrick S. Vast concernant le space opera sur le site de Phénix.

Mais revenons à notre anthologie. Si l’idée de base de Dozois & Strahan est excellente, la concrétisation de celle-ci ne correspond pas tout à fait aux attentes du lecteur que je suis (oui, je sais, je suis très exigent en matière de space opera). On trouve des nouvelles qui correspondent bien au genre, mais aussi des nouvelles qui n’ont rien à voir avec celui-ci. Il s’agit de textes qui englobent toute la science-fiction, et pas seulement le space opera. Rien que pour cette confusion, l’anthologie devrait davantage s’appeler NSF pour Nouvelle Science-Fiction. Bon, ce n’est pas vraiment dramatique. Mais quand on dit space opera, on pense à des histoires dans lesquelles l’espace et le voyage dans l’espace ont  une place prédominante. Plusieurs des textes présents nous montrent un héros qui arrive sur une planète, et puis qui oublie complètement l’espace. C’est un peu comme si on lisait des récits de marine au début desquels le héros débarque à  terre sans revenir au vaisseau qui l’a amené jusque là.  Ça ne colle pas, et ça se  sent à travers certaines nouvelles où les auteurs n’ont fait aucun effort.

J’ai lu cette anthologie dans un ordre personnel. En commençant par les auteurs que je connaissais, puis ceux que j’avais envie de découvrir, et enfin ceux que je n’avais jamais lu auparavant.Sans entrer dans le détail de chaque nouvelle, j’en retiens les choses suivantes :

– Les réfugiés de Gwyneth Jones, première nouvelle du livre qui parvient même à ne pas parler d’espace. C’est le type même de la nouvelle qui n’a rien à voir avec le genre.

L’anneau de Verthandi de Iain McDonald est un vrai space opera démesuré, qui mériterait d’être approfondi à travers un roman.

Eclosion de Robert Reed nous ramène sur la coque du grand vaisseau (deux tomes parus chez Bragelonne).

Gloire de Greg Egan est assez original. Des scientifiques qui explorent la galaxie, prennent l’apparence des êtres qu’ils vont rencontrer dans d’autres civilisations. Ce n’est pas l’auteur que je préfère, et pourtant cela se laisse lire. Seul le prétexte de mathématiques plus avancés ne semble pas convainquant.

Béni par un ange de Peter F. Hamilton nous raconte une rencontre avec un ange technologique. L’histoire se passe dans le même univers que celui de l’étoile de Pandore, donc dans le Commonwealth.  J’adore Peter F. Hamilton, mais je le  préfère dans des longs textes.

Les fleurs de Minla de Alastair Reynolds. Attention, excellente nouvelle ! Pour moi c’est la meilleure de cette anthologie. Merlin, un explorateur doit faire une halte forcée sur un monde qui va connaitre une grande catastrophe. Pour aider cette civilisation, il va lui révéler l’utilisation de l’atome. Mais après une période de stase dans son vaisseau, il va découvrir que cette civilisation est prête à s’entretuer plutôt que de gagner les étoiles. L’histoire se passe sur une vie entière, celle de Minla. La cinquantaine de pages a été dévorée d’une traite et cette histoire mériterait d’avoir une suite.

La reine des neiges de Mary Rosenblum nous entraine sur un des satellites de notre système solaire. Un intermède entre deux grands auteurs.

Souvenance de Stephen Baxter est lié au cycle Xeelee de l’auteur et nous explique comment la Terre a été envahie par des extraterrestres puis s’est
libérée de leur joug.

L’empereur et la Maula de Robert Silverberg est tout simplement les contes des mille et une nuits transposés dans l’espace. Dès les premières pages on devine le reste de l’histoire, mais ce vieux briscard de Robert Silverberg sait raconter de courtes histoires, format dans lequel il excelle. Et on se laisse piéger jusqu’à la fin de la nouvelle.

Un revers de fortune de Gregory Benford, vrai space opera technologique, dans lequel les protagonistes ont découvert un trou de vers qu’ils doivent maitriser. Mais un trou de vers peut se mordre la queue !

L’art de la guerre de Nancy Kress. Mission de récupération d’artéfacts humains. Un peu trop militaire et pas assez captivant. Nancy Kress nous a habitués à beaucoup mieux que ça.

La muse de feu de Dan Simmons nous fait suivre une troupe de théâtre qui joue du Shakespeare et qui navigue à bord d’un vaisseau qui s’appelle la muse.  Cette nouvelle est plus un prétexte pour nous parler de l’œuvre de Shakespeare qu’une vraie nouvelle de science-fiction. Même remarque que pour Nancy Kress. Dan Simmons peut mieux faire.

Voilà une anthologie de science-fiction qui nous présente des textes récents et un panel de bons auteurs. Dans l’ensemble elle est bien structurée et se laisse lire. Je retiendrai principalement la nouvelle d’Alastair Reynolds qui vaut  vraiment le détour. Je formulerai simplement deux reproches à l’égard de cette anthologie. Le premier c’est que le titre NSO n’est pas vraiment approprié à cause du choix des textes qui ne collent pas toujours avec le space opera. Et le second reproche qui me semble plus dérangeant, c’est que des auteurs comme Iain Banks ou David Weber sont absents de l’anthologie. Oublier David Weber, c’est comme oublier E.E. doc Smith à l’âge d’or de la science-fiction dans une anthologie dédiée au space opera. Dozois & Strahan n’ont pas été assez restrictifs dans leur choix et ont oublier des incontournables du space opera. En dehors de ces deux reproches, qui disparaissent si on ne se focalise pas sur le titre NSO, c’est un excellent panorama de la science-fiction actuelle.  En tout cas c’est une excellente initiative de la part de Bragelonne, même si éditer une anthologie de nouvelles est plus risqué. Je conseille cette anthologie à tous ceux qui veulent lire ou découvrir quelques grand noms de la science-fiction actuelle. Le  dépaysement est assuré.

Je me demande maintenant si le même genre d’initiative pourrait se reproduire avec des auteurs francophones !

NSO Le nouveau space opera – Gardner Dozois et Jonathan Strahan, Bragelonne

L’étoile de Pandore : T.1 Pandore abusée – Peter F. Hamilton

Commencer la lecture d’un livre de Peter F. Hamilton est toujours un plaisir pour moi. Depuis que j’ai lu L’aube de la nuit, l’auteur est devenu un de mes préférés. Dragon déchu n’a fait que confirmer ma préférence pour cet auteur dont je suis devenu un inconditionnel. Donc il ne faut pas s’attendre à de l’objectivité de ma part concernant ce nouveau cycle.

Pandore abusée est le premier tome du cycle L’étoile de Pandore. Cycle qui contient quatre volumes qui ont précédemment été édités en grand format chez Bragelonne et qui sont réédités chez Milady.

Il s’agit d’un space opera comme seul Hamilton sait en faire, c’est-à-dire à la fois grandiose et cohérent, avec une ribambelle de personnages et bon nombre d’intrigues secondaires. Certaines se recoupent, d’autres laissent supposer qu’elles trouveront une suite dans les trois autres volumes du cycle.  Ce premier tome nous plonge dans un univers propre à l’auteur, presque similaire à ceux de ses autres livres. Même si ce n’est pas celui de L’aube de la nuit ou celui de Dragon déchu, il y a un certain air de famille indéniable et le lecteur habitué à lire Hamilton s’y retrouve très vite.

Pandore abusée se situe au vingt-quatrième siècle. L’humanité a colonisé  quelques six cents mondes, qui forment le Commonwealth solaire. Elle utilise des portails de transfert qui ne nécessite pas l’utilisation de vaisseaux. Un jour un astronome découvre un phénomène bizarre. Une étoile disparait subitement à un millier d’années lumière de distance. Elle est emprisonnée dans un gigantesque champ de force qui la rend invisible à l’extérieur de son système solaire. Le Commonwealth intrigué par cette énigme décide d’envoyer une équipe scientifique. Mais pour cela il faut d’abord créer un vaisseau qui navigue plus vite que la lumière et qui peut générer des trous de vers.  Si la majorité de l’humanité est favorable à cette mission, il y a des terroristes qui ne voient pas d’un bon œil sa construction et qui pensent que l’Arpenteur des étoiles est derrière tout cela. Ils font donc tout pour détruire le vaisseau en cours de construction. A ce stade-ci de l’histoire je me suis demandé ce que pouvait bien être cet Arpenteur des étoiles dont on parle souvent dans le livre, mais que jamais personne n’a vu de près ou de loin. Une sorte d’arlésienne cosmique accusée de tous les maux de l’humanité, qui ne joue encore aucun rôle. Mais on le sait très bien, chez Hamilton les personnages font parfois leur apparition très loin dans l’histoire, et je ne doute pas que le mystère qui règne autour de l’Arpenteur des étoiles sera dévoilé dans les tomes suivants.

L’humanité arrive enfin à lancer son vaisseau qui se nomme Seconde chance. A partir de ce moment là, nous sommes au deux tiers du livre et les choses commencent vraiment à s’accélérer. Seconde chance parcourt rapidement les mille années lumière qui séparent le Commonwealth de ce mystérieux système solaire qui cache une étoile. Et voilà que arrivé à proximité, les scientifiques découvrent une gigantesque sphère de Dyson qui abrite l’étoile. L’histoire est soudain lancée, mais nous sommes presque à la fin de ce premier tome. Nous sommes dans les cent dernières pages pour être exact. Et là on retrouve le Peter F. Hamilton de l’aube de la nuit. Un mystère est sur le point d’être élucidé tandis que d’autres font leur apparition lorsque la sphère s’efface et permet au vaisseau de pénétrer dans le système solaire.

C’est pour moi de l’excellent Peter F. Hamilton, mais si je dois émettre quelques critiques concernant ce livre, elles concernent certaines longueurs. Par exemple décrire tous les clans des terroristes est inutile. Nous faire vivre du vol à voile pendant un nombre incalculable de pages l’est tout autant. Ou nous faire suivre un procès qui n’a aucun impact sur l’énigme à résoudre n’a pas non plus son sens. Il y a aussi le fait qu’il y a trop de personnages et qu’il est difficile de savoir lesquels seront récurrents dans les tomes suivants. Ce sont des défauts souvent rencontrés dans les livres de Peter F. Hamilton, mais c’est aussi ça qui fait son originalité. Personnellement j’adore, et je trouverais anormal de lire un de ces livres qui ferait moins de cinq cents pages.

Je ne peux que conseiller la lecture de ce cycle à tout amateur de space opera. Peter F. Hamilton est un grand du NSO.Ce serait vraiment dommage de s’en priver !

Pandore abusée, Peter F. Hamilton, Milady

L’empire caché – Kevin J. Anderson

Après avoir apporté sa contribution à l’univers de Star Wars et collaboré avec Brian Herbert aux suites de Dune, Kevin J. Anderson nous propose son propre univers avec ce premier tome de la saga des sept soleils.

L’empire caché est un space opera de facture classique qui nous décrit un avenir dans lequel les humains ont colonisé bon nombre de systèmes solaires grâce à l’aide des Ildirans qui leur ont donné la technologie du moteur interstellaire. La Terre a essaimé à travers le bras spiralé de la galaxie, et la Hanse (ligue hanséatique terrienne) a été créée. Certaines colonies se sont définitivement
séparées de la Terre pour former une nouvelle civilisation. Les vagabonds exploitent des stations d’écopage et revendent l’ekti (le carburant des vaisseaux) à l’ensemble des systèmes de la Hanse. Théroc, civilisation devenue indépendante de la Terre, fournit des prêtres verts qui peuvent communiquer par télépathie. Par téliens, les messages sont envoyés beaucoup plus rapidement que ce que permet la technologie. De son côté, l’empire Ildiran qui occupe le bras spiralé est sur le déclin et continue de se replier sur lui-même plutôt que de s’étendre à travers la galaxie.

La curiosité des humains pousse ceux-ci à rechercher des vestiges et à découvrir une civilisation depuis longtemps disparues, les Klikiss. Puis à utiliser une de leurs technologies qui permet de créer des petits soleils à partir de lunes. Aux yeux des Ildirans, cela parait insensé car la galaxie regorge de systèmes solaires inexploités qui permettraient à la civilisation humaine de s’étendre. Mais les humains veulent leur montrer qu’ils sont capables de maitriser une technologie telle que celle du flambeau klikiss qui crée des soleils. C’est à ce moment que de mystérieux vaisseaux sphériques font leur apparition et détruisent plusieurs stations d’écopage. La civilisation humaine est soudain inquiétée par ces mystérieux vaisseaux tandis que l’empire Ildiran se prépare à faire face à un ennemi depuis longtemps disparu. L’utilisation du flambeau klikiss a été perçu comme un acte hostile par les Hydrogues ressurgis d’un lointain passé. Les humains espèrent trouver un moyen de contrer les Hydrogues en s’intéressant à des robots klikiss qui ont été réanimés. Mais que sait-on sur ces robots ? Que sont-ils capables de faire ? C’est encore trop tôt pour le dire. Mais les six livres suivants devraient nous le révéler.

Kevin J. Anderson a opté pour des chapitres courts qui n’excèdent pas deux à cinq pages. C’est très déroutant car à peine s’intéresse-t-on à un personnage que déjà on doit le délaisser pour un autre. Si la technique a fonctionné pour Frank Herbert dans Dune, il n’en est pas de même pour Kevin J. Anderson dont les personnages manquent singulièrement de relief. On n’a pas l’occasion de se focaliser sur eux et on doit se contenter de suivre l’action au demeurant très lente.

L’empire caché n’apporte rien de nouveau en space opera. Chez le même éditeur, Peter F. Hamilton fait preuve de plus d’originalité. Mais cela reste de la bonne science-fiction. La saga des sept soleils comprend sept tomes plus une bande dessinée (Veiled Alliances). Ce premier tome n’est que l’introduction à un univers beaucoup plus riche. C’est certainement un space opera à découvrir.

Kevin J. Anderson, L’empire caché (La saga des sept soleils, tome 1), traduction Laurent Genefort, 551 pages, Bragelonne

Trames – Iain M. Banks

Un nouveau livre de Iain M. Banks est toujours un évènement, surtout si celui-ci fait partie du cycle Culture. Trames vient s’ajouter aux six précédents livres du cycle et peut être considéré comme un des meilleurs.

L’histoire se passe sur Sursamen, un monde gigogne construit il y a plusieurs milliards d’années par les Involucra, une race qui a depuis longtemps disparu. Sursamen est un monde composé de différents niveaux, qui possèdent chacun leur propre soleil artificiel. Sur lesquels vivent des races dont l’atmosphère peut être liquide ou gazeuse. Ces différents niveaux sont reliés entre eux par de  gigantesques tours qui abritent des puits permettant le passage d’un niveau à un autre. On apprend que 4000 mondes gigognes ont été créés autour de la galaxie et qu’il n’en reste plus que 1200. Les autres ayant été détruits par les Ilns. La Culture semble toute petite par rapport à la civilisation galactique qui a créé ces mondes gigognes dans un lointain passé.

Le huitième niveau de Sursamen est occupé par les Sarles et les Deldeines, peuples humanoïdes qui se font la guerre avec des armes primitives. L’épée est l’arme classique et le revolver vient de faire son apparition. Derrière ces races se cachent des races mentors qui pour arriver à leur fin influencent délibérément les races inférieures.

Au moment où l’histoire commence, nous suivons Ferbin, un des trois enfants du roi Hausk, qui après avoir évité la mort s’est réfugié dans une maison non loin du champ de bataille. Mais Ferbin qui n’a pas révélé sa présence va assister au meurtre de son père. Tyl Loesp le tue et fait passer sa mort pour une conséquence logique de la bataille qui s’est terminée en faveur des Sarles. L’homme veut régner sur le niveau 8 et sur d’autres, et pour cela il a besoin de tuer les héritiers du roi Hausk, c’est-à-dire Ferbin, son frère Cadet Oramen et leur sœur Djan Seriy Anaplian. Ferbin, qui est majeur, peut prendre la place de son père sur le trône, mais plutôt que de revenir au palais où il est certain de se faire tuer, il préfère fuir en compagnie de son fidèle compagnon Choubris Holse. Son but est de retrouver un ancien ami de son père qui fait partie de  Circonstance Spéciale, avec l’espoir que ce dernier l’aidera à chasser le tyran du pouvoir.

Oramen, le second fils du roi, ignore que son père à été tué par Tyl Loesp, et il ne voit en ce dernier que le régent qui assure la transition tant qu’il n’a pas atteint l’âge requis pour régner. En attendant Oramen se consacre à l’exploration de la cité sans nom. Il exhume un sarcophage vieux de plusieurs millions d’années vers lequel tous les regards de Sursamen se retournent. Surtout ceux des Octes (les mentors des Sarles) qui pensent que le sarcophage contient un Involucra. Comme ils se croient les dignes descendants de ceux-ci, ils estiment que le sarcophage leur revient. Et c’est toute une flotte de vaisseaux Octes qui vient se mettre en orbite autour de Sursamen.

Et puis il y a Djan Seriy Anaplian, la sœur, qui a quitté les Sarles depuis une quinzaine d’années, et qui entretemps est devenue un agent de la Culture et de Circonstances Spéciale en particulier. Quand elle a entendu que son père était mort, elle n’a eu qu’une envie, revenir sur Sursamen pour honorer sa mémoire.

Trois vies, trois trames que le lecteur va suivre tout au long des pages. Dès les premières Iain Banks plonge le lecteur au cœur de l’action. On s’attend ensuite à ce que ce rythme soit soutenu, mais il n’en est rien. Banks a décidé de nous faire visiter la Culture en cinémascope et en Technicolor comme lui seul sait le faire. Que ce soit sur Sursamen le monde gigogne, sur un vaisseau de la Culture ou sur un monde-nid des Morthanveldes, Banks continue à nous surprendre par ses descriptions de civilisations ou de technologies. A partir de la découverte du sarcophage, l’histoire s’anime à nouveau et l’action prédomine jusqu’à la fin du livre. Puis elle se termine de manière inattendue, face à une menace qui met en danger Sursamen. Le livre contient un épilogue dans lequel on retrouve Choubris Holse longtemps après les événements du livre.Il nous laisse deviner le dénouement de l’histoire.

L’image qu’on a de la Culture n’est plus tout à fait la même que celle qu’on avait auparavantt. Malgré son étendue et sa diversité, elle est en contact avec des civilisations aussi développées qu’elle, voire plus développées. On découvre que certaines races ont une race mentor qui elle-même a une autre race mentor, etc.

A noter qu’il y a quelques personnages et lieux originaux : un avatoïde avatar du mental d’un vaisseau de la Culture, un drone qui s’est téléchargé dans un missile-couteau en forme de vibromasseur, un Iln tueur de monde gigogne, des vaisseaux qui ont des noms à coucher dehors et un nombre de personnages secondaires tel qu’il vaut mieux ne pas les retenir (d’où l’intérêt de l’appendice en fin de livre).

On retrouve en fin de livre l’article « Quelques notes sur la Culture » écrit par Iain Banks qui était précédemment disponibles sur le Web en anglais.

Trames est vraiment un excellent livre sur la Culture.

Iain M. Banks, Trames, Traduction: Patrick Dusoulier, 600 pages, Robert Laffont


La flotte perdue T.1 : Indomptable – Jack Campbell

La flotte perdue, T.1  : Indomptable – Jack Campbell (L’Atalante)

C’est un space opera militaire qui commence sur les chapeaux de roue. Après une bataille spatiale, l’amiral Bloch décide de se rendre au Syndic, lui et sa flotte de l’Alliance, pour éviter un plus grand carnage. Avant de partir il demande à John Geary de commander la flotte en son absence. Mais l’amiral se fait exécuter par l’ennemi et la scène est retransmise sur les écrans de tous les vaisseaux de la flotte. Le problème c’est que John Geary n’est pas un officier comme les autres. Il est sensé être mort depuis une centaine d’années lors d’une bataille spatiale contre le Syndic, le même ennemi de l’Alliance. Il est resté endormi pendant un siècle dans un caisson et a été retrouvé par la flotte de l’Alliance. Pendant son siècle de sommeil il est devenu une légende sous le nom de Black Jack Geary.

John Geary va être confronté à sa propre image de héro qui ne colle pas à la réalité et au commandement d’une flotte dans laquelle la plupart des capitaines sont sceptiques sur ses capacités à la diriger. Le problème majeure vient que les
capitaines sont relativement inexpérimentés et qu’ils se battent pour l’honneur et le courage, alors que John Geary fait davantage appel à la tactique et la stratégie. Il doit dans un premier temps sauver la flotte en la mettant à l’abri de l’ennemi, dans un second temps faire réparer les vaisseaux endommagés, et dans un troisième temps conduire cette flotte vers l’Alliance. Sur son chemin la flotte rencontre d’autres flottes du Syndic et John Geary doit former ses capitaines de vaisseaux à l’utilisation de tactiques que lui seul a appris il y a cent ans. De plus il doit convaincre ses officiers qu’il ne faut pas tuer systématiquement l’ennemi. Le défaire est déjà plus que suffisant. On rencontre donc un héros qui veut casser l’image qu’on s’est forgée de lui pendant un siècle. C’est un personnage qui doute de lui et qui doit en permanence convaincre son entourage de ses choix tactiques et stratégiques.

Il est très bizarre qu’un officier qui a dormi pendant un siècle, et vient à peine de se réveiller, puisse commander une flotte alors que d’autres officiers le méritaient certainement. Jack Campbell ne s’étale pas sur le problème et laisse le lecteur face à cette question. Le livre se lit sans déplaisir. Les amateurs de space opera militaire y trouveront leur compte. Les autres lecteurs n’y verront que des combats spatiaux.

Personnellement j’ai trouvé que c’était très loin de valoir le cycle Honor Harrington de David Weber. On ne joue pas dans la même catégorie. Ce cycle est plus du niveau des planètes pirates d’Anne McCaffrey ou de Heris Serrano d’Elisabeth Moon. L’Atalante a récemment sorti le tome 2 de ce cycle : Téméraire. Et il y a encore : Courageous, Valiant, Relentless et Victorious qui doivent normalement suivre. Un  petit cycle sympa, sans prétention, pour ceux qui ne veulent pas s’attaquer à celui d’Honor Harrington.

 

Plaies d’honneur (Honor Harrington T.10) – David Weber

Trop long, trop de  personnages et trop lent. Voilà ce que je reprocherai à ce dixième opus de Honor Harrington. Bien que j’adore ce cycle, je dois constater que David Weber n’a pas pensé à ses lecteurs en écrivant ce livre. Il aurait pu faire 300 pages de moins  sans nuire à l’histoire. Non, malheureusement il faut lire 1100 pages pour se rendre compte que c’est reparti pour un tour.Depuis l’attentat contre le précédent gouvernement Manticorien, cinq ans se sont écoulés et le nouveau gouvernement de Haute-Crète n’a pas cru bon maintenir les investissements militaires, tout comme il n’a pas signé de traité de  paix avec Havre, et par la même occasion n’a pas restitué les système stellaires  conquis. La FRM (flotte royale manticorienne) ne peut pas protéger  convenablement tous les systèmes conquis depuis la dernière guerre. Mais  pendant ces cinq années de trêve la république a reconstruit sa flotte. Honor Harrington et Havre-Blanc sont dans l’opposition et constituent la vraie opposition contre le gouvernement de Haute-Crète. Mais Honor Harrington est envoyée en Silésie pour prendre le commandement de la base de Sidemore. Elle  est aux commandes d’une flotte de vaisseaux qui ne sont pas de toute dernière  génération. Heureusement une flotte Graysonienne constituée de bâtiments  modernes accompagne sa flotte Manticorienne.On assiste à des échanges  diplomatiques entre le gouvernements Manticorien qui est incompétent et le  gouvernement Havrien qui veut la paix mais prépare la guerre si le traité de paix  n’est pas signé rapidement. Un vrai paradoxe. Seul le Protectur Benjamin  Maihew semble rester lucide. Tandis que les relations entre Manticore et  Grayson semblent se détériorer à cause de l’incompétence du gouvernement Haute-Crète, il n’a pas hésité à renforcer la flotte de son meilleur officier et à  renforcer le détachement Manticorien qui protège le trou de ver de l’étoile de  Trévor.

Ce livre est moins guerrier que les précédents. David Weber s’est focalisé sur les différents protagonistes (en trop grand nombre) et nous fait suivre toutes leurs élucubrations et tergiversations jusqu’au point de non retour. On peut pratiquement dire qu’il ne se passe rien dans le premier des deux tomes, et que l’histoire ne démarre qu’après 200 pages dans le second tome. C’est beaucoup de temps perdu pour le lecteur. Les scènes de bataille sont bien présentes, mais elles sont coupées, comme si David Weber n’avait plus envie de nous les raconter jusqu’à leur dénouement. Souvent c’est au chapitre suivant  qu’on apprend que la bataille à été gagnée par un des adversaires.

Après lecture de ce tome 10 beaucoup trop gros, on comprend que Manticore se retrouve à la case départ et que David Weber a placé ses personnages dans une situation qui permettrait d’écrire encore plusieurs livres. Mais apparemment, dans un futur proche, le lecteur devra se contenter que d’un onzième tome (pas encore traduit) et six livres de nouvelles se situant dans l’honorverse (l’univers de Honor Harrington). Reste à savoir si l’Atalante traduira et éditera aussi ces six livres.

A lire absolument pour les inconditionnels d’Honor Harrington (dont je suis),  mais ce n’est pas le meilleur livre du cycle. Tout au plus le plus épais. C’est plus  une vraie épreuve qui met à rude épreuve la patience du lecteur. Je me demande  parfois si ce livre n’a pas été écrit tout simplement pour vérifier la fidélité des fans de la série. Oui, je sais, j’en fais partie !